Le métier de forgeron s'est éteint ou presque ; il a été créé environ 5.000 ans avant J.-C. quand les peuples avaient besoin des objets fabriqués en métal, tels les outils de jardinage, les armes et autres.
Le dernier forgeron de la région, selon toute vraisemblance, est ammi Medkouk Ahmed, un homme résistant, un artisan professionnel que nous avons rencontré dans sa forge, en ce jour de marché hebdomadaire (lundi) ; quoique pris par certains paysans, il a bien voulu nous accorder un moment de son précieux temps.
Ammi Ahmed est né en 1924 à Aïn- Sefra, il forge encore à la main. Ni le marteau ni la chaleur du four ne l'ont fatigué, il continue à se faire plaisir dans son métier, et à faire plaisir à une clientèle, même si aujourd'hui tout est disponible dans les marchés, à des prix parfois dérisoires.
La forge est une sorte d'étuve, un gourbi noirci de fumée, toit en planche de palmier, située en plein centre-ville, dépourvue de commodités et de conditions de sécurité, équipée d'un matériel très ancien : une enclume, une massue, un vieux four fonctionnant avec du charbon, une vieille table en acier sur laquelle est accroché un étau, quelques tiges et piquets en ferraille dispersés çà et là : «Tout ce que vous voyez ici date de plus de 70 ans», nous dira ammi Ahmed, qui poursuit : «Certes un métier en voie d'extinction, mais je continue à le pratiquer encore, jusqu'à ma mort... C'est l'amour du métier, et c'est le testament de mon défunt père.»
Très pessimiste, il regrette qu'aucun de ses fils ne veut reprendre le flambeau. car dira-t-il, «personne en ce moment ne peut travailler dans des conditions pareilles, ni matériel neuf ni local aménagé.
Personnellement, je me contente de ma pension de moudjahid, et le reste, c'est l'amour de mon métier, même s'il ne me rapporte rien du tout, je continuerai à l'exercer, je finirai mes jours entre le marteau et l'enclume».
Octogénaire, ammi Ahmed a servi la révolution avec son défunt père, il a été détenu dans les prisons, à plusieurs reprises, il faisait partie des détenus dans le camp de torture de la Dzira, il nous dira à cet effet que la forge était aussi un abri pour les moudjahidine.
«... C'était un point de rencontre, un point de transit, un bureau de renseignements pour les moudjahidine, qui faisaient semblant de venir chez nous pour des outils, ils s’échangeaient des idées, des messages... Ce petit gourbi me fait rappeler beaucoup de choses ; d'ailleurs, c'est ici que mon défunt père ferrait le cheval personnel d'Isabelle Eberhard.»
Ammi Medkouk Ahmed aime son métier, aime encore le forgeage, il conclut : «Le jour où vous verrez le four froid, sachez que je me suis éteint.»
Photo ci-dessus: Illustrative de l'article seulement / Akar Qacentina.
B. Henine
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Posté Le : 15/02/2012
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Ecrit par : B. Henine
Source : LeSoirdAlgerie.com du mercredi 15 février 2012