La colère des jeunes en Algérie et en Tunisie contre leurs précaires
conditions de vie, des lendemains sans issue, est symptomatique de l'échec des
politiques sociales menées jusque-là par ces deux pays, mais le Maroc comme la
Lybie, tout comme l'Egypte ne sont pas exclus de cette infernale dynamique de
la croissance du chômage. L'Egypte, dont les jeunes ont été enivrés par les
effluves de la Révolution du Jasmin, est entrée dans l'antichambre de ce cycle
de revendications sociales pour des changements rapides. L'Algérie est
l'exception qui confirme la règle : avec de confortables recettes
d'hydrocarbures, le pays peine à créer des emplois, la croissance étant trop
faible.
Les violentes manifestations qui
ont conduit au départ du président tunisien, ainsi que ce qui se passe en
Egypte, et les récentes émeutes en Algérie ont un seul point commun: chômage et
avenir assombri pour des dizaines de milliers de jeunes diplômés, et des
centaines de milliers d'autres sans diplômes. Et, c'est le même phénomène qui
est observé au Maroc comme en Algérie: la population des jeunes diplômés au
chômage dans ces trois pays ne fait que s'exacerber, selon une récente étude de
«Carnegie Moyen-Orient», menée par Lahcen Achy, de l'INSEA de Rabat. L'étude
menée par Achy bat en brèche les statistiques officielles sur le chômage dans
ces trois pays. Les trois pays ont réussi ces dix dernières années à ramener le
chômage, officiellement, à des niveaux assez bas: 9,1% au Maroc, 10,2% en
Algérie et 13,3% en Tunisie fin 2009, contre respectivement 13,4%, 30% et 15,7%
en 2000. Ces données statistiques sont officielles et élaborées selon les
critères du Bureau international du travail (BIT). Pour autant, la réalité est
ailleurs, et l'étude de Carnegie Moyen-Orient estime même que ces données sont
«trompeuses». Pourquoi ? Il y a d'abord le facteur démographique : les taux de
natalité dans les trois pays ont sensiblement baissé et ont été divisés en deux
en un quart de siècle. Au Maroc, le taux d'activité (qui indique la part des
personnes actives dans la population totale âgée de 15 ans et plus) était de
49,9% en 2009, contre 54,5% en 1999. En Tunisie et en Algérie, ce taux est
encore plus bas : respectivement de 46,9% et 41,4% en 2008, contre 51% et 48,1%
en 2001.
La bombe du chômage des jeunes
L'explication à ce phénomène revient au faible taux d'activité des femmes
dans ces trois pays, selon l'étude de Carnegie : 27% au Maroc en 2009 (contre
28% en 2003), 14% en Algérie (contre 17 % dix ans plus tôt) et 25% en moyenne
au cours des dix dernières années en Tunisie, pourtant précurseur dans le
domaine de l'émancipation de la femme. Il y a donc moins de pression sur le
marché du travail. Enfin, le développement du secteur informel au Maghreb,
selon M. Achy, est pour beaucoup dans les créations d'emplois et, partant, dans
la baisse du chômage. Au Maroc, l'emploi informel en représentait 37,3% de
l'emploi total non agricole. Son stock est passé de 1,9 million d'emplois en
1999 à 2,22 millions en 2007, soit une création annuelle de plus de 35.000
emplois informels. En Algérie, l'emploi informel comptait pour 27% dans
l'emploi en 2007, contre 20,2% en 2000. Si le phénomène est important en
Tunisie, aucune statistique n'est cependant disponible sur son ampleur. Par
contre, le chômage des jeunes est très important dans les trois pays. Au Maroc,
le chômage des jeunes âgés de 15 à 29 ans est passé de 15,3% en 2003 à 17,6% en
2008. En Algérie, il s'établi à 21,5% en 2008 contre... 45% en 2003. La
Tunisie, elle, a le taux de chômage des jeunes le plus élevé (plus de 30%) et
ce niveau n'a connu aucune amélioration ces dernières années. Toutes les
statistiques le montrent : le chômage des jeunes diplômés est beaucoup plus
important que celui des non-instruits. Et devient, pour nombre d'analystes et
institutions internationales, y compris le FMI et l'agence de notations
américaine Standard and Poors, un puissant élément de révoltes sociales, voire
un puissant combustible pour des revendications violentes pour un changement
politique radical et des réformes dans cette région du monde.
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Posté Le : 31/01/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Yazid Alilat
Source : www.lequotidien-oran.com