Algérie

Mobilisation contre le 5e mandat à Tlemcen: «Nous ne sommes nullement privilégiés»



Mobilisation contre le 5e mandat à Tlemcen: «Nous ne sommes nullement privilégiés»


L’idée farfelue qui consistait à faire croire que Tlemcen était acquise au clan des Bouteflika et du pouvoir, s’est évaporée, avant-hier, avec la sortie de milliers de citoyens dans toutes les artères de la ville pour refuser en chœur «Le mandat de plus, le mandat de trop !» et de conseiller, avec civisme, «Monsieur le Président, sans incident, quittez le pouvoir !». La cité des Zianides, pudique de nature, s’exprimait rarement dans la rue.

Elle boudait les urnes ou quand il lui arrivait de voter, elle ne le faisait pas en faveur du chef de l’Etat actuel. Les autres, les opportunistes, les aplaventristes et la pègre profitant du clan le faisaient à sa place, en gonflant le taux de participation et les scores des consultations électorales.

Les fraudeurs, dont les commis de l’Etat, jugeaient que «c’est une honte que le Président perde ou obtienne un mauvais score dans sa wilaya». C’est une «sentence» qu’on a longtemps inculquée dans l’esprit des sbires du clan.

Ce pouvoir local occulte est bâti sur de l’argent à l’origine suspecte et des accointances avec les familles proches du chef de l’Etat, des ministres et autres conseillers à la Présidence. Le Tlemcénien lambda ne se sentait pas concerné par ces mises en scène et rejetait cette référence honteuse «Tlemcen, wilaya du Président».

Une étiquette qui a causé du tort à la population, à son histoire. Cette mafia a montré et surtout confirmé son impunité lors de la visite de Rachid Nekkaz à Tlemcen pour la collecte des signatures. Des énergumènes, connus pour être les gorilles du pouvoir local, l’ont sauvagement agressé, au nez et à la barbe des agents de police.

Même pour déposer une plainte contre ses agresseurs, Nekkaz l’a fait dans la wilaya de Aïn Témouchent. C’est dire que dans cette ville historique et du savoir, on n’est pas tous jugés selon les mêmes lois de la République.

«Il y a la loi de la mafia avec ses magistrats.»

Aussitôt après cette lâche agression, les vrais Tlemcéniens ont réagi, offusqués: «Ces voyous ne nous représentent pas. Avec leurs actes, ils ternissent notre image. Nekkaz ou d’autres sont des Algériens et ils ont tous les droits pour s’adonner à leurs activités politiques.»

Noureddine Belhouari, élu MSP à l’APW, estime que «le réseau d’influence des vingt dernières années a généré une autorité locale parallèle, mais ce qui est amoral, c’est que cette autorité impose sa loi d’une manière scélérate et immorale et soit légitimée par le pouvoir de l’argent et celui des institutions».

Amine Gourmala, chef d’entreprise et militant de Talaie El Hourriyet, rappelle un triste épisode de sa vie: «Pour avoir soutenu Ali Benflis lors de la précédente élection présidentielle, j’ai été banni par le pouvoir, on m’a retiré un grand projet en voie d’achèvement et on m’a interdit de soumissionner à l’échelle nationale. En fait c’était une condamnation à mort. Mais c’est fini tout ça, nous avons notre mot à dire, nous les Tlemcéniens, démocratiquement, bien entendu…».

Avant-hier, les Tlemcéniens sont sortis en masse pour dire «Non à Bouteflika», mais c’était surtout un message direct à ces opportunistes qui font leur loi à Tlemcen.

La pègre agitant l’épouvantail de Bouteflika et ses ministres ont fini par lui octroyer cette «force de terreur» ayant détruit des hommes opposés au pouvoir sur la base de faux dossiers transmis à la justice. Une mafia qu’on ne pouvait combattre, d’où la résilience des honnêtes et humbles Tlemcéniens. Mais samedi, le sentiment de révolte s’est réveillé.

«Nous ne rentrerons pas chez nous tant que ce régime de scélérats n’aura pas annoncé le retrait du candidat moribond et le départ de son clan mafieux» déclaraient, déterminés mais heureux, les manifestants, jeunes et moins jeunes.

Hanane G., médecin, résume le sentiment général des gens de Tlemcen: «Nous ne sommes nullement privilégiés par rapport à nos concitoyens, nous ne tirons aucun profit ni mérite de l’appartenance du chef de l’Etat à notre région. Nous sommes des Algériens comme tous nos concitoyens et nous aimons notre pays !»


Chahreddine Berriah


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