Oran - Hassi Mefssoukh Centre (Commune Hassi Mefssoukh)


MEFESSOUR, RENAN puis HASSI MEFSOUKH

MEFESSOUR : « Colonie agricole de 1848 à 28 kilomètres d’ORAN, à 12 km d’ARZEW et à 4 km de SAINT-CLOUD.
Terres de bonne qualité ; eaux abondantes et saines que 24 puits et une noria distribuent sur tout le territoire. La
route rectifiée d’ORAN à MOSTAGANEM traversera ce centre ».

STATISTIQUES OFFICIELLES (1851) :
Constructions : 62 maisons bâties par l’Etat auxquelles les colons ont ajouté 5 hangars, 11 écuries, 2 étables, 65
gourbis, 24 puits et une noria.
Bétail distribué : 1 mulets, 45 bœufs, 15 truies.
Matériel Agricole distribué : 57 charrues, 29 herses, 57 pelles, 57 pioches, 57 bèches, 29 voitures bouvières, 171
objets divers.
Plantations : 1 690 arbres.
Concessions : 136 hectares – Défrichement : 170 hectares -
Cultures : 125 hectares en froment, 20 en orge, 12 hectares 40 ares cultures diverses. Total = 157 hectares (fin
citation DUVAL) ».
Occupé au 18e siècle par les BENI-MEFSOUKH, HASSI-MEFSOUKH est en 1846, d’après le Chef d’escadrons
d’ILLIERS « un puits que l’on dit assez abondant et dont les eaux sont potables ; les terrains avoisinants, surtout ceux
qui sont au Nord, couverts de broussailles, seraient propres à la culture des céréales s’ils étaient défrichés. Si le puits
était entretenu, des irrigations seraient possibles au moyen de norias ; d’autres puits pourraient être creusés. Nous
proposons d’y installer vingt familles ».

C’est par HASSI-MEFSOUKH que passeront les routes d’ORAN à ARZEW-le-port, de SAINT-CLOUD à SAINT-DENISDU-SIG et d’ORAN à MOSTAGANEM.
La même année, le Lieutenant-général de LAMORICIERE englobe le hameau de MEFSOUKH dans le territoire de la
commune de SAINT-CLOUD. La région est presque désertique et dépeuplée. Les populations qui avaient plus ou
moins servi les Espagnols en 1791, les BENI-AMER dans l’Ouest et les HAMYAN dans l’Est, furent décimées et
chassées de leurs territoires par leurs coreligionnaires voisins. La région était pratiquement vide d’habitants, de
là le nom de MEFSOUKH « Le diminué, le déchu ».
C’est là que seront installés, à la fin octobre 1848 une quarantaine de familles de Parisiens chassés de la capitale
par la Révolution.

Ce n’est qu’en 1893 que le conseil municipal de SAINT-CLOUD, où MEFSOUKH devenu MEFESSOUR était représenté
par son adjoint spécial BORDY Just et son conseiller municipal CHOQUET, émit l’avis de donner au village le nom
de RENANVILLE. En 1924 le Centre est érigé en commune de plein exercice. Il s’appelle désormais RENAN, pour
honorer l’historien, l’orientaliste et philosophe Ernest RENAN, de l’académie française.

Entre la montagne des lions, le Sahel d’ARZEW, la mer, la dépression lacustre des Salines d’ARZEW et la MACTA
s’étendait alors une morne plaine de 350 km2. Sur ce pauvre terroir, une importante croûte gréso-calcaire donne
un sol tantôt rocheux et très rocailleux, tantôt argilo-sableux. Les terres fortes de premier choix retiennent bien
l’eau. La région est couverte de buissons, lentisques, palmiers nains, genêts épineux. Le climat ne connaît pas
d’extrêmes grâce à la mer, mais il a tendance à la sécheresse.
77 colons sont arrivés de 1848 à 1852, mais 12 seulement obtiennent leur titre de concession définitive après
avoir défriché et mis en culture leurs lots (20 ares de jardin et 7 hectares de cultures). Il est vrai qu’ils ont à
vaincre bien des difficultés : le choléra en 1849, des travaux pénibles de défrichement sur des terres souvent
pierreuses couvertes de broussailles.
En 1854, 34 habitants meurent sur 56. Nous leur rendons hommage en rappelant, ici, leurs noms :

