Algérie

Lutte en hauts lieux SCÈNE POLITIQUE



Lutte en hauts lieux SCÈNE POLITIQUE
Les grandes manoeuvres ont commencé avec l'éclatement de l'Alliance
Il ne sert à rien de se voiler les yeux en effet. Une lutte en hauts lieux est menée. On le sent depuis déjà quelque temps.
D'un côté, certains tirent la sonnette d'alarme pour attirer l'attention sur ce qui, selon leur conviction, menace le pays dans le proche avenir. De l'autre, ceux qui s'esclaffent de rire en se plongeant le doigt dans le nombril et en se moquant de la théorie du complot et de ses adeptes. Nous aurions pris volontiers une chaise pour suivre un débat qui se mène à travers une presse encore «peu intéressée» par le sujet, n'eût été la gravité de la chose et la sensibilité du moment.
Qu'on le veuille ou non, et au risque de nous répéter, il n'y a aucune raison particulière pour que les changements qui secouent la latitude arabe de la planète ne touchent pas notre pays et il faut être anormalement entêté pour croire que l'onde de choc ne parvienne pas jusqu'à nous. Sur ce plan, tout le monde semble d'accord. En effet, rares sont ceux qui ne sentent pas ou font semblant de ne pas sentir venir le changement en Algérie. La divergence entre les deux discours n'apparaît qu'à partir du moment où l'on commence à parler du type de changement qui sera le nôtre. Il est préparé à l'extérieur par les ennemis du pays, s'écrient les uns, alors que les autres jurent que ce changement viendra de l'intérieur.
D'où viendra le changement'
Pour les premiers, les richesses nationales sont une explication sérieuse de l'envie pressante que nourrissent certaines parties de mettre la main sur notre pays. Leurs besoins énergétiques croissants pour la période à venir et la présence «inquiétante» des Chinois dans la région, notamment dans le secteur du pétrole et du gaz, les obligeraient à intervenir pour reconfigurer une réalité qui ne leur est pas, pour l'instant, très avantageuse. La guerre préfabriquée de la Libye et celle décidée pour le Mali (où elle n'est pas encore finie malgré les promesses de Hollande d'en finir rapidement) n'en sont, malheureusement, que des exemples très significatifs. Pour arriver à leur fin, poursuivent les tenants du discours en question, ces parties feront bouger des jeunes du Sud qui, sous le poids du chômage et à cause de leur oubli par les autorités, constituent une véritable poudrière dans laquelle une seule allumette suffirait à tout faire exploser.
Pour les tenants de ce discours, le changement découlerait donc d'une décision «extra-utérine», loin des centres de décision nationaux habituels. La CIA préparerait (à côté d'autres organismes) la subversion et la formation de jeunes blogueurs pour déstabiliser le pays, ainsi que le soulèvement des jeunes du Sud...
Pour les seconds, l'injustice, la corruption et la gestion défaillante des affaires du pays sont les ingrédients qui poussent au changement. Que cela provienne des chômeurs du Sud, des enfants de Bab El Oued comme en 1988, de Tizi Ouzou ou de Sidi Bel Abbès, cela n'a point d'importance du moment que la misère est vécue par tous de la même manière et que la déception de tous est identique. Il n'est point besoin, soutiennent-ils, de la CIA pour faire bouger les choses, il y a tellement de misère que la CIA pourrait prendre ses prétextes chez nous et les faire valoir ailleurs.
Devant cette inexorabilité du changement, la perception des réactions chez les uns diffère de celle des autres. En effet si, pour certains, il est primordial de se mobiliser autour du pays pour faire face au danger qui vient de l'extérieur, pour d'autres, au contraire, il ne faut surtout pas renforcer le régime en place et laisser plutôt venir le changement pour que l'on essaie autre chose que ce que nous essayons inutilement et inefficacement depuis un demi-siècle.
Les symptômes d'une guerre invisible
Tout observateur de notre scène politique aura compris que les deux discours ne sont en fait que les effets visibles d'une «guerre» de clans qui tentent, chacun à sa manière et chacun de son côté, d'imposer leur point de vue quant à ce que sera l'année 2014 et même l'après-Bouteflika.
