Algérie

Menuiserie traditionnelle à Mila : Un véritable filon en latence



Menuiserie traditionnelle à Mila : Un véritable filon en latence
La splendide «gassaâ» made in Mila se taille une place de choix chez les ménagères. Une véritable industrie artisanale de cet ustensile traditionnel s’est développée dans cette ville à l’orée des années 1980.

Les artisans, des menuisiers en la matière, qualifient de «vrai filon» cette spécialité professionnelle qui a certes prospéré dans un cadre informel dans la région de Draâ Tebbal (le bras du tambourinaire), à 2,5 km à l’ouest de la commune d’Aïn Melouk.

Aujourd’hui, ils sont une soixantaine d’artisans à exercer ce métier transmis de père en fils et qui a survolé plusieurs générations.

Fuyant les affres de l’armée coloniale, ces derniers, issus des massifs montagneux de Beni Âfer et de Chahna (Jijel), se sont établis entre 1954 et 1960 à Draâ Tebbal, où ils ont donné la pleine mesure à leur talent de manufacturiers.

Véritables pionniers de la menuiserie traditionnelle, les Beniyasaâd, Fertas, Benalilèche, Belaïb, Boukriba et Boufafa, pour ne citer que ceux-là, excellent dans l’art de confectionner, avec des moyens rudimentaires, des écuelles, des cuillères et des assiettes en bois.

Mais, c’est sans conteste la splendide gassaâ, ou jatte (toutes tailles confondues), qui tient le haut du pavé. Un pur produit du terroir qui a la cote tant au plan local que chez les grossistes de M’sila, Skikda, El Khroub, Sétif et Bordj Bou Arréridj.

Artisan menuisier lui-même, Rabie Benalilèche assure que «la corporation s’accroche, en dépit des aléas, à cette filière, parce qu’elle constitue son gagne-pain. Les fabricants d’ustensiles en bois n’ont bénéficié ni de subvention ni de locaux professionnels. Ils se débrouillent avec leurs propres moyens et travaillent dans des gourbis et autres masures.»

Un métier menacé de disparition

Le constat est étayé par Saïd Benalilèche, qui a commencé à pratiquer cette activité vers 1985 : «Une gassaâ fabriquée à base de bois d’eucalyptus comme on en voit ici et là, est une khorda (du toc). Car, la gassaâ de qualité à la longévité assurée, est celle qui est confectionnée à partir de troncs de frêne, de peuplier, de cèdre, de saule et de platane.

Or, l’acquisition de ces matières premières dans les wilayas lointaines de Guelma, El Tarf et Tébessa devient de plus en plus problématique, vu l’éloignement et les frais de transport onéreux.»

Et d’ajouter : «La filière est sérieusement menacée d’extinction. Si les pouvoirs publics ne volent pas à notre secours via les dispositifs d’aide et de soutien, nous courrons à notre propre faillite.»

A ces contraintes d’approvisionnement en intrants se greffent d’autres difficultés relatives à l’acquisition de matériel de menuiserie traditionnelle.

A cet effet, d’autres intervenants approchés ont mis en avant les surcoûts induits par l’achat de machines et d’outillage industriels. «Nous puisons dans nos maigres ressources pour l’achat de matériel de base.

A titre d’exemple, une bonne tronçonneuse Stihl (marque allemande) nous revient entre 60 000 et 140 000 DA, alors que le tour, à lui tout seul, coûte une petite fortune», affirment-ils.

La filière des ustensiles en bois, à Mila, atteindrait certainement sa vitesse de croisière si cette activité venait, comme cela a été envisagé il y a quelque temps, à être classée comme Système productif local (SPL).

Mahmoud Boumelih


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