Malentendu

L'extérieur de la maison où se déroulent les fiançailles prit l'allure d'un salon de l'automobile. Il manquait des mannequins devant chaque voiture mais, très vite, je m'aperçus que ces derniers étaient à l'intérieur. Les uns dansaient, sans trop se déhancher, de peur de froisser leurs étoffes. D'autres, ne voulant pas froisser leurs épouses, évitaient la piste. Quelques-uns pistaient d'éventuelles épouses, quand les plus snobs se confondaient avec leurs fauteuils.La future mariée, accompagnée d'une amie, n'arrêtait pas de sortir pour revenir, quelques moments après, différemment accoutrée. Elle se mouvait à la manière des «top models» sous les youyous. «You are beautiful», lui disait son «moulay essoltane» à chacune de ses réapparitions. Il était stéréo, ne faisait aucune économie de décibels.Les deux vieilles femmes, qui n'avaient plus que les yeux pour pleurer, ne comprenaient rien à cette cérémonie. Elles avaient des gosses sur les genoux qu'elles essayaient tant bien que mal de bercer.- Goulili, pourquoi la mariée n'arrête-t-elle pas de rentrer et sortir '- C'est pour changer de robe, bnète elyoum, c'est comme ça !- Ah, la moda. Kount engoule… je pensais qu'elle avait la diarrhée el-meskina.- El-meskina, c'est ta fille et la mienne. Je ne comprends plus ces hommes, ils se marient avec la première venue, les filles msegmète n'ont pas de chance.La maîtresse de maison allait d'une personne à une autre. On la voyait se donnant des coups à la poitrine. Elle attirait les regards de toute l'assistance.Le silence s'installe. La chaîne stéréo est éteinte. Ouach kayène ' Qu'est-ce qui se passe ' What's happen ' Le questionnement se fait polyglotte.«On a volé zerrouf Aouicha… Si au moins c'était le mien. Comment vais-je le rembourser maintenant '» dit la maîtresse de maison. Ambiance de suspicion et chuchotements. Mais maman, c'est moi qui le porte, dit la mariée à sa mère qui s'était déjà évanouie.