Il suffit que la fable empiète sur nos vieux livres d'historiettes et de légendes pour que le ciel s'assombrisse sur-le-champ et que l'âtre s'illumine puis se constelle d'autant d'étincelles qu'il y a de souvenirs dans le tiroir mémoriel où gisent nos souvenirs d'enfant. Et à l'instant où la conteuse Mina Belmihoub entonna le sésame-clé et d'usage du "Hadjitek", que l'auditoire de la salle des actes de l'institut Cervantès répondit en ch?ur "Madjitek". Magique ! la salle s'est harmonisée au bal enguirlandé de "la princesse Chabha et sa djeba magique" à laquelle s'est invitée l'effrayante "Settoute", la sorcière au nez crochu et à la langue fourchue.C'est dire qu'au prélude "d'Amachahu", c'est tout l'univers d'êtres fabuleux qui a jailli de la boîte de Pandore, à l'instar de l'effrayante tseriel (ogresse) qui hantait les eaux et les forêts. Et, puisqu'on est dans le rêve, Mina Belmihoub narra au ton théâtrale l'mhadjia (conte) de la fille à la longue chevelure qui a laissé au hasard d'une promenade en forêt, un long cheveu sur les ronces des bosquets de l'épouvante. Une mèche de cheveu si semblable au soulier de Cendrillon et dans le goût de l'épouvantable légende du hammam des meskhoutine où plutôt le bain des damnés de l'antique Aquae Thiblitanae où le contemporain hammam de Guelma.
Tourmentée, la pauvresse fugua alors l'incestueux amour de son frère et s'en alla trouver refuge en haut d'un arbre où elle sera cueillie telle une colombe par l'inévitable prince charmant. Pris au jeu et l'oreille toute ouïe, l'auditoire de 7 à 77 ans s'est abreuvé ainsi à l'éloquence du récit de l'impossible amitié entre Nya mâa l'hila (La naïveté et la ruse) ou l'acariâtre dame la malice martyrise l'innocence, d'où la citation de l'écrivain Miguel de Cervantès Saavedra (1547-1616) : "L'orgueil presque toujours suit le vice ; l'humilité pare la vertu".
Certes qu'il est consensuel que "la franchise sert mieux que la ruse", d'où la morale que la narratrice Mina Belmihoub tente d'extraire à l'aide d'envolées anecdotisées par la gaîté de l'imitation et l'humour dans le geste : "C'est le recueil d'histoires au côté duquel on s'est bercé au fil des pages et des longues nuits d'hiver autour de l'âtre de tendre grand-mère. Néanmoins, ce florilège d'historiettes se doit d'être réactualisé pour qu'il soit dans l'air de la contemporanéité" a déclaré la conteuse. Autre argument, le décor mais surtout le talent de la dame à converser avec le soleil, la pluie et le vent : "Je contais déjà à 9 ans sur l'estrade de l'école et depuis je me suis lovée dans l'univers merveilleux de l'enfance.
À ce sujet, je rêve d'intégrer l'école publique pour créer la matière conte qui a concouru à l'éveil de l'enfance vers l'âge adulte" a ajouté notre diseuse. Issue de l'atelier des femmes conteuses qu'animait Si Mohamed Baghdadi sous le label de perles d'eau où étincelaient Aït-Kaki Djazia, H'nifa Hamouche, Yamina Toubal et Assia Lafite. Notre interlocutrice nourrit d'ailleurs le projet d'écriture de contes.
L. N.
Posté Le : 06/06/2019
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Louhal Nourreddine
Source : www.liberte-algerie.com