Algérie

Malika Chitour Daoudi. Romancière : «Mon roman parle d’âmes qui se lient et d’empathie…»



Malika Chitour Daoudi. Romancière : «Mon roman parle d’âmes qui se lient et d’empathie…»
L’auteure Malika Chitour Daoudi signant son livre à la librairie du Tiers-Monde, à Alger (photo : el watan )


Vous venez de publier un roman La Kafrado aux éditions Casbah. C’est votre premier roman. Et il ne passe pas inaperçu. Un souffle littéraire…
J’ai toujours aimé écrire. J’ai toujours eu cette facilité. Je pensais que j’étais dans les normes. Disons que j’étais dans une bonne moyenne. Cette idée de commettre un livre m’a toujours accompagnée. Je l’ai commencé à plusieurs reprises. Mais j’étais consciente que je ne détenais pas l’histoire. J’ai entamé deux ou trois esquisses. Tant que moi, je n’accrochais pas, donc, les autres non plus.

Le détail, l’intrigue…
J’avais un certain critère de lecture. Donc, il serait le même pour ceux qui pourraient me lire. Et il y a 20 ans, une dame m’avait parlé de son aïeul qui avait jeté une poignée de sel en quittant son pays, l’Italie. Juste cela. Et là, je tenais l’histoire.

Le déclic…
Après ça, j’ai développé… J’ai donné libre cours à l’histoire. Et puis, cela partait tout seul.

Un souffle littéraire…
Dès que j’ai recommencé, ça prenait vie. Et les personnages, eux-mêmes, nous racontaient leurs histoires.

Votre livre La Kafrado, intervient avec l’émergence d’une tendance lourde. Celle du roman historique…
Je ne l’ai pas fait selon la tendance. Pas du tout. Je vous l’ai dit. Le livre date depuis 20 ans. Par contre, cela s’est imposé, forcément, c’était l’air du temps, c’est «le vivre-ensemble». Et puis, l’empathie. Et ça, c’est moi. La compassion, la philanthropie…

Cela transparaît dans votre roman…
Voilà…

La Kafrado est roman historique pas du tout manichéen et stéréotypé… L’héroïne est Italienne, débarquant dans une Algérie sous occupation française, en 1862, naïvement, sans idées préconçues…Ce n’est pas une colonne…
Non, il n’est pas manichéen. Colonne… elle l’est, malgré elle. D’ailleurs, quand elle se dispute avec son ami (algérien, Kader), il la traitera, de «colonne». Et cela, la choque. C’est comme une gifle magistrale. Elle le dit : «Il m’assène des gifles avec ces (ses) mots…» Donc, ce n’est pas blanc ou noir. Il existe beaucoup de faux-semblants. Il y a des gens qui paraissent bien, alors que non. Et rappeler à un colon ce qu’il est…dans son rôle de colons méchant…C’est comme dire que tous les migrants africains étaient de la «racaille». Alors que non. Tous ne le sont pas évidemment.

L’héroïne de Kafrado, l’Italienne Francesca, adopte une sœur Noire, Dorato. Un sacrilège, en 1862…
On a pas besoin de lien du sang. Ce sont deux âmes qui se lient. De tout temps les gens se sont unis autour de leurs affinités. Les liens du sang sont là pour des considérations bassement matérielles. Il me semble. Les questions d’héritage, etc. Sinon, on peut se reconnaître dans une personne très éloignée de notre personne, éducation, culture, vie…

Francesca débarque à Alger en terrain hostile, colonial, foncièrement masculin. Mais elle est adoptée, à son tour, par les Algériens. Elle ne ressemble pas aux autres, elle n’est pas Française. C’est une Italienne. Ce n’est pas une colonne…
En débarquant au port d’Alger, Francesca est considérée comme «bout de femme» par les hommes qu’elle traite de loups (car la reluquant). Les Algériens l’adoptent. Elle n’est pas comme les autres. Ils ont réussi à la juger. Parce que déjà, au départ, elle prend partie pour une fille, des leurs, une Algérienne qui était opprimée. Une jeune fille a été violentée, agressée, il faillait la défendre, point. Cette acte de bravoure de Francesca, les avaient surpris. Les Algériens étaient colonisés. Elle ne fait pas partie des oppresseurs. Elle est très naïve. Elle est jeune…

Une aventurière…
Oui, aventurière. Il fallait qu’elle sauve sa vie. Elle a pris une décision. Il fallait tirer un trait. Et réaliser les rêves des parents. Avec ces ceps de vignes. Une allusion aux pieds-noirs. Un clin d’œil. Les pieds de vigne.

Kader, le résistant algérien contre colonisateur, est considéré comme un ami, un frère pour Francesca. Mais à un moment, une ambiguïté s’immisce.

Peut- être…
Peut-être, oui (rire). Parce que cela c’est le désir du lecteur. Le lecteur est romantique. Il se dit : tiens, elle est bien, lui aussi. Ils vont bien ensemble. Cela pourrait marcher entre eux. Ils pourraient avoir une histoire qui ne serait pas qu’amicale.

Francesca fuit ses démons la poursuivant depuis l’Italie…
Elle fuit un passé, une idylle tumultueuse, Angelo qu’elle aime. Elle ne peut pas lutter. Et lui, non plus. Mais il l’aime mal. Il est épris d’elle à sa façon à lui. Il veut la garder. Mais si son désir d’elle dépasse sa violence, il doit faire des choix.

Il y a un référent portant sur l’Emir Abdelkader…
Oui, avec la vision européenne de Francesca. Ce côté historique et glorieux de l’Algérie. En ce temps, elle, c’était un prince qui a beaucoup fait pour les chrétiens.

Un auteur a toujours un livre dans la tête…
Oui, il y a la suite. Ce sera plus grand. Plus dense, on va dire. L’urgence du premier étant passée, là, je vais me lâcher. Je vais me faire beaucoup plus confiance.




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