Algérie

Mémoire de mai



La commémoration du 8 Mai 1945, si elle est pour les Algériens un devoir de mémoire, rappelle dans le même temps que la charge émotionnelle qui lui est attachée n?a pas été dissipée par la marche du temps. Il en va de cette date comme des grands moments qui ont constitué les jalons de l?histoire universelle. Nul ne peut, aujourd?hui, par une forme suspecte de la pensée unilatérale, décréter que le 8 Mai 1945 ne saurait être évoqué au prétexte qu?il nourrirait une concurrence des mémoires. Il faut le dire nettement, c?est toujours du côté de l?ancienne puissance coloniale que s?affirme cette démarche exclusive du rapport à l?histoire et en l?occurrence le refus obstiné, y compris dans le discours politique français d?aujourd?hui, de reconnaître sa responsabilité dans des massacres collectifs qualifiés. Cela était le cas à Sétif, Kherrata et Guelma, lors de cette journée tragique du 8 mai 1945. Ce n?est pas entretenir une concurrence des mémoires que de faire, au moins, un parallèle entre ces massacres et ceux commis par l?armée d?occupation allemande, des habitants du village français d?Oradour-sur-Glane dont le seul rappel révulse et indigne toute conscience humaine. Les devoirs de mémoire ne doivent pas être pour autant convulsifs, ils peuvent être sereins et apaisés car il en va d?un sentiment qui transcende toutes les obstinations et tous les replis, celui que Français et Algériens appartiennent à la même humanité. Il ne s?agit pas de réécrire l?histoire, mais de faire le rappel que la présence coloniale de la France en Algérie a généré des dérives et des atrocités. Il eût été préférable que la France n?ait point exercé de domination coloniale en Algérie et dans ce cas de figure, nul n?aurait pu la tenir comptable d?actes tout de même commis en son nom pour un office de civilisation que les peuples soumis n?avaient au demeurant jamais appelé de leurs v?ux. Une chose peut toutefois être soulignée, ce ne sont pas tous les Français qui, au fil des âges -132 ans de présence coloniale- ont cru que leur pays avait vraiment une mission civilisatrice en Algérie. Les Algériens le pensaient d?autant moins encore non pas parce qu?ils n?aimaient pas la France et les Français, mais parce qu?ils leur préféraient la dignité d?être libres dans leur pays lui-même. C?était le sens du 8 Mai 1945, ce sera aussi celui du 1er Novembre 1954. La haine, le ressentiment rancunier ne peuvent pas pas, ou plus, avoir leur part dans ces pages d?histoire qui disent à chacun d?où il vient. C?est faire offense à la mémoire des victimes des massacres du 8 mai 1945 que de vouloir faire croire à l?opinion française de 2007 qu?ils ne sauraient faire concurrence à d?autres mémoires. La vérité des uns n?est pas dans de telles conditions celle des autres car il est de règle qu?après le silence des armes ce sont les vainqueurs qui écrivent l?histoire. A plus forte raison lorsque, à leurs dépens, elle fut trop longuement occultée et travestie. Il est difficile de faire croire à quiconque pourvu de bon sens que les massacres de Sétif, Kherrata et Guelma sont à mettre au crédit d?un colonialisme français bienfaisant en Algérie.


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