Algérie

Menaces non codées



Les pressions sur l'OPEP montent au fil de la hausse des prix du pétrole. Dernière déclaration en date, celle       du Premier ministre britannique, qui, à la tribune de la réunion de Djeddah, dans une phraséologie lénifiante mais lourde de sous-entendus pas toujours amicaux, invite l'OPEP à augmenter sa production et suggère que les trois mille milliards de bénéfices additionnels générés par la hausse des prix devraient être réinvestis en Occident, dans le secteur des énergies alternatives. Le Premier ministre de Sa Majesté a répété que la situation actuelle du marché est directement imputable à l'insuffisance de l'offre et que la situation actuelle pourrait conduire à la dégradation des standards d'existence des consommateurs de son pays.

La distorsion des réalités est une constante du discours politique et, dans le genre, le cynisme est, semble-t-il, une vertu majeure. A Djeddah, Gordon Brown a fait montre en l'espèce d'une rare maîtrise de l'exercice. Le Premier ministre, sans se démonter, a mis en demeure l'OPEP d'augmenter sa production, en sachant pertinemment que seuls l'Arabie Saoudite et les Emirats disposent de réserves de production susceptibles d'être mobilisées. Mister Brown sait également que l'OPEP n'assure que 40% de la production mondiale.

Et, last but not least, le chef du gouvernement britannique sait mieux que personne, pour avoir été chancelier de l'Echiquier (ministre des Finances), que la Bourse de Londres avec celle de New York sont les lieux où l'escalade des prix se décide. Et, cerise sur le gâteau, dans un monde où plus d'un milliard d'hommes sont confrontés à la famine, il n'a pas hésité à jouer sur la fibre émotionnelle de la perte de pouvoir d'achat de ses concitoyens.

A l'évidence, ces propos montrent, s'il en était besoin, que la fonction de fondé de pouvoir des spéculateurs financiers est assumée par nombre de dirigeants occidentaux sans la moindre distance. Au-delà, la réunion de Djeddah est l'occasion pour les Occidentaux et leurs médias d'installer un axe de communication clairement lisible: la crise des prix relève de l'avidité des producteurs arabes qui ne veulent pas satisfaire la demande pour maintenir la courbe haussière actuelle.

Pour d'autres observateurs, cette réunion sans résultats concrets attendus avait peut-être d'autres objectifs. De fait, la conférence de Djeddah aura finalement montré un jeu saoudien trouble dans ce poker pétrolier menteur où la levée des enchères augure des lendemains difficiles.

Sans coordination avec leurs homologues de l'OPEP, les dirigeants wahhabites, qui n'oublient sans doute pas ce qu'ils doivent à l'Intelligence Service, ont répondu positivement à toutes les demandes britanniques. Ainsi, ils annoncent par la bouche du ministre du Pétrole qu'ils sont prêts à augmenter leur production de 9,7 milliards à 12,5 milliards de barils/jour, « si la demande correspondante existe ». Dans le contexte actuel de menaces de guerre, la déclaration a été rapidement décryptée. Cette augmentation annoncée de 2,5 milliards de barils correspond au quota de l'Iran. D'aucuns ont cru comprendre que la crise actuelle ne connaîtrait pas d'aggravation si la production iranienne venait à s'interrompre. De là à penser qu'on pave le terrain pétrolier à la prochaine guerre contre les Iraniens, il n'y a qu'un pas que la folie des néoconservateurs, dont Mister Brown est très proche, autorise à prendre au sérieux...






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