Les sept diplomates algériens, enlevés jeudi à Gao, auraient été libérés
par leurs ravisseurs. La nouvelle donnée, hier après-midi, par notre confrère
El Watan n'était pas encore officielle au moment de la rédaction de cet
article. Elle était accueillie avec prudence et espérance.
Rien, en tout cas, ne préfigurait une issue heureuse aussi rapide après
que le Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao), une
dissidence mauritano-malienne d'Aqmi, eut revendiqué leur enlèvement et annoncé
qu'il allait formuler des revendications. C'est une personne se présentant
comme «Adnan Abu Walid Sahraoui», porte-parole du Mujao, qui a annoncé, par
téléphone à l'agence AFP, cette revendication. «C'est nous qui avons organisé
l'enlèvement. Ils (les otages) sont avec nous. Nous allons après donner nos
revendications». Le Mujao s'est signalé par l'enlèvement, en décembre 2011,
dans un camp sahraoui à Tindouf, de trois coopérants humanitaires européens,
deux Espagnols et une Italienne. Il réclame 30 millions d'euros pour la
libération de ces trois otages. C'est le même groupe qui a commis, en mars
dernier, un attentat contre la brigade de gendarmerie de Tamanrasset faisant 23
blessés. Le Mujao est constitué de Maliens et de Mauritaniens qui, apparemment,
ne supportent pas la domination des Algériens d'Aqmi. Sur le terrain, au nord
du Mali, différentes sources d'informations confirment que les groupes
djihadistes supplantent le MNLA et tentent de travailler la population. Ils
imposent, en tout cas, leur ordre en interdisant l'alcool et s'en prenant aux
débits de boissons.
RISQUE D'AFFRONTEMENT MNLA-DJIHADISTE
Pour le MNLA qui a proclamé une indépendance, rejetée au niveau
international, cette prédominance des groupes islamistes liés à Ançar Eddine
est source de grand inconfort politique. Certains observateurs s'attendent à ce
que des affrontements surviennent tôt ou tard entre ces groupes qui avaient
profité de concert du coup d'Etat pour mettre en débandade l'armée malienne. Il
reste qu'au «finish», les «laïcs» du MNLA ont été largement débordés par les
islamistes. Les éléments du MNLA qui assuraient la protection du consulat
algérien à Gao ont cédé devant la menace des islamistes. Certaines informations
faisaient état d'une mise en alerte de 3.000 soldats des unités spéciales de
l'ANP dont une spécialisée dans la libération des otages. Aucune confirmation
officielle, mais cette mise en état d'alerte est plus que probable au vu de la
situation au nord du Mali et de l'enlèvement des diplomates. La gravité de la
situation a d'ailleurs été soulignée, hier, par Kamel Rezzag Bara, conseiller à
la présidence. «Il est clair que ce qui se passe à nos frontières, aussi bien
avec le Mali qu'avec la Libye, est un facteur de tension qui risque d'avoir des
implications majeures», a-t-il déclaré en marge d'une rencontre sur la lutte
contre le terrorisme organisé par le Centre africain d'études et de recherche
sur le terrorisme (CAERT).
LE NIGER POUR LA MANIERE FORTE
A Nouakchott, les membres du Cemoc (Mauritanie, Algérie et Niger) se sont
réunis, hier, en l'absence du Mali, «l'homme très malade du Sahel», pour mettre
l'accent sur une normalisation rapide à Bamako à travers une application
immédiate et inconditionnelle de l'accord destiné à transférer le pouvoir aux
civils au Mali. Une priorité sur laquelle les trois pays s'entendent alors que
sur le traitement de la situation au nord du Mali, des nuances s'expriment
entre le choix de la voie militaire et la voie politique. Mais le message à
destination de la junte militaire malienne est sans équivoque: une application
immédiate de l'accord prévoyant le retour de l'ordre constitutionnel conclu
avec la Cedeao. Pour les trois pays «du champ», ce retour rapide à la
légitimité à Bamako est nécessaire pour que le Mali soit en mesure, avec l'aide
des autres pays, de participer à la gestion de la situation chaotique au nord
d'où l'armée malienne a été expulsée par une rébellion targuie phagocytée par
les groupes djihadistes. Le ministre mauritanien des Affaires étrangères,
Hammadi ould Hammadi, a indiqué que cette application immédiate doit pouvoir
«conduire à une transition inclusive et apaisée de nature à doter le Mali d'un
pouvoir central légitime» avec pour but de «rétablir la stabilité, la sécurité,
la paix civile et la concorde nationale». Il a dénoncé une rébellion targuie
«noyautée par les groupes armés terroristes» qui a fait une «exploitation
cruellement opportuniste» du (coup d'Etat du 22 mars).
LA VOIE POLITIQUE MAIS AVEC QUI?
Hammadi ould Hammadi a discuté du sujet avec son homologue nigérien,
Mohamed Bazoum, et le ministre algérien délégué aux Affaires africaines et
maghrébines, Abdelkader Messahel. Pour le ministre nigérien, l'intervention
militaire évoquée par la Cedeao est de mise si les groupes rebelles ne
reviennent pas à leurs positions d'avant le coup d'Etat. C'est pour lui un
préalable à toute négociation sinon, a-t-il dit, «une action militaire
autorisée par le Conseil de sécurité (de l'ONU) doit être menée en vue de la
libération du territoire malien». Abdelkader Messahel a été plus nuancé en
soulignant que la solution est politique et ne peut «être le fruit d'un effort
militaire qui pourrait aggraver davantage une situation déjà fragile et bien
complexe». Il s'agit d'encourager les négociations entre Maliens. Il reste que
l'interlocuteur, plus ou moins accepté, le MNLA, dont la déclaration
d'indépendance a été largement rejetée, n'est pas le seul sur le terrain. Et il
n'est pas le plus dominant alors qu'il paraissait disposer de plus d'hommes. Si
la solution militaire n'est pas évidente, la solution politique ne l'est pas
tout autant en raison de la multiplication des acteurs targuis et des lourdes
interférences des groupes djihadistes notamment l'Aqmi et le Mujao.
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Posté Le : 09/04/2012
Posté par : sofiane
Ecrit par : Salem Ferdi
Source : www.lequotidien-oran.com