Algérie

Manque de main-d’œuvre dans l’agriculture à Tizi Ouzou: Les jeunes se détournent du travail de la terre



Manque de main-d’œuvre dans l’agriculture à Tizi Ouzou: Les jeunes se détournent du travail de la terre




Le secteur de l’agriculture souffre ces dernières années d’un manque criant de main-d’œuvre qualifiée, mettant les agriculteurs dans la difficulté.

La sonnette d’alarme a été tirée depuis longtemps par les paysans, mais il a fallu attendre le mois de septembre 2012 pour voir le secteur de la formation professionnelle introduire des formations touchant le secteur de l’agriculture.

Dans la wilaya de Tizi Ouzou, la direction de la formation professionnelle a introduit trois formations dans son programme ; arboriculture, pépiniériste et petits élevages.

Ces formations introduites en septembre ont été reconduites à l’occasion de la session de février 2013.

Mais cette mesure, intéressante soit-dit en passant, n’a pas réussi à enthousiasmer les agriculteurs qui se plaignent du manque de main-d’œuvre dans leur secteur. Et pour cause, les stagiaires qui sortiront de ces promotions ne seront pas attirés par une carrière professionnelle en tant qu’employés dans l’agriculture. Les agriculteurs de la wilaya de Tizi Ouzou en sont convaincus.

«Ils seront rares les jeunes stagiaires qui accepteront après leur formation de travailler pour des agriculteurs. Ils préfèrent lancer leurs activités eux-mêmes», affirme à La Tribune un agriculteur de la région de Freha qui pense que le maximum que ces jeunes puissent faire, c’est d’accepter le travail pendant une courte période pour acquérir de l’expérience, avant d’abandonner les agriculteurs.

En d’autres termes, ils seront à la recherche d’une forme de stage pratique qui ne dit pas son nom et qui leur permettrait d’avoir une bonne expérience en vue de lancer leurs propres affaires.

Cet avis est partagé par un jeune agriculteur du sud de la wilaya qui dit «connaître la mentalité des jeunes d’aujourd’hui».

Pour lui, ces jeunes ne peuvent pas accepter un statut d’ouvrier dans l’agriculture pendant toute leur vie parce qu’ils ont une idée «primitive» de l’agriculture et croient qu’ils sont capables de prendre en charge eux-mêmes leurs propres surfaces agricoles.

D’ailleurs, pour notre interlocuteur, les futurs diplômés en agriculture de la formation professionnelle vont en majorité s’occuper des terres agricoles de leurs familles respectives (quelles que soit leurs superficies) ou monnayer leurs diplômes en s’associant avec des propriétaires de terres.

Cette perspective est appréhendée par les agriculteurs interrogés qui se disent certains que la formation offerte par le secteur de la formation professionnelle au profit de l’agriculture ne réglera pas le problème de main-d’œuvre que vivent les agriculteurs de la wilaya.

Ils considèrent également que le chemin que prendront les jeunes futurs diplômés s’acheminera vers une désillusion dont pâtiront les agriculteurs, d’autant plus que la wilaya n’est pas propice pour toutes les activités agricoles et que certaines activités nécessitent de gros investissements pour assurer leur pérennité.

L’exemple des poulaillers dans la wilaya de Tizi Ouzou est édifiant de ce point de vue, notamment avec certains jeunes promoteurs qui se sont lancés dans l’activité grâce au dispositif de l’Agence national de soutien à l’emploi de jeunes (Ansej).

Certains d’entre eux se sont rendu compte qu’un poulailler nécessitait de gros moyens susceptibles de protéger leur volaille, particulièrement des grandes chaleurs en vigueur en été dans cette wilaya. Qu’il ne s’agissait pas d’avoir un espace couvert de quelques centaines de mètres carré et y abriter des milliers de poules et de poussins pour faire un poulailler et réussir son activité.

La chaleur et les incendies ont eu raison de dizaines de milliers de têtes dans différentes localités de la wilaya, en raison de l’absence d’humidificateurs et autres panneaux sandwich (isolants à placer sur les toits des poulaillers) capables de protéger la volaille.

Et dire que c’est la multiplication de ces petits poulaillers qui a mis dans la difficulté les grands aviculteurs de la wilaya.

L’exemple de la filière avicole peut être appliqué sur toutes les filières du secteur de l’agriculture où une formation de quelques mois ne peut remplacer une expérience de plusieurs années, voire des décennies.

Mais certains agriculteurs interrogés reconnaissent que si le problème de main-d’œuvre se pose avec acuité, c’est qu’ils ne font pas de grands efforts en matière de rémunérations en faveur de leurs ouvriers, d’autant plus que le travail de la terre est toujours aussi pénible même si la modernisation a facilité certains de ses aspects.

«Nous payons mal nos ouvriers, c’est vrai, mais c’est la situation du secteur et du marché qui en découle qui n’aide pas les agriculteurs», indique un agriculteur qui considère qu’une augmentation de salaires au profit des ouvriers agricoles «menacerait leur activité déjà parasitée par des spéculateurs qui mettent dans la difficulté non seulement les agriculteurs mais aussi les citoyens consommateurs».


Malik Boumati



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