AEIZEL Marguerite épouse STINGLER (âgée de 42 ans native d’Alsace);
BENINGER Catherine (âgée de 37 ans native d’Alsace) ;
BENINGER Victor (âgé de 15ans natif d’Alsace);
BENINGER Henri (âgé de 2 ans natif d’Alsace);
BOUCHER François (âgé de 11 ans natif d’ARZEW);
BROSSIER J. Baptiste (Cultivateur âgé de 48 ans natif du Loiret);
EGENSCHWILLER Georges (âgé de 19 mois);
FELD Madeleine (âgée de 11ans native d’Alsace) ;
FISCHER Bernard (âgé de 17 ans natif d’Alsace);
FISCHER Louis (âgé de 5mois);
GEIS Madeleine épouse EGENSCHWILLER (âgée de 38ans née en Alsace) ;
GISSY Adam (Cultivateur âgé de 47 ans natif d’Alsace) ;
GRABY Marie (âgée de 18 jours) ;
GRABY Rose (âgée de 3ans) ;
HEILPRIEIGNER Elisabeth épouse SCHAFFNER (49ans native d’Alsace) ;
LANG Jean (Cultivateur âgé de 47ans natif d’Alsace) ;
LANG Joseph (âgé de 5 ans natif d’Alsace);
LANG Valentin (âgé de 8 ans natif d’Alsace) ;
MAÏ Barbe épouse PHILIPS (âgée de 42 ans native d’Alsace) ;
MALEZIEUX Adelaïde épouse CHAPUSOT, 43 ans native de Haute Marne ;
MARIENTALER épouse BENINGER Marie (âgée de 44 ans native d’Alsace);
MICHEL-VILLAZ Cydalise (âgée de 16 mois);
MICHETEL épouse ARNZ Elisabeth (43ans native d’Allemagne);
PHILIPS Jean (Cultivateur âgé de 58ans natif d’Alsace);
PHILIPS Caroline (âgée de 6ans native d’Alsace).
(Vve) REILING A. Marie (âgée de 66ans native d’Alsace);
RONDEAU Charles (âgé de 39ans natif Indre et Loire) ;
ROTH Catherine épouse STINGLER (âgée de 54 ans native d’Alsace);
SCHOTT Nicolas (âgé de 44ans natif d’Alsace);
SCHOTT J. Baptiste (âgé de 5 ans natif d’Alsace);
SCHOTT Pierre (âgé de 2ans).
SCHRECK Henri (bébé âgé de 4 jours décédé à l’hôpital militaire d’ARZEW) père cultivateur ;
WENDELING Catherine épouse DENNINGER (45ans native d’Alsace) ;
ZEILER Madeleine épouse HUTHER (âgée de 41 ans native d’Alsace);
Il y a également le paludisme et beaucoup d’enfants meurent aussi en bas-âge. Certains colons, pour vivre, doivent
vendre le bœuf que l’Etat leur a donné : ils sont endettés, devant payer le pauvre matériel prêté par l’armée. Ils
partent quelquefois se « louer » à ORAN ou MOSTAGANEM, comme cantonniers.

