Mahfoud Kaoubi, expert en politique et en géo-économie «Il faudra compter avec l’Algérie»

Publié le 05.03.2024 dans le Quotidien l’Expression

Le monde connaît une rupture majeure et amorce un profond changement, suite à l’émergence des Brics.
Face aux sanctions occidentales, la Russie a fait preuve d'une grande résilience. C'est ce que constate Mahfoud Kaoubi, expert en politique, en géo-économie et spécialiste des questions financières, qui a, à la faveur de son intervention dans l'émission matinale L'Invité de la rédaction, de la Radio nationale Alger chaîne 3, longuement traité de la nouvelle configuration mondiale, amorcée notamment suite au conflit russo-ukrainien.

«Le monde est en mutation pour une reconfiguration de la carte géostratégique avec une recomposition des rapports de force», a-t-il indiqué tout en relevant que le dollar américain perd de plus en plus de terrain en tant que monnaie de réserve et d'échange.

Selon lui, l'amenuisement de la part du dollar US dans les réserves de change des pays, est la preuve patente de ce déclin. Alors qu'elle était à hauteur de 65 à 68% dans les économies des pays, cette part du dollar se réduit comme peau de chagrin et se situerait actuellement à 50%, a-t-il expliqué, en s'interrogeant: «Est-ce la fin de l'hégémonie du dollar sur les transactions commerciales et économiques dans le monde?».

Le monde connaît une rupture majeure et amorce un profond changement, suite à l'émergence des Brics. Poursuit Kaoubi qui tout en reconnaissant le leadership US et chinois estime que l'Europe sera le plus grand perdant de cette mutation. Dans le monde qui est en train de se dessiner l'on retrouve la Chine en particulier mais également l'Inde, la Russie et d'autres pays émergents dont la participation à la production mondiale devient tangible. Souligne Kaoubi qui soutient que dans ce monde en pleine mutation, où, figurent également l'Afrique du Sud et l'Égypte, il faudra, désormais, compter avec l'Algérie. «Dans un monde qui se recompose et, où, les rapports de force sont chamboulés, l'on voit apparaître de nouvelles logiques, lesquelles ne peuvent qu'impacter la sphère financière mondiale. D'ores et déjà la Chine revendique 17% du produit mondial, alors que l'Inde signe une croissance de 6%. La Russie qui est résiliente face aux sanctions qui lui ont été imposées, finit, pour sa part, par augurer d'un changement qui ne manquera pas d'advenir sur les instruments qui ont jusque- là dominé les valeurs», poursuit Kaoubi qui renvoie dans ce sens aux «52 pays qui ont adhéré au système de compensation mis en place par la Russie et qui attestent de cette volonté de revoir les mécanismes qui ont jusque-là dominé les échanges sur la scène internationale».

L'expert explique que l'on assiste effectivement au déclin de certaines économies au moment où d'autres émergent, avec l'affirmation des États de leur souveraineté totale sur les richesses de leurs pays.

«Le succès qu'a connu le 7e Forum des chefs d'État et de gouvernement des pays exportateurs de gaz qui vient de se dérouler à Alger (29 février - 3 mars 2024) est un nouveau pas qui a clairement exprimé cette volonté», finit par constater Mahfoud Kaoubi.

Salim BENALIA