Elle fut une des premières villes du nord du Mali attaquée mi-janvier par
les rebelles touareg qui en ont pris le contrôle deux semaines plus tard. Aujourd'hui,
Ménaka, localité de 10.000 habitants près de la
frontière nigérienne, est devenue une ville fantôme. «Nous ne sommes même plus 800
habitants, Ménaka manque de tout, la ville est triste,
tout le monde l'a quittée», se lamente Mamoud Al
Hassan, un élu local. Le seul enseignant resté sur place, qui préfère garder
l'anonymat, affirme que quand les habitants ont quitté la ville abandonnée par
les soldats maliens début février, des «gens» des alentours non formellement
identifiés sont venus «voler tout ce qu'ils pouvaient». Trois pharmacies et le
dépôt de médicaments du dispensaire de Ménaka ont été
pillés ou ont fermé pour ne pas être vandalisés, une vingtaine de véhicules de
l'administration et d'ONG volés, un opérateur de téléphonie mobile a été
dépouillé de ses panneaux solaires et de sa carte mémoire. Les services publics
ont aussi été «visités»; tables, chaises, ordinateurs, ampoules, rames de
papiers ont été emportés, a constaté un journaliste de l'AFP.
A l'ouest de Ménaka, l'un des plus importants
centres d'expérimentation agricole du nord du Mali, travaillant sur des
croisements de races bovines pour accroître la production en lait, est
méconnaissable: portes arrachées, mobilier de bureau emporté, «même l'aliment
pour bétail a été volé», confie le gardien. Il explique qu'une nuit, deux
hommes cagoulés sont arrivés sur les lieux en voiture, précédés d'une charrette
tractée par un âne, pour charger tout ce qui pouvait l'être. Plus une seule
goutte de gasoil n'est disponible à Ménaka désormais
plongée dans le noir, le groupe électrogène qui fournissait l'électricité ne
pouvant plus fonctionner. Le système d'adduction d'eau est défectueux, obligeant
les populations à parcourir plusieurs kilomètres pour s'approvisionner.
Un miraculeux camion chargé de vivres venu d'Algérie est revenu donner
espoir aux rares civils restés sur place. D'un seul coup, le marché s'anime, hommes
et femmes viennent s'approvisionner en dattes, pâtes, huile, fruits, viande
séchée. Un véhicule non immatriculé se gare. Trois hommes armés sautent à terre,
des rebelles touareg venus eux aussi se ravitailler. Ils
ne desserrent pas les dents, choisissent ce dont ils ont besoin, paient en
liquide, repartent. Ils ne se sont pas installés dans la localité même, mais à
trois kilomètres, dans une forêt du nom de Tabamgout.
Interdiction formelle aux étrangers ou aux civils et, «pour le moment, même aux
journalistes», de se rendre dans cette «base» rebelle. Ils font la navette pour
se ravitailler.
«Comme vous le voyez, nous ne nous sommes pas installés en ville. Nous
sommes militaires, non préfet ou maire. Nous laissons les civils en paix», explique
à l'AFP Moussa Salam, un des rebelles, qui affirme: «Nous ne sommes pas venus
faire du mal». «Comment on va faire dans quelques semaines quand tout ce
ravitaillement sera épuisé?», s'interroge Mamoud, gardien
de l'hôtel où un Français, Pierre Camatte, avait été
enlevé en novembre 2009 par Al-Qaïda au Maghreb
islamique (Aqmi), avant d'être libéré quelques mois
plus tard. Tinka, conseiller municipal, explique que,
récemment, le maire est revenu à Ménaka pour tenter
de rassurer les habitants restés en ville et inciter au retour ceux qui ont fui.
Mais, dit-il, «il faut que l'Etat et d'autres élus continuent le travail de
sensibilisation, sinon, les gens ne vont jamais revenir». Et un des habitants, mécanicien
au chômage forcé, ajoute: «Si on ne veut pas effacer Ménaka
de la carte, il faut faire quelque chose.»
Depuis le 17 janvier, le Mali est confronté à des attaques de rebelles touareg contre plusieurs localités et positions de
l'armée dans sa partie Nord. Plus de 172.000 personnes ont fui les combats pour
se réfugier dans les pays voisins, Mauritanie, Burkina Faso au Niger ou dans
des campements de déplacés en territoire malien.
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Posté Le : 10/03/2012
Posté par : sofiane
Ecrit par : Serge Daniel De L'afp
Source : www.lequotidien-oran.com