Algérie


Résumé : Meriem fut contente de sa journée en plein air. Mais le ciel devenait bas, et elle rebroussa chemin pour rentrer avec Daouia qui marchait derrière elle. La neige avait fondu par endroits et ses pas glissaient. Avait-elle peur 'Elle hoche la tête.
-Oui. Un peu. Je craignais qu'on s'égare dans ces sentiers enneigés.
-Que fais-je moi donc ici '
-Je sais que je ne devrais pas m'inquiéter, mais comme je n'ai pas l'habitude de ces endroits un peu étrangers pour moi, je ne pouvais m'empêcher de penser au pire.
-Ne t'en fais donc pas. Ali est déjà remonté, et nous allons le suivre de loin. S'il avait vu qu'il pouvait y avoir un quelconque danger, il n'aurait pas hésité à venir à notre rencontre.
-Je le pense bien, Daouia. Mais je suis très satisfaite de ma journée, et je vous en remercie infiniment, toi et Ali.
Daouia lui prend la main.
-Tu n'as pas à nous remercier, c'était un plaisir de t'avoir avec nous. Tu pourras venir à la maison quand tu voudras, je te recevrai toujours avec joie.
Meriem allait répondre, lorsque son pied droit heurta une grosse pierre, elle trébucha et tenta de s'accrocher à quelque chose, mais la boue accrochée à ses bottes n'était pas pour l'y aider. Elle perdit l'équilibre et tomba de tout son long dans la neige !
-Oh mon Dieu !, s'écrie Daouia, en courant vers elle, pour l'aider à se relever. Meriem s'agrippa à son bras, et tenta de se remettre sur pied. Une douleur fulgurante traversa sa jambe droite. Elle poussa un long cri et se laissa retomber dans la neige, avant de vomir ses entrailles.
Daouia s'affola.
-Meriem ! Meriem !
La jeune fille s'essuya la bouche et reprit son souffle.
-Je crois que je me suis fracturé la jambe.
-Ne dis pas de bêtises. C'est sûrement une petite entorse ou une foulure que tu as à la cheville. Je vais rappeler Ali, et nous allons te conduire à la polyclinique.
-Il fera bientôt nuit, lança Meriem qui commençait à frissonner. Et j'ai tellement froid.
Daouia se releva.
-Ne bouge pas, je reviens dans quelques secondes.
Une demi-heure plus tard, Meriem se retrouvait à la polyclinique du village. Ali l'avait portée jusqu'à la ferme, puis avait fait appel à un conducteur de tracteur pour se frayer un chemin à travers la route enneigée. Daouia semblait inquiète. Elle s'en voulait à mort de ne pas avoir pu empêcher cet accident de dernière minute. Mais le fait était là. Meriem ne pouvait pas se tenir sur sa jambe droite.
Le médecin diagnostiqua une fracture et ordonna la pose d'un plâtre avant de prescrire quelques médicaments qu'Ali s'empressa d'aller acheter à la pharmacie. Puis tout le monde remonta à la ferme dans le tracteur, et Daouia plus morte que vive, tapa à la porte de la grande maison. Taos leur ouvrit et écarquilla les yeux.
-Qu'est-il arrivé à Meriem '
-Ce n'est rien, elle s'est fracturée en tombant dans la neige, répondit Ali, qui venait de pénétrer dans la grande salle pour déposer la jeune fille sur un canapé.
Taos porte la main à sa gorge.
-Elle s'est fracturé la jambe, et tu trouves que ce n'est pas grand-chose '
Ali remet son burnous sur ses épaules et répondit d'une voix où perçait la colère.
-Bien sûr que ce n'est pas grand-chose. Meriem aurait pu tomber sur quelque chose de tranchant ou se briser la nuque sur une pierre. Grâce à Dieu, elle est vivante, et sa fracture ne sera bientôt qu'un mauvais souvenir.
Houria qui venait de sortir de sa chambre s'avança.
-Que se passe-t-il ' Pourquoi tout ce monde et ces cris '
Puis elle remarqua Meriem sur le canapé, et ses yeux lancèrent des éclairs.
-Te voilà enfin, petite vaurienne. J'ai passé la journée à me faire un sang d'encre pour toi. Où étais-tu donc passée '
-J'étais avec Daouia. Nous nous sommes promenées.
-Voyez-vous cela. Tu te promenais, alors que je m'inquiétais pour toi.
Puis elle remarqua sa jambe plâtrée.
-Qu'as-tu à la jambe '
Meriem déglutit, et lança un regard suppliant à Daouia qui osa répondre.
-Meriem a glissé dans la neige. Elle s'est fracturé la jambe, et nous l'avons emmenée à la polyclinique où on lui a posé ce plâtre.
Houria suffoquait.
-Et tu viens me raconter ça sans honte ni gêne, Daouia ' C'est toi que j'accuserai la première dans ce qui arrive à ma belle-fille. C'est toi la grande fautive. Tu lui as farci le crâne avec tes balivernes, et tu l'as entraînée dans la neige. Ce matin, elle a quitté la maison sans avertir qui que ce soit, on dirait que personne n'existe pour elle.
-Lla Houria...
-Tais-toi. Je ne t'ai pas autorisée à me répondre. Demain, j'enverrai un télégramme à Amar et il avisera. Je lui avais pourtant assuré que durant son absence les rats sortent de leur trou. Ah mon Dieu ! S'il avait été ici en ce moment, je ne sais pas ce qu'il aurait fait en voyant sa fille dans un tel état. Qui t'a donc poussée dans la neige, Meriem '
-Personne. J'ai glissé.
-C'est bien fait pour toi. Cela t'apprendra à fréquenter ces gueux.
Ali lève la main.
-Nous ne sommes pas des gueux, Houria. Rappelle-toi plutôt ta condition avant que Amar ne vienne te repêcher et ne t'assure une vie décente.
Houria pâlit. Ali venait de dire une vérité qui réveilla ses démons. Elle prit une lente inspiration et lui indiqua la sortie.
-Dehors, vieux chenapan. Dehors ! Que je ne vois plus ton air de sorcier. Et toi, la petite demeurée, qu'attends-tu pour prendre ton mari et retourner dans ton taudis '

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