Algérie

Magtaâ kheira, «royaume» des viandes blanches : Insalubrité et anarchie



Magtaâ kheira, «royaume» des viandes blanches : Insalubrité et anarchie
Photo : Slimene S.A. Au 19e siècle, le lieudit Magtaa Kheira fut célèbre grâce à une femme qui a fait voir des vertes et des pas mûres à la soldatesque française. Bandit de grand chemin, elle n'hésitait pas à délester les personnes de passage. Actuellement, ce lieu à la croisée des chemins menant vers Tipasa et Blida est intimement lié à l'abattage clandestin et la vente illicite de dindes. A l’entrée de Douaouda, ce lieu est devenu incontournable pour acheter la viande blanche. Plusieurs camions attendent d’être déchargés de leur volaille dans un grand hangar. Celle-ci sera abattue, déplumée, coupée avant d’être vendue. Les gallinacés proviennent de Koléa, Blida, Tiaret, et même de Sétif. Mais l’insalubrité des lieux repousse le moins exigeant en matière d’hygiène. Les étals construits en dur sont crasseux. Le sang mêlé à l’eau de pluie recouvre presque la totalité de la superficie. Ici, ni eau ni électricité. «On bricole», résume l’un des revendeurs. «Pour nettoyer le hangar, il faut ramener de l’eau avec des seaux de l’oued avoisinant», ajoute un autre revendeur. «La wilaya, la daïra et l’APC doivent intervenir pour mettre fin à l’anarchie», fulmine un acheteur pataugeant dans l’eau boueuse. «C’est la misère qui ne dit pas son nom», renchérit Sid Ali, qui travaille sur les lieux depuis une dizaine d’années. Mais il reconnaît que depuis trois ans, les choses se sont améliorées un tout petit peu. «On vendait sur la route même. Même l’abattage se faisait à l’air libre sans parler des énormes embouteillages que cela génère tout le long de la route menant vers Alger et Blida», se rappelle-t-il. Entre-temps, une superficie a été délimitée à la hâte et au bord de la route pour accueillir quelques étals et un abattoir mitoyen. Seulement, toute cette infrastructure ne répond pas aux normes. Paradoxe, chaque responsable local qui s’installe fait de l’aménagement des lieux sa priorité, mais sur le terrain, rien n’a changé.Idem pour les chefs de daïra et les différents P/APC qui se sont succédé et qui ont promis d’ériger un abattoir et un marché de gros, spéciale dinde «qui seront les fleurons de la ville de Douaouda».   Ce marché informel spécial viande blanche a ses corollaires : le travail des enfants sans protection, l’activité des commerçants sans registre de commerce, l’insalubrité, l’absence de vétérinaire  pour le contrôle sanitaire et cerise sur le gâteau, ni eau et électricité.  Conséquence : à l’intérieur de ce «souk», la viande découpée est entassée à l’air libre. Pas de présentoirs encore moins d’armoire frigorifique. Les revendeurs dont on a remis, juste, un badge avec photo délivré par l’APC, ne portent ni blouses, ni toques. DES ADOLESCENTS POUR L’ÉGORGEMENTA côté, c’est l’espace tuerie. Avec des bottes à mi-mollet, une vingtaine d’adolescents s’affairent à déplumer les volailles au milieu d’amas de plumes mélangées à des excréments et au sang frais. Sans masque, humant une odeur nauséabonde qui s’y dégage, sans protection des mains, ils gagnent 50 dinars par bête. L’un d’eux, Farès, 16 ans, a contracté une septicémie et a séjourné durant 19 jours à l’hôpital. Ce sont ces camarades qui se sont occupés de lui en lui achetant des médicaments. Le médecin lui a conseillé de ne plus faire ce «métier». Mais il est revenu après sa convalescence, sans tenir compte de ces recommandations. Il gagne 800 dinars par jour, «un petit pactole qui me permet de subvenir aux besoins de ma famille», dit-il. Pour Hakim Rabhi, le responsable du marché, les choses vont s’améliorer. «Dans trois mois, assure-t-il, les travaux vont être lancés». «Cependant, la daïra est confrontée aux problèmes de liquidités», tempère-t-il. Sur les 4,8 milliards de centimes dégagés pour la réalisation du marché, de l’abattoir et des annexes, il n’y a que 1,7 milliard qui sont disponibles. A propos du travail des adolescents, M. Rabhi répond qu’il ne peut rien faire du fait que les travailleurs ramènent chacun un membre de sa famille ou une connaissance. Pour les moyens de protection, il affirme qu’il n’est pas responsable «du moment que c’est l’anarchie totale». «D’ailleurs, le vétérinaire descend rarement pour faire son travail et ne peut saisir la viande avariée par peur des représailles», indique le responsable des lieux.  En plus de ces conditions, il y a eu une augmentation vertigineuse des prix. Pour Omar Cherati, éleveur de dindes à Bougara, ce renchérissement est explicable. Lui achète le dindonneau importé très cher. L’alimentation est importée également. Elle est constituée de maïs et de soja. Lorsqu’il y a une rupture de stock, le prix du kilo de la dinde a grimpé pour atteindre les 400 dinars le kg et l’escalope est cédée à 700 dinars le kg. «Ces prix peuvent évoluer en dents de scie selon la disponibilité du dindonneau et de son alimentation», explique l’éleveur. Au niveau de l’APC de Douaouda, le dossier du projet de réalisation d’un marché et d’un abattoir spécial dindes, répondant aux normes, est bien ficelé. Le terrain est délimité et la wilaya a donné son feu vert. Idem pour la daïra. Aussi, les travaux devront être lancés dans les prochains jours, selon un responsable rencontré au niveau de l’APC. Ce marché est composé de 34 locaux d’après le plan de masse dont chacun est composé de 7,68 mètres carrés. A côté, il est prévu un abattoir. «Le matériel importé est excessivement cher, c’est pour cela que les travaux ont été freinés quelque peu», a affirmé un élu de l’APC. «Finalement, nous avons opté pour un matériel traditionnel pour l’abattage et l’arrachage des plumes», a-t-il ajouté. Un acheteur rencontré sur place est satisfait de cette décision. Mais il fait remarquer que ce projet date depuis très longtemps. A chaque nouvelle nomination d’un wali, le dossier de ce marché est remis sur la table. Une enveloppe a été dégagée, le plan de masse est esquissé puis a été remis aux calendes grecques. Cependant, le nouveau maire croit dur comme fer que cette fois-ci tout est fin prêt pour le lancement des travaux. Entre-temps, des adolescents sont exploités travaillant dans des conditions très dures sans le minimum de protection. • Ce marché informel spécial viande blanche a ses corollaires : le travail des enfants sans protection, l’activité des commerçants sans registre de commerce, l’insalubrité, l’absence de vétérinaire  pour le contrôle sanitaire et cerise sur le gâteau, ni eau et électricité.  • Au niveau de l’APC de Douaouda, le dossier du projet de réalisation d’un marché et d’un abattoir spécial dindes répondant aux normes est bien ficelé. Le terrain est bien délimité et la wilaya a donné son feu vert. C’est au tour de la daïra de donner son aval pour lancer les travaux. Ces derniers devront être lancés dans les jours qui suivent


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