Algérie

Mémoire tourmentée



Quand son présent se teinte des couleurs de l'incertitude et son futur s'embrume, la France cultive toujours un réflexe. Elle se retourne vers un passé qu'elle veut parer contre toute évidence de vertus émancipatrices. Le débat qui enfle en France sur le dernier film de Rachid Bouchareb a le mérite de lever de nouveau le voile sur les problèmes que vit d'abord la France avec son passé. La guerre d'Algérie, honteusement réduite, des décennies durant, à  de simples événements, est une séquence particulièrement éprouvante pour sa mémoire. Elle condense en effet le pire de ce qui  peut arriver à  un pays. Son armée fut chargée d'exécuter les plus sales besognes sur des citoyens abusivement considérés comme des citoyens même de second collège. Rien n'aura été épargné durant un peu plus d'un siècle aux Algériens. Les enfumades, les expropriations, les déportations et toutes les mesures qui contredisent les valeurs et les préceptes sur lesquels prétendaient s'asseoir l'identité française et rayonner la culture française. Un fils de notable algérien, Nadir Bouzar pour ne pas le nommer, avait publié un livre « Abus de confiance », un titre emblématique. Les contorsions des nostalgiques de l'Algérie française qui s'agitent ces jours-ci sont le symptôme de cette mémoire qui n'arrive plus à  se dégager de la gangue de la honte. Plutôt que de se repentir ou à  tout le moins de se taire, on semble se complaire à  s'honorer des tâches du passé. Les historiens ont beau mettre à  jour toutes les avanies, déterrer des rapports et écrire sur le 8 Mai 1945 qui avait coûté la vie à  des milliers d'Algériens, une certaine France  rance refuse de dessiller ses yeux, de voir son passé. Le film Hors-la-loi, qui semble tant gêner, est pourtant, de l'avis de ceux qui en ont vu des extraits, en deçà des vérités établies par l'Histoire. Il reste tant de films à  faire sur cette période. Mais décidément, dans un pays où l'on a décidé d'introduire des cours d'éducation patriotique à  l'école ou l'on aime célébrer avec faste dates et personnages, l'instrumentalisation de l'Histoire n'est qu'ailleurs. A nous les flonflons des célébrations et aux autres l'amnésie.


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