Algérie

Mhamed Hamidouche. Economiste : «La détention de DTS permettrait à l'Algérie d'assurer ses ressources»



-Pour alimenter son mécanisme anticrise en zone euro, le FMI a décidé d'augmenter ses ressources. Pour cela, il compte sur l'apport des BRICS. Or, ces derniers évoquent au préalable une réforme de la gouvernance des institutions de Bretton Woods. Sur quoi pourrait déboucher, à votre avis, cette situation '
Les institutions de Bretton Woods ont été créées au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Le FMI devait faire face aux déficits des balances de paiement, tandis que la Banque mondiale devait aider à la reconstruction de l'Europe. Le montage et la structure des deux institutions ont été ficelés de telle sorte que la BM soit présidée par un Américain et le FMI par un Européen. Sur le plan structurel et administratif, Américains et Européens ont une part prépondérante dans le capital et, par conséquent, le pouvoir de décision. La nomination des responsables relève de la décision politique. Les BRICS cherchent à modifier la gouvernance établie de ces deux institutions, mais ce n'est pas chose facile.
La structure du capital demeure dominée par l'Europe et les USA, ainsi que leurs alliés comme le Koweït et l'Arabie Saoudite. La crise en zone euro représente un risque éventuel de 8000 milliards de dollars. Dans ces conditions, le FMI est devant une crise monétaire qui touche les balances de paiement des pays ; il sera donc le premier appelé à y faire face. Par conséquent, lever des ressources auprès des pays membres devient prépondérant dans la politique qu'il doit mener dans les 5 prochaines années. Les liquidités posent un réel problème ; le FMI a même eu recours à la vente de réserves d'or pour faire face aux besoins de liquidités. Il est donc naturel de le voir aujourd'hui demander aux pays membres d'augmenter leurs participations.
-Pour augmenter ses ressources lors de la crise des subprimes en 2009, le FMI avait procédé à une allocation de droits de tirage spéciaux (DTS). L'Algérie n'a pas mis à profit cette occasion pour acquérir de nouveaux DTS. Comment interprétez-vous cette position '
Les DTS détenus sont inscrits au bilan de la Banque centrale. Sur le plan de politique monétaire, la détention de DTS permet la création de monnaie locale en contrepartie. Ils ouvrent également droit à une rémunération en fonction des ressources engendrées par le FMI. Ces rémunérations ne sont certes pas très conséquentes, mais elles engendrent des ressources. Certains pays utilisent les DTS, à l'image du Koweït et de l'Arabie Saoudite cités plus haut. Car il faut savoir que les DTS constituent une garantie de dépôt. Par contre, des pays à l'exemple de l'Algérie préfèrent placer leurs ressources financières via des intermédiaires ou des sociétés d'investissement. Des placements motivés par des rémunérations 2 ou 3 fois plus élevées que celle des DTS. Aussi, une fois les placements arrivés à maturité, souvent à moyen terme, les liquidités sont restituées à la Banque centrale laquelle peut réviser sa politique de placement. A mon avis, si l'Algérie maintient cette option, c'est par défaut de vision, préférant ainsi le court terme sur le long terme.
-Si l'Algérie décidait de recourir à une souscription dans le cadre d'une nouvelle allocation de DTS, quel serait l'intérêt d'une telle option '
Cela relève d'une décision politique qui peut influencer la politique monétaire. De mon point de vue, cette option pourrait être très intéressante dans la mesure où elle permettrait d'assurer une partie de nos ressources. Car en voyant ce qui s'est passé récemment avec la Grèce et l'annulation d'une partie de sa dette, on voit qu'aucun autre placement ne peut donner de garantie effective. La détention de DTS pourrait aussi permettre d'adopter des politiques d'influence par le biais du FMI et de faire du lobbying en association avec d'autres pays afin d'orienter certaines décisions du FMI à impact direct ou indirect sur l'économie nationale. A mon avis, la détention des DTS permet à la fois d'assurer des ressources, de garantir une stabilité au bilan de la Banque d'Algérie, notamment en ce qui concerne la contrepartie en monnaie locale, mais aussi de diversifier le portefeuille de devises.




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