Algérie

Maghnia: L'hôpital en mal d'équipements



La notoriété de l'Etablissement public hospitalier (EPH) acquise par un cadre rendu agréable et une prise en charge exemplaire des malades, ainsi que par un personnel médical de l'ensemble des services, très dévoué et actif, semble s'amoindrir, voire s'estomper à cause du manque de performance constaté ces derniers temps.

L'EPH se heurte curieusement et inopinément à des difficultés d'ordre matériel et humain, ce qui s'est inéluctablement répercuté sur le rendement de l'unité qui est en passe de connaître un déclin significatif. Le problème se situe principalement au niveau des services de chirurgie et gynécologie où la grogne des malades est la plus perceptible. La situation est réellement préoccupante dans ces services, notamment celui de chirurgie où des malades attendent depuis deux mois pour être opérés, vainement. « Au milieu du mois de mars, le chirurgien m'a fixé rendez-vous pour le 17 avril pour une intervention chirurgicale de la vésicule. Jusqu'alors, je continue d'endurer les douleurs après que le spécialiste m'eut signifié que mon rendez-vous est différé à une date ultérieure à cause d'une pénurie d'anesthésiantss et de sérum que connaît le service », dira cette quinquagénaire qui attend toujours impatiemment depuis deux mois la disponibilité du ou des produits en question. Ils sont devenus nombreux les malades qui attendent une probable livraison d'une quantité suffisante en rapport avec le nombre de malades pour enfin se voir délivrés des maux qui les rongent. Renseignements pris au niveau du chef de service chirurgie et de la direction de l'établissement, les quantités de certains sérums et produits anesthésiants fournis par la pharmacie centrale sont toujours bien en deçà des prévisions et des demandes formulées et présentent une irrégularité en dents de scie comme le montrent les chiffres. En effet, depuis le début de l'année, des creux ont été constatés lors des mois de février et avril qui ont contraint la direction à réserver la quasi-totalité de ces produits pour les urgences, les dialysés et les malades du service d'oncologie. Aussi, seulement 3 malades programmés et 106 urgences et 13 autres malades programmés et 123 urgences ont été traités respectivement durant ces 2 mois. Cette irrégularité dans la livraison de ce genre de produits ne semble pas toucher les autres EPH de la wilaya. Pour ceux de Nedroma et Ghazaouet qu'on a contactés, les actes chirurgicaux s'y déroulent d'une manière ordinaire et les produits en question y sont disponibles. Devant cet état de fait, la seule explication avancée par un responsable de l'EPH de Maghnia est que la quantité livrée n'est pas en rapport avec l'important nombre d'actes chirurgicaux. A titre illustratif, 240 interventions chirurgicales (100 programmées et 140 urgences) ont eu lieu durant le mois de janvier et 252 (106 programmées et 146 urgences) durant le mois de mars.

Ce sont là des chiffres effarants qui dénotent la pression que fait subir à l'EPH l'immense contrée couverte (300.000 âmes) et du besoin pressant d'une plus grande disponibilité des produits cités.

Actuellement, la situation n'est guère aisée pour la direction de l'établissement et le service de chirurgie, lesquels se voient confrontés à un cumul de malades dont la grogne se fait déjà écho. Le service de gynécologie bute de son côté sur des difficultés à cause du déficit en spécialistes. Avec 2 gynécologues locaux et un autre d'appoint dépêché de Tlemcen, le service, qui fait face à l'important flux arrivant de toutes les daïras de l'extrême Ouest, malgré la bonne volonté de ses spécialistes, montre des signes d'essoufflement. Avec cet effectif, la permanence ne peut être assurée que durant à peine le tiers du temps seulement, ce qui contraint, lors de cas compliqués, à l'évacuation vers l'hôpital du chef-lieu de wilaya, chose qui n'est pas dénuée de difficultés et de risques. A ce propos, l'on cite l'aventure de 3 femmes évacuées il y a une dizaine de jours sur l'hôpital pour accouchement.    Les malheureuses ont été tassées dans une ambulance (un tacot plutôt), au point où l'une d'elles, malgré l'urgence de son cas, a été forcée de faire le trajet, assise dans une position la plus inconfortable…sur un banc en métal.

En pleine autoroute, de la fumée se dégageait de l'ambulance et dans laquelle le feu s'est déclaré à quelque 15 km de Tlemcen. Les malades sorties de l'ambulance ont été mises à même le sol. Si pour 2 parmi elles, elles ont été rejointes par leurs familles qui les ont évacuées à bord de leurs véhicules vers l'hôpital, la 3ème et la sage-femme accompagnatrice ont été transportées vers l'hôpital par un « hallab », qui s'est montré sensible au désarroi des deux infortunées. L'aventure aurait pu avoir une issue fâcheuse si ce n'était le concours des tierces personnes, qui a été pour le moins salutaire. Malgré les déboires et l'énorme effort consenti par l'accompagnatrice pour faire parvenir les malades à destination, elle a eu droit à son arrivée à l'hôpital à la réprimande et à des brimades car, selon ses supérieurs, elle a enfreint à la règle qui interdit l'évacuation par véhicule particulier… elle aurait dû attendre l'arrivée d'une autre ambulance… Sans commentaire. Par ailleurs, d'autres imperfections sont constatées ça et là, lesquelles ne sont pas sans ternir l'image de cette institution qui, pourtant, était, dans un passé très récent, un joyau et un exemple en matière de prise en charge des malades au niveau de toute la région Ouest.

A ce propos, l'on cite ce jeune qui avait reçu un coup de couteau au niveau de l'aisselle gauche, et qui avait été évacué à Tlemcen pour non disponibilité d'échographe! On note au passage la situation très lamentable du service des urgences de Tlemcen engendrée par l'afflux continuel des malades évacués à partir de toutes les urgences de la wilaya et pour lesquelles ce service ne semble pas équipé et étoffé en personnel en conséquence.

Par ailleurs, malgré la bonne volonté du personnel médical du laboratoire d'analyses, le service étouffe sous le nombre. Cette fois-ci, c'est plutôt le malade qui fait dans l'excès, qui est à l'origine de cette situation. « Certains malades se présentent jusqu'à 4 fois par mois pour refaire les même analyses », dira ce laborantin, avant de nous tendre plus d'une centaine de résultats d'analyses non récupérés par leurs demandeurs. Ce sont là des comportements qui compliquent davantage la marche du service qui fait face quotidiennement à la ruée et pour laquelle la remarque d'une citoyen ne semble pas dénuée de bon sens : « Contrairement à ce qui se passe, le laboratoire d'analyse doit s'occuper uniquement des urgences et des analyses spécifiques, ce qui lui permet de s'affranchir ainsi des analyses classiques qui pouvaient se faire dans les laboratoires privés : une solution dissuasive pour parer à l'excès ». En outre, si l'EPH a été étoffé de spécialistes en oncologie, ORL et réanimation, le principal équipement, en l'occurrence le scanner, qui a coûté des milliards au contribuable, demeure, voilà 4 années, non encore opérationnel par manque… de radiologue. A ce train-là, l'EPH de Maghnia, qui semble initier une culbute qui ne présage rien de bon pour l'un de nos biens fondamentaux, en l'occurrence la santé, risque la banqueroute qui le fera aligner sur des établissements qui n'ont d'hôpital que le nom, si l'assistance de la part de l'administration centrale ne vient pas à la rescousse quant à la disponibilité des produits et médicaments, l'affectation de davantage de spécialistes, notamment en gynécologie et radiologie, ainsi que l'appoint en équipements.




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