Algérie

Malouf Constantinois Salim Fergani : tel père, tel fils !



Malouf Constantinois Salim Fergani : tel père, tel fils !
Publié le 28.11.2023 dans le Quotidien Le Soir d’Algérie

De ces voix lumineuses qui surgissent des quartiers brumeux surplombant le grand vide des précipices, et qui emplissent langoureusement l'air du Vieux Rocher, Salim Fergani se taille une part de lion. Cette notoriété n'est pas seulement due à une filiation de marque mais reste le propre d'un long parcours de cinquante-cinq années qui lui ont permis de se forger une personnalité à part dans le riche répertoire du malouf. Après Righi et Aouabdia, voici le troisième portrait d'un maître dont personne ne peut contester la valeur et les compétences dans cet art difficile qui ne mourra jamais tant que les enfants de Cirta le porteront haut et avec fierté.
Salim Fergani est un nom qui représente la continuité d'un malouf typiquement constantinois, dans la tradition d'un art prestigieux porté par les grands maîtres dont son père, feu Mohamed Tahar Fergani. Et ce n'est pas le premier venu puisqu'il a commencé très tôt à suivre cette voie pour se forger une solide réputation. Aujourd'hui, à 70 ans, Salim Fergani possède un long répertoire derrière lui. Le malouf a toujours fait partie de la famille Fergani, il est donc tout à fait naturel que Salim soit l'héritier d'une lignée de musiciens remontant à la fin du XIXe siècle, dont la dernière figure de légende fut Mohamed Tahar Fergani.
Inspiré par la passion que son père vouait à cette musique ancestrale, dans une ville qui porte également son empreinte, Salim Fergani se démarque par sa discrétion et son dédain du tapage médiatique. Il a suivi pas à pas les traces de son père en cherchant toujours à apprendre davantage et à enrichir son expérience en se produisant régulièrement dans l'orchestre phare de la ville. Cette longue pratique lui permet de maîtriser le luth (oûd-arbi) qu'il joue à la perfection.

Un livre pour retracer un parcours lumineux

Après avoir terminé ses études, il passe à une autre étape et vole de ses propres ailes pour prouver sur scène de quoi il est capable. Sa carrière débute dès 1968, alors qu'il n'avait que quinze ans. Après avoir enregistré de nombreux albums en concert, il réussit à s'exporter dans les années 1980, faisant ainsi connaître le malouf à l'international tout en préservant son authenticité.
De Paris à Rome, en passant par Moscou, Montréal, l'Asie centrale, ainsi que de nombreuses capitales du Maghreb et du Moyen-Orient, Salim Fergani a été marqué par sa participation aux Journées de l'Algérie à New York en mai 2018. Il a animé un concert au siège de l'ONU et à la mairie de Brooklyn, un événement qui restera gravé à jamais dans sa mémoire, lui permettant de faire connaître avec fierté un aspect important de l'art algérien.
Salim Fergani se produit désormais aux opéras d'Alger, de Montpellier et de Lyon (France), où sa voix exceptionnelle et son talent reconnu réussissent à émouvoir des milliers d'âmes sensibles à ce genre musical de plus en plus connu et apprécié à l'international.
Inspiré des traditions andalouses, le malouf a subi toutes sortes d'influences puisées dans des cultures et des sonorités authentiques surgies d'une riche civilisation arabo-berbéro-musulmane. Salim Fergani affirme que ces événements historiques et exceptionnels ont une importance particulière pour lui et lui permettent d'enrichir davantage le livre qu'il compte éditer à la fin de l'année 2024 et qui retracera son parcours lumineux.

Une anthologie du malouf
en 40 disques

Cinquante-cinq ans après ses débuts, Salim Fergani continue de faire rayonner avec élégance le malouf aux quatre coins de la planète, toujours soucieux d'y apporter sa touche personnelle. Il s'efforce continuellement d'innover tout en préservant ce patrimoine, comme en témoigne son dernier projet réalisé en collaboration avec Fayçal Belkhalfat, musicien et chercheur en musique de la Maison d'enregistrement de Tlemcen.
Malgré les difficultés rencontrées pendant plus d'un mois, ils ont réussi à réaliser l'anthologie du malouf en quarante disques, qui englobe une grande partie de ce répertoire, ainsi que l'édition de deux recueils de poèmes traduits en français, en anglais et en espagnol, le tout réalisé sous l'égide du ministère de la Culture.
Salim Fergani s'intéresse également à la douzième Nouba illustrée par la chanson principale «El Ghrib». Un tel projet a mobilisé l’artiste qui veut éviter la moindre faille, comme il le rappelle lui-même. Toujours humble et fidèle à lui-même, il se réjouit de la décision récente du président de la République de réhabiliter officiellement les artistes algériens en leur offrant un statut juridique. Cette décision, tant attendue, prend une place toute particulière dans le cœur de Salim Fergani. Au nom de toute la corporation artistique, il exprime ses sincères remerciements au président.
Enfin, Salim Fergani évoque le récent retour du festival du malouf à Constantine, qu'il attribue au mérite du commissaire de la manifestation, Lyes Benbakir. L'histoire du malouf continue de s'écrire...

Abdelhak Mebarki



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