Algérie

Malgré les divergences...



La visite du secrétaire d'Etat américain en Algérie est venue renouer des liens entre les deux pays à un haut niveau de responsabilité, après 8 années de relations distendues où les échanges étaient plus techniques que véritablement politiques. Il faut dire, au passage que la maladie du défunt président Bouteflika et le mandat de Donald Trump à la tête des USA, ont contribué au refroidissement des relations entre les deux pays. Le prédécesseur de Biden avait écarté l'Algérie de ses plans, préférant promouvoir le trio Maroc-USA-Israël. Trump était allé trop loin dans la compromission avec son allié dans la région, jusqu'à reconnaître la marocanité du Sahara occidental et ériger un consulat dans la ville occupée de Dakhla, contre toute logique du droit international.L'arrivé de Joe Biden à la Maison- Blanche a mis un terme à l'aventurisme «trumpiste» en annulant la décision sur le consulat et forcer Rabat à accepter l'envoyé spécial de l'ONU sur la question sahraouie. Il reste que ce retour à l'ordre des choses n'a pas été jusqu'au bout, puisque l'administration Biden n'a pas remis en cause le décret reconnaissant la marocanité du Sahara occidental. Cette posture démocrate, au milieu du gué, n'est certainement pas étrangère à l'obligation qu'a Washington de «soigner» quelque peu le deal de Trump. En effet, la normalisation avec Israël entreprise par le Maroc ne saurait être remise en cause par l'actuel locataire de la Maison- Blanche, dont l'administration approuve le processus de rapprochement entre les pays arabes et Israël. D'ailleurs, les étapes de la visite de Blinken qui ont précédé celle d'Alger illustre assez clairement les intentions de Washington.
Le chef de la diplomatie US qui a réuni ses homologues émirati, égyptien et marocain à Tel Aviv même, adresse un message à la nation arabe sur le soutien sans faille qu'apporte Washington au processus de normalisation. Intervenue quelques semaines après une importante réunion des ministres des AE de la Ligue arabe pour statuer sur le Sommet d'Alger, la tournée de Blinken ressemble à une sorte de revue d'effectif, histoire de s'assurer de la qualité de cette normalisation à quelques mois d'un Sommet où la question palestinienne sera au centre des débats. À ce propos, les opinions arabes ne manquent pas de souligner la ségrégation manifeste dont font montre les Occidentaux entre les victimes palestiniennes et ukrainiennes.
Blinken qui était jusqu'à son escale marocaine en terrain conquis, a trouvé en face de lui, hier, un discours différent, voire aux antipodes des postures totalement acquises aux thèses de l'Occident sur pas mal de questions. Le diplomate américain s'attendait certainement à devoir entendre une version plus proche du droit international sur la question du Sahara occidental. Au lendemain d'un tête- à- tête avec son homologue marocain où la thèse de la large autonomie s'entendait comme recevable, le chef de la diplomatie américaine était face à des arguments imparables, car bâtis sur la légalité internationale. L'autodétermination est incontournable dans le cas de figure du dossier sahraoui. Il a également pris la température «négative» des rapports entre les deux voisins, l'Algérie et le Maroc, dont la rupture des relations par l'Algérie a été étayée et argumentée par la diplomatie algérienne. Ainsi Blinken arrive dans une Afrique du Nord sous tension, exacerbée par une présence quasi-militaire d'Israël aux frontières ouest de l'Algérie et une situation d'instabilité inquiétante à l'est, en Libye et au sud, au Mali et au Burkina Faso. Mais la diplomatie sert justement à rapprocher des points de vue apparemment irréconciliables. En cela, l'Algérie est reconnue pour son efficacité et Blinken en témoigne, ayant été l'un des acteurs de la crise des otages américains en Iran, qui doivent leurs vies sauves à la médiation algérienne. Les divergences sur nombre de sujets n'empêchent pas Alger et Washington de maintenir un niveau élevé dans le partenariat, sécuritaire, notamment.
Les USA reconnaissent l'apport de l'Algérie dans la lutte antiterroriste et respectent son non-alignement qui l'a si souvent mise en contradiction avec la politique étrangère américaine, concernant toutes les guerres qu'elle a déclenchées en Irak, en Syrie et en Libye. Contrairement à Rabat, Alger a marqué son territoire sur des dossiers stratégiques, jusqu'à sa volonté de réunir, le 1er novembre prochain, les Etats arabes pour remettre le dossier palestinien au centre des débats. Antony Blinken ne caressait aucun espoir de faire changer d'avis aux dirigeants algériens, mais de tenter de trouver des postures communes pour faire avancer certains dossiers.


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