Algérie

Médéa : Une sommation, des coups de feu et un mort



«La réponse suspecte à notre sommation de s'arrêter à travers l'ouverture brusque de son cabas et une tentative de vouloir en retirer quelque chose, nous avait amenés, mon collègue et mois, à faire usage de nos armes de poing. Et le suspect de s'écrouler. C'est tout ce dont je me souviens, Monsieur le président».

Ainsi s'est exprimé, au tout début de son interrogatoire par le président du tribunal criminel, le dénommé Mohamed B. agent de police à la date des faits, qui ont eu lieu le 24 juillet 1994 à Ksar El-Boukhari, chef-lieu de daïra situé à 64 km au sud de Médéa. Révoqué depuis cette date, Mohamed B. est aujourd'hui marié et père de cinq enfants. En liberté provisoire, depuis et jusqu'à le jour de sa comparution devant le tribunal criminel près la cour de justice de Médéa, après cassation du premier jugement rendu le 23 novembre 2005 et qui l'avait condamné à deux années de prison avec sursis. Une condamnation pour le chef d'inculpation d'homicide volontaire sur la personne du dénommé Miloud R., alors âgé de 36 ans.

Et quatorze années après ce malheureux drame, le flou persiste encore renforcé qu'il est par l'absence du deuxième acteur de ce drame, agent de police à l'époque des faits, qui avait été condamné à vingt ans de prison ferme par contumace et toujours en état de fuite. Pour résumer l'arrêt de renvoi qui avait été dressé par la Chambre d'accusations près le tribunal de Ksar El-Boukhari, le dénommé Mohamed B. accusé dans cette affaire, agent de police à la Sûreté de wilaya de Ghardaïa, avait été envoyé en mission spéciale, avec d'autres collègues, dans la ville de Ksar El-Boukhari. A la même époque, le mois de juillet 1994, la victime Miloud R. était en période de congé. Une patrouille de police en plein centre-ville de Ksar El-Boukhari, une sommation, des coups de feu et ce fut le drame. Une période trouble des événements douloureux de la décennie noire.

Après avoir essayé tant bien que mal, de rappeler les circonstances des faits et du drame qui s'en suivit, Mohamed B. dira au tribunal : «Le comportement suspect du défunt, que Dieu ait son âme, nous avait fait réagir, mon collègue et moi-même, en état de légitime défense». Appelés à la barre, le père, l'épouse et le fils aîné de la victime n'apporteront rien de nouveau et demanderont simplement qu'ils en soient dédommagés. Leur avocat ira dans le même sens en ajoutant : «Même si l'intention de tuer existait, notre compréhension est grande». Ce qui ne sera pas de l'avis du représentant du ministère public dont le sévère réquisitoire débouchera sur la demande de la plus extrême des peines : «L'accusé et son collègue avaient voulu arrêter la victime sans avoir décliné leur qualité de policiers. De plus, ils auraient pu viser les jambes mais pas la partie supérieure du corps et plus précisément le cou et le visage. Les chargeurs des deux armes, des pistolets Béretta, avaient été vidés. Les faits de l'acte volontaire sont établis».

Ce que tenteront de contredire les deux avocats de la défense en plaidant pour «la requalification de l'accusation d'homicide volontaire en celle d'homicide involontaire avec le bénéfice des plus larges circonstances atténuantes. Un acquittement pur et simple qui permettrait de mettre un terme définitif à quatorze années de souffrance morale pour notre mandant qui pourrait peut-être retrouver son travail. Nous avons entière confiance en cet honorable tribunal». Un appel qui sera entendu par le tribunal criminel près la cour de justice de Médéa, qui requalifie l'accusation en homicide involontaire et fait bénéficier l'accusé Mohamed B. des circonstances atténuantes en le condamnant à quatre mois de prison avec sursis et au versement d'une amende de deux millions de centimes. Quant aux parents du défunt Miloud R., ils recevront chacun 30 millions de centimes à titre de dommages et intérêts. Et pour ce même motif, l'épouse du défunt et ses cinq enfants recevront quinze millions de centimes chacun.






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