Algérie

Même le Pouvoir se plaint du Pouvoir



Selon des indiscrétions recueillies passivement, même lePouvoir se plaint de la lenteur du Pouvoir aujourd'hui. Explication: prenant lepouvoir à une époque où il n'existait plus que sous la table et dans les salons,Bouteflika aurait décidé de centraliser toutes lesdécisions de nominations, mutations, promotions et licenciements à son niveau, surson bureau, à droite de sa main droite. Du coup, ministre ou pas, haut cadre oupas, personne ne pouvait plus faire bouger personne dans ce pays sans passerpar El-Mouradia. Le Pouvoir en ressortit un peurevitalisé, recentralisé et concentré en presque unseul endroit, mais avec une tendance au blocage qui accentua la démission dureste des institutions et la peur policière des délateurs souriants. « Commentvoulez-vous être ministre quand vous n'avez même pas le pouvoir de nommer oudémettre un directeur de wilaya !», s'exclama un ministre, qui prit soin degarder la bouche fermée, assis dans le ventre de sa mère.

Redevenu présidentiel, le Pouvoir oublia cependant sondevoir. Encore une autre explication: la tradition voulant qu'on présente auxprésidents toujours trois dossiers pour un seul poste pour lui laisser lapossibilité ludique du choix souverain, il se trouve que le Président oubliesouvent de le faire face à son premier cercle qui n'ose pas le lui rappeler, nousdit-on. « Vous êtes fou ? Personne n'ose lui dire quoi que ce soit et tout lemonde se contente d'encaisser lors des conseils des ministres ».

Du coup, le pays se trouve débordant d'intérimaires et depostes vacants dans les hauts postes de l'Etat. Il n'y a aucune lecturepolitique à faire sur le cas de Air Algérie, de la wilaya de Tarf, de la daïra d'Oran, etc. Il ne s'agit ni de luttes nide bras de fer mais d'un oubli monarchique entre deux méditations sur l'avenirdu cosmos. Quelqu'un ayant dû poser un cartable (ou des versions de laprochaine constitution) sur la pile de dossiers qui attendent la signature duPrésident, qui attend de refaire le monde en le regardant et de relancerl'Algérie en lui parlant de temps à autre. Et c'est tout. Homme d'une grandeintelligence, colérique, méprisant la faiblesse mais ayant besoin d'elle dansses parages, il paraît que Bouteflika a réussi àcréer un véritable cercle vide d'écrasés autour de sa personne, souffrant à lafois de ne fréquenter que des tapis mais ne pouvant souffrir de se heurter àdes hommes de caractère. C'est dire que même le Pouvoir qui écrase ce peuplesouffre lui-même d'être écrasé à certaines altitudes.

Question finale: qui écrase donc Bouteflika? Personne ne sait. Peut-être le poids des ans, l'avenir qui ne veut pas venir,l'amertume de se sentir plus grand que son propre pays ou le destinprésidentiel venu vingt ans en retard sur son propre programme. Personne nepeut savoir. Tout le monde s'écrase et attend.




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