Algérie

MALGRE SA DESTITUTION PAR LE COMITE CENTRAL Belkhadem fracture le FLN



Abedelaziz Belkhadem a été officiellement destitué, jeudi, de son poste de secrétaire général du Front de libération nationale, suite à retrait de confiance en bonne et due forme par le comité central du parti à l'issue d'un vote à bulletins secrets : 160 voix s'étant prononcées contre son maintien à la tête du parti.
Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Les travaux de la session, entièrement encadrés, sur tous les plans, par les services de sécurité qui avaient en fait hermétiquement quadrillé le lieu de ladite rencontre, à savoir l'hôtel Riadh de Sidi Fredj et ses environs, avaient été entamés, comme convenu, par ce décisif vote de confiance. Pour la première fois en effet depuis trois ans, Belkhadem se retrouve face à face avec ses contestataires. L'opération, supervisée par une huissier de justice, verra se défiler devant l'urne, pas moins de 318 membres sur les 330 que compte désormais le comité central. Elle durera toute la journée et, au bout, un résultat des plus étriqués : Belkhadem perd l'élection avec une différence de seulement 4 voix ! 7 bulletins étant par ailleurs déclarés nuls. Comme c'est d'usage en pareilles circonstances, le désormais ex-secrétaire général du FLN prend la parole, reconnaît sa défaite et considérera que cela constituait «une grande victoire pour le parti qui vient de donner une grande leçon de démocratie». Il quittera les lieux sur ces déclarations que tout le monde croyait les… dernières de celui qui dirigeait l'ex-parti unique depuis 2004. Naturellement, la séance est levée de fait laissant cours à des spéculations par-ci, des consultations par-là, autour de l'après-Belkhadem. Or, coup de théâtre ! En début de soirée, l'ex-secrétaire général est de retour. Non pas pour assister comme simple membre du comité central mais en conquérant ! Dans une ambiance folle, il exige que les travaux de la session reprennent sans délai pour élire un nouveau secrétaire général. «Vous m'avez destitué par l'urne ' Soit. Alors, il faut qu'il y ait une autre élection pour élire un autre SG. Et cela se fera aujourd'hui même.» Stupeur dans la salle ! Ses opposants crient au scandale tandis que ses partisans, revigorés, reviennent à la charge. Dans un décor inhabituel au plus vieux parti d'Algérie, même les tentatives de conciliation traditionnelles se font en plénière et en public. La plus spectaculaire aura lieu entre Belkhadem et un ténor du parti, Abdelkader Hadjar, l'actuel ambassadeur d'Algérie à Tunis. Les deux hommes ne se sont pas adressé la parole depuis 3 ans pourtant. Mais Hadjar tente de persuader Belkhadem de renoncer à ses exigences. Peine perdue car l'ancien chef du gouvernement ne veut rien lâcher. Pas question de constituer un bureau de session, pas davantage de laisser la session ouverte. Au bout d'un long moment, Belkhadem fera une seule concession : «On ne va pas élire le SG ce soir ' On le fera alors demain au plus tard !» Refus totale de l'autre côté. Chaque clan campe alors sur ses positions et les travaux demeurent figés. Aux alentours de minuit, une ultime tentative est lancée pour débloquer la situation : un bureau de session consensuel, composé de huit membres, est convenu. Le camp des opposants à Belkhadem y est majoritaire avec 5 membres, tandis que les trois autres représentant l'autre aile, sont susurrés à l'insu même des concernés, ce qui provoquera des tiraillements «internes». Et alors qu'un représentant des opposants allait lire la composante devant l'assistance, une grosse bousculade est provoquée pour l'empêcher de rejoindre la tribune. N'empêche, il la lira quand même quand une violente bagarre éclate dans la salle.
Quand l'ex-SG et un huissier gèrent toujours le parti !
Sur ce, les deux ailes se séparent. Les contestataires, sortis vainqueurs du vote de confiance, adresseront la nuit même une correspondance au ministère de l'Intérieur, comportant procès-verbal où est annoncé le retrait de confiance ainsi que la composante du bureau de session. Les huit ministres en exercice du parti, tous contre Belkhadem, affirment que leur homologue de l'intérieur Daho Ould Kablia en a pris acte. Le ministre des Transports, Amar Tou, est catégorique et il le dira à tous les membres du CC le lendemain, vendredi. «Le ministère de l'Intérieur ne prend en considération que notre P-V. Vous pouvez rentrer chez vous, il n'y a plus rien à faire ici. Tout ce que fait ce bonhomme (Belkhadem, Ndlr) est illégal. Pour nous, il n'existe plus.» Même affirmation répétée plus tard par Ahmed Boumehdi, l'un des chefs de file des contestataires et membre du bureau de session annoncé la veille : «Le bureau vient de se réunir et la session est déclarée ouverte. Le comité central se réunira en temps voulu pour élire un nouveau secrétaire général. Belkhadem ' Nous lui avons retiré la confiance et tout ce qu'il est en train de faire est nul et non avenu.» Il faut dire que, pendant ce temps, Belkhadem a «repris du service». Hier vendredi, il commença par convoquer ses partisans pour reprendre la session. L'huissier de justice commence, et c'est une première dans les annales, par présider les travaux ! La dame proclamera même que les travaux devraient se poursuivre avec élection d'un nouveau SG demandant, dans la foulée, qu'un membre du comité central lui fasse une proposition : ce sera Belkhadem, bien sûr. «Je vous propose de constituer une commission de recueil des candidatures composée de douze membres, six de chaque camp. On se donnera rendez-vous pour cet après-midi, en attendant qu'ils nous proposent leurs membres et, en attendant l'élection d'un nouveau SG, je vous propose aussi de charger le bureau politique de gérer le parti.» Ce que la salle retiendra, évidemment. Mais pas les contestataires. Cela n'empêchera pas Belkhadem de revenir l'après-midi et d'ajouter : «Je les ai attendus pendant deux heures et ils ne sont pas venus. Alors, on annonce nos membres à nous et on leur donnera (les contestataires) jusqu'à demain pour le faire. Dans tous les cas, on organisera l'élection d'un nouveau SG ce samedi avant minuit ou, alors, dans les quelques jours à venir.» Bref, Belkhadem installe, là, le FLN dans une situation pour le moins inédite et le bascule dans une crise ouverte avec un comité central coupé en deux. Une crise dont l'issue ne peut qu'être inspirée de l'extérieur du parti comme cela a toujours été le cas. La décision que rendra publique le ministère de l'Intérieur donnera un premier indice des intentions du pouvoir de ce qu'il convient d'appeler désormais «l'affaire Belkhadem».


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