Sur les douze mois que compte l'année, il n'a pas son pareil de par ses odeurs et ses couleurs bien particulières, ses dépenses «exagérées», les «accrochages» aussi bien verbaux que physiques entre nombre d'individus, les mosquées qui ne désemplissent pas, les veillées...
En un mot, de par l'ambiance toute particulière qui le caractérise, c'est le mois de Ramadhan.
Et c'est dans une ambiance toujours aussi intense, qui s'amplifie d'année en année, que ce mois sacré est vécu dans la ville de Médéa des saints Sidi Sahraoui et Sidi El-Berkani. Une ambiance que seul le mois de Ramadhan est capable de créer. Et la première semaine, qui vient de s'écouler, de ce mois sacré le confirme. En effet, dès 10h00, la ville se réveille quoique timidement, commerces et étals informels rivalisent d'ingéniosité pour trouver la meilleure façon et la technique la plus adroite pour attirer le plus de clientèle possible. Cette dernière trouvant ainsi, concurrence oblige, ajoutée à la grande disponibilité de pratiquement tout, ce dont elle a besoin durant ce mois sacré, et notamment les fruits et légumes dont les prix sont abordables, excepté la salade et les dattes qui sont cédées respectivement entre 80 et 100 dinars et entre 250 et plus de 320 dinars le kilo. La coriandre et le persil l'étant, quant à eux, à 20 dinars contre 5 dinars à la veille de Ramadhan.
Ainsi, dès la sortie des bureaux à 16h00 passées, en plus de milliers d'autres personnes que sont les sans-emploi, la ville se réveille «véritablement» et la «tension» créée par le vide de l'estomac et ses envies ramadhanesques devient de plus en plus forte, les narines étant pour beaucoup dans cette sorte d'étrange hypnose qui attire le regard des yeux sur n'importe quoi apte à satisfaire la bedaine. Les deux marchés de la ville, lesquels, pour rappel, ont été désertés depuis longtemps par les propriétaires des étals, complètement en ce qui concerne le marché supérieur et à moitié pour celui inférieur, et ce pour les raisons qu'ils sont remplacés par les rues et ruelles avoisinantes, retrouvent une autre vie, d'autres couleurs et d'autres odeurs. Des lieux qui se transforment en véritable ruche humaine. Il devient alors extrêmement difficile de faire ses achats, le moindre petit espace étant squatté rendant ainsi la circulation piétonnière difficile. Une situation à laquelle s'accommode, et presque sans gêne, cette véritable marée humaine en quête du meilleur produit alimentaire.
Quelque temps plus tard, aux environs de 17h30, les psalmodies du Coran diffusées par les haut-parleurs du majestueux «Mesdjed Ennour», situé à la place du 1er Novembre (ex-place de la République du temps de la colonisation) que les vieux Médéens continuent d'appeler «Placet El-Fougania», annoncent l'imminence d'el-iftar. Et c'est la véritable ruée vers tout local, quel que soit le lieu et quels que soient ceux qui y travaillent, vendant cette «chère» zalabia ! Une «Placet El-Fougania», si jolie et si accueillante autrefois, qui est devenue, hélas, le lieu privilégié de ces charlatans qui se prennent pour des guérisseurs de toutes sortes de maladies en n'ayant aucune honte à exploiter la crédulité d'une certaine catégorie de personnes. Un problème qui mériterait d'être pris en charge par les autorités concernées. Tout comme cette étrange prolifération de mendiantes, beaucoup plus que de mendiants, en ce mois sacré de Ramadhan, qui vous agressent presque en vous montrant le ou les bébés qu'elles utilisent comme moyen de persuasion.
Cette place du 1er Novembre étant également devenue le rendez-vous d'une multitude de revendeurs occasionnels de fournitures scolaires. Des revendeurs ayant carrément squatté la partie inférieure de cette place ainsi que les rues et ruelles sans oublier les trottoirs avoisinants. Des fournitures scolaires, à commencer par le cahier et le stylo qui constituent le symbole de la culture et du savoir, qui sont exposées et vendues à même le sol et parfois côtoyant des regards d'égouts. Des véritables «librairies ambulantes» qui ont accaparé la voie publique, sans aucune gêne et sans être inquiétées par qui que ce soit. Qui aurait prédit, il n'y a pas longtemps, un tel spectacle à l'approche de la rentrée scolaire dont les jeunes écoliers et lycéens ne sentaient «l'odeur» qu'à l'intérieur d'une librairie au sens propre du terme ? Et à nos remarques relatives à cette malheureuse situation, certains de ces revendeurs occasionnels nous ont répondu, avec le sourire toutefois: «A chaque époque ses propres moeurs» ou encore «il faut bien que nous gagnions notre pain».
Il est 18h30, la ville commence alors à se vider et, à l'appel du muezzin, elle sombre, comme par enchantement, dans le monde du silence plus d'une demi-heure durant. Les ventres soulagés et les narines satisfaites, débutent alors les longues veillées à commencer par la prière des «taraouih» pour se terminer avec les soirées quotidiennement programmées à la maison de la culture Hacène El-Hassani, en passant par les promenades et les interminables parties de pétanque le long du boulevard du siège de la wilaya, les parties de dominos et de dames dans les cafés ou dans des coins «aménagés» dans les quartiers... La seule fausse note, dans ce tableau de l'ambiance ramadhanesque de cette année, est le délaissement de cette bonne vieille habitude des visites familiales qui renforçaient les liens tout autant que ceux qui existaient entre les voisins. Et c'est bien dommage !
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Posté Le : 09/09/2008
Posté par : sofiane
Ecrit par : Rabah Benaouda
Source : www.lequotidien-oran.com