En 1853 le village n’a que deux puits d’eau potable, les routes sont impraticables et l’école est faite par la femme
d’un colon. Les maisons sont misérables : deux pièces au sol en terre battue, sans plafond. Les premières sont
faites par le Génie. La culture ne fait guère de progrès, l’eau faisant défaut, bien que 85% des jardins potagers
soient défrichés. La grande ressource est le charbon de bois provenant des défrichements.
De 1855 à 1858, opiniâtres et courageux, ceux qui survivent sont propriétaires définitifs. Ils ont défriché, mis en
valeur la terre, construit une étable, un hangar, écurie, porcherie, four. En 1861 il y a 45 colons dans le centre,
mais beaucoup sont dans la misère.
1874-1875 : Une vingtaine de colons nouveaux sont arrivés. Ce sont des Alsaciens et des Lorrains. Ils sont
affranchis d’impôts, mais doivent prouver qu’ils ont de quoi vivre pendant un an.
On ne peut évoquer sans amertume le sort de ces Alsaciens et de ces Lorrains. Pour rester Français, ils
abandonnèrent tout dans leurs provinces natales devenues allemandes. Pour rester Français, leurs petits-enfants,
oubliés de tous, même et surtout de leurs cousins restés sur les bords du Rhin, devront tout abandonner dans
cette province algérienne qu’ils contribuèrent à donner à la France.
Certains colons ont agrandi leurs biens en achetant ceux des malheureux qui, n’ayant pu réussir, ont décidé de
regagner leurs provinces d’origine. En 1883, seules trois familles peuvent se flatter de connaître quelque aisance,
les autres vivotent à la limite de la misère. Mais la terre, assez ingrate jusqu’alors, a besoin de bras. Des familles
espagnoles s’installent et donnent des ouvriers agricoles puis des métayers ou des commerçants. Comme dans les
autres villages de l’Oranie, on retrouvait leurs noms sur le monument aux Morts de la guerre 1914/1918.
Dans le village, Musulmans et Européens vivent en communauté. La bonne entente règne. Les Arabes parlent
français, leurs enfants vont à l’école. Certains arrivent de « l’intérieur » comme journaliers et se fixent à RENAN.
Les céréales s’étendent peu à peu mais les récoltes sont mauvaises. Les arbres ont du mal à venir car le vent
d’Ouest fait mourir les jeunes plants. On pratique des cultures d’essai, tabac ou coton, mais le manque d’eau les
rend difficiles.
Seule, la vigne ne déçoit pas. En 1849 on en plante 22 pieds. En 1855 elle couvre 19 ares d’un lot de jardin
(VIDAL). En 1859 la plantation continue, mais les colons sont encore pauvres et la vigne coûte cher. Elle donne des
vins excellents titrant 11 à 12 degrés, MAYET Auguste obtient la médaille d’honneur à l’exposition de Toulouse et
en 1889 DUBOUCHER Charles une médaille d’or à l’exposition universelle de Paris.
En 1884 le vignoble se développe soudain (à la suite de l’invasion du phylloxera en France). La vigne commence à
enrichir les petits propriétaires de RENAN dès 1894. Avec le succès de la vigne, l’aisance fait place au besoin. Des
fermes viticoles se créent en dehors du Centre : dans le quartier de TELAMINE, commune de SAINT-LEU : BORDY
en crée deux, MAYET trois, PASQUAL une, SESTIEU deux, d’à peu près 25 hectares chacune.
En 1897, le phylloxéra fait son apparition. Après trois ans de lutte on a recours aux plants américains que l’on
greffe.
En 1901, la vigne supplante définitivement les céréales.
En 1933 est construite la cave coopérative qui peut contenir 29 000 hectolitres de vin dans deux bâtiments
auxquels s’ajoute un troisième en 1952. Cette organisation moderne comporte : longuet, fouloir, pressoir continu,
cuves de fermentation, amphores, citernes et bacs à lie avec puits particuliers à 37 mètres de profondeur à débit
inépuisable, deux réfrigérants, pompes, matériel et éclairage électrique.

Cave et Château d’eau à RENAN
En 1928, le vignoble dépasse 1 000 hectares et atteint son maximum à 1 310 ha.
Monsieur BORDY Eugène, maire, est le président et l’animateur clairvoyant de l’œuvre qui s’ébauche. RENAN qui a
tant souffert de son manque d’eau peut être fier de son réseau complet d’adduction d’eau et de distribution de ce
précieux liquide. Il aura fallu de longues années pour parvenir à ce résultat et résoudre bien des difficultés. Un
château d’eau de 19 mètres de haut et de 300 m3 de capacité est mis en service. Plus récemment un poste de
javelisation d’eau vient compléter ces installations.
RENAN est favorisé par sa situation à un carrefour routier. Il y a loin de l’isolement des premières années. Le
village n’a eu longtemps qu’une chapelle de fortune. En 1925, l’église a été construite grâce à une collecte et les
cloches ont été offertes en 1952 par Madame Veuve René URSCH née MAYET Elisa.

En 1949, un stade omnisports a été édifié, entièrement clôturé, grâce aux dons des habitants, et permet la
pratique du tennis, basket-ball, volley-ball, football, etc… En même temps un demi-hectare de pins et d’eucalyptus,
des parterres de fleurs sont créés près du stade en faisant un coin de délassement.
Un foyer rural aux activités multiples prend naissance avec jeux, cinéma, causeries, activités théâtrales.
En 1952, une école moderne et spacieuse est construite.
Rien n’a été négligé pour que cette population aux goûts simples se plaise dans son village. Les maisons se sont
construites simples et robustes. Il n’y a pas ici d’extériorisation de la richesse née du vignoble, pas de vie
extérieure tapageuse.
Que diraient les pionniers s’ils revoyaient RENAN en 1960, coquet, soigné, prospère, habité par une humanité
nouvelle unissant les Français de toutes origines (depuis les descendants des Parisiens de 1848 aux enfants du
Levant espagnol en passant par les fils des Alsaciens désespérés de 1870), aux Musulmans. En cent ans, dans ce
pays livré aux moustiques, aux chacals et aux ronces, est né un monde nouveau où règne le bonheur de vivre.
Grâce au courage et aux sacrifices des pionniers, au labeur et à l’initiative de leurs descendants, la France pouvait
s’enorgueillir d’une réussite à nulle autre pareille. Pas de sous-sol, pas de mines d’or, pas de pétrole, pas d’argent,
mais du travail, rien que du travail. RENAN était un témoignage parmi tant d’autres (Fin citation Echo d’Oran).




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