Algérie

Mémoire blessée, Algérie 1954 de Mohamed Sahnoun, (Roman) - Éditions Presses de la Renaissance, Paris 2007



Mémoire blessée, Algérie 1954 de Mohamed Sahnoun, (Roman) - Éditions Presses de la Renaissance, Paris 2007
Présentation

Alger, 1957. Salem, jeune militant pour l'indépendance mu par des idéaux de justice et de générosité, est arrêté avec son camarade Mahmoud pendant " la bataille d'Alger ". Enfermés à la " Villa Blanche ", ils subissent supplice et humiliation. Ils vont pourtant trouver un magnifique soutien de la part d'hommes et de femmes de différentes origines, des civils, des religieux et des militaires, qui courront le risque de les protéger et de les héberger, en Algérie et en France.

Comme cet officier qui se préoccupe, en prison, de la santé des détenus, cet avocat courageux qui paiera de sa vie son devoir d'humanité, ce médecin de campagne et son épouse, cette communauté de prêtres-ouvriers à Puteaux... Autant de magnifiques exemples de cette fraternité qui permet de garder espoir. Récit bouleversant de la souffrance indescriptible et gratuite infligée par des hommes à leurs semblables, Mémoire blessée est aussi le témoignage d'une belle et courageuse solidarité humaine, un hymne à cette responsabilité individuelle de protéger. Un témoignage salutaire sur l'importance du devoir d'humanité.

Si un livre devant s'inscrire dans le devoir de mémoire pour une écriture objective de la Révolution algérienne, c'est bien celui que vient de publier Mohamed Sahnoun, acteur et témoin de l'Algérie combattante.

Son livre est un témoignage vivant, émouvant mais terrible de la souffrance des Algériens dominés et de leur combat pour la liberté pendant 130 ans de domination coloniale.

Alors qu'il était étudiant à Paris au déclenchement de la Révolution algérienne, le 1er Novembre 1954, Mohamed Sahnoun, du fait de la grève des étudiants algériens des universités françaises, rejoint Alger en 1957 pour renforcer les réseaux du FLN en particulier auprès des Français progressistes et des Chrétiens engagés déjà pour l'émancipation du peuple algérien et auxquels il était déjà lié dans des actions sociales.

Ses activités, quoique clandestines, attirent l'attention des services de police. Informé à temps d'une arrestation imminente, il doit suivre son compagnon de cellule Mahmoud à Laghouat où ce dernier a des parents. C'est dans cette ville qu'il est arrêté avec Mahmoud puis transférés à Alger pour des interrogatoires plus que musclés dans les locaux des parachutistes du général MASSU en particulier dans la célèbre et sinistre Villa Susini.

Toutes les formes de torture sont utilisées sur eux (le supplice de la baignoire, de la Gégenne, pendaison...) pour les obliger à dévoiler les chefs des réseaux. Mais en vain, malgré l'enfer où ils se trouvaient. Alger, en cette année 1957, était livrée au bon vouloir des parachutistes qui tentent de briser la résistance de tout un peuple. Leurs déboires au Vietnam et en Egypte les transforment en «bêtes sauvages». Les soldats usent et abusent de leurs pouvoirs. Des jours, voire des semaines d'horreurs, de barbarie sans même une minute de répit au regard de cette fraternité humaine ou de compassion chantée naguère par Hemingway.

Le narrateur qui décrit les supplices de Salim, qui est en fait lui-même, rappelle la solidarité des détenus dans les camps militaires plus que concentrationnaires.

Or, lorsqu'un peuple veut vivre libre, aucun obstacle ne l'empêche d'arriver à ses fins. Face aux militaires et policiers inhumains, le détenu, mu par sa foi, devient un homme d'exception par la maîtrise de la résistance à la souffrance. En effet, le caractère se durcit, la conscience s'aiguise, l'audace et le courage s'affermissent en réaction à la domination coloniale. L'idéologie coloniale est une tuerie morale, culturelle et déshumanisante. Grâce aux pressions de certains intellectuels français qui ont informé les médias et certains hommes politiques influents, Salim et Mahmoud ont droit à une parodie de justice.

Au fil des pages du livre où alternent descriptions terribles des interrogatoires hystériques et réflexions de sagesse et d'humanisme, on peine à croire que certains détenus aient pu survivre alors que d'autres décèdent sous la torture, camouflés comme s'étant évadés. Même certains juges se font complices des militaires et les couvrent malgré les preuves matérielles flagrantes les incriminant pour leur dépassement sur les détenus. Libéré après avoir purgé sa peine Salim est pris en charge clandestinement dès sa sortie de prison grâce à des complicités à plusieurs niveaux.

En effet, généralement le détenu à sa libération est «cueilli» à la porte de la prison par des militaires habillés en civil pour une destination inconnue. Evacué sur la France également clandestinement et avec mille précautions, Salim Sahnoun est pris en charge par des intellectuels et des prêtres engagés. D'ailleurs, il leur doit un hommage fraternel bien mérité pour leur aide, le soutien moral et matériel prodigués non pas seulement à lui mais aussi à d'autres patriotes algériens recherchés par les services de sécurité.

Par leur action sincère pleine d'humanisme, ces intellectuels, ces prêtres ont scellé l'amitié entre le peuple français, qui se rappelle l'occupation allemande de la deuxième guerre mondiale et le peuple algérien qui combattait non la France des valeurs républicaines de liberté, égalité et fraternité, mais un système colonial impérialiste oppresseur qui transforme les pays en otage du capitalisme international.

Sahnoun ex-ambassadeur algérien et représentant personnel du secrétaire général de l'ONU dans de nombreuses missions humanitaires, par son témoignage pour l'avenir interpelle les hommes pour qu'ils deviennent et soient plus humains car, l'Histoire en tant que mouvement d'idées ne peut être bloquée par l'épée. Le livre de Monsieur Sahnoun écrit, sans rancune, avec une profondeur humaniste qui honore son auteur et la diplomatie algérienne, dans un style d'une grande élégance qui apaise et réconforte l'esprit.

Merci Monsieur Salim Sahnoun pour ce livre qui rappelle une page glorieuse de l'histoire algérienne contemporaine mais avec une prospective d'espoir et d'espérance pour le genre humain. Enfin, ce livre-témoignage qui restera une référence pour l'écriture de l'histoire de l'Algérie colonisée, il serait souhaitable qu'il soit traduit en arabe pour les générations futures.


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