Il ne sert à rien de se voiler les yeux en effet. Une lutte en hauts lieux est menée. On le sent depuis déjà quelque temps. Elle aurait sans doute pour objet la réécriture de la Constitution et les élections de 2014, c'est-à-dire la gestion future du pays. Il n'y a qu'à voir les chamboulements vécus par la scène politique nationale pour s'en rendre compte.
Il y eut la déstabilisation de certains partis comme le MSP suite à quoi, il y eut la création et la promotion soutenue de TAJ qui, sans que personne ne comprit pourquoi ni comment, se retrouva sur les plus hauts sommets de la scène nationale avant de voir, sans explication non plus, son ascension stoppée net.
Ensuite, il y eut ces appels à la destitution des responsables du FLN et du RND qui se transformèrent en redressements avant d'emporter effectivement les deux hommes. Ces départs ne sont pas et ne peuvent pas être innocents ou désintéressés.
Aucun candidat ne s'est manifesté
Ouyahia est bien parti sous la pression d'un clan qui, connaissant ses chances, veut l'écarter de toute course à la présidentielle. Homme du système, Ouyahia n'a pas tardé à saisir l'importance de la chose et c'est pour cela qu'il n'a pas fait de résistance, car lorsque quelqu'un a travaillé une vie durant pour accéder à un poste, ce n'est pas la danse d'octogénaires affaiblis ou, encore moins, les gesticulations enrouées de quelques adhérents sans carte qui le feraient s'effacer. Comme riposte de l'autre côté, nous eûmes droit au départ, au forceps, d'un Belkhadem qui, trop naïf, ne comprenait pas ce qui lui arrivait et qui, jusqu'à la fin, avait cru que son appartenance allait lui éviter la sortie. Nous n'en sommes qu'à une année de l'élection présidentielle et, aussi bizarrement que cela puisse paraître, nous ne voyons pointer aucun bout de nez de candidats. L'arène politique serait-elle à ce point minée. Même la fameuse révision de la Constitution n'est pas encore entamée. Mathématiquement, il ne reste plus de temps, mais comme dans ce genre de situation, ce n'est pas le temps qui fait tant la contrainte, mais plutôt la contrainte qui fait le temps, certains ministres comme Ould Kablia, par exemple, seraient bien arrivés à déclarer que tout se fera dans les temps!
Par ailleurs, cette lutte, qui dure depuis quelque temps, semble difficile à gagner pour les uns ou les autres. Aussi bien le FLN, que le RND demeurent jusqu'à présent sans responsable. La main qui tire les ficelles doit être multiple dans cette lutte où l'essentiel pourrait être, sinon la neutralisation de l'autre, du moins la réduction de sa sphère d'influence, dans le genre «tu me tiens par la barbiche, je te tiens par la barbiche». Au rythme où vont les choses, il ne serait pas plus sage d'écarter l'éventualité d'un retour de Ouyahia au RND et, comme conséquence, celui de Belkhadem au FLN.
Ce sont ces symptômes, d'une lutte beaucoup plus profonde, que se disputent ceux qui crient à la déstabilisation par l'extérieur et ceux qui chantent le changement de l'intérieur. Chacun brandit la menace qui lui sied, et l'arme qui va le plus avec, dans ce duel qui engage l'avenir de l'Algérie. Dans tout cela, le citoyen ne semble bon qu'à apeurer avec des menaces ou à affoler avec des inquiétudes dont il se passerait volontiers.
Au moment où le dangereux concept du «printemps arabe» détruit des pays et anéantit des peuples, notre pays se trouve dans une situation sensible. Très sensible même. Une guerre à nos portes, deux pays voisins déstabilisés, un troisième qui ne nous porte pas beaucoup dans son coeur. Ajoutez à cela un président qui affirme ne pas briguer de quatrième mandat avec tout ce que cela aura comme répercussions sur les appétits, légitimes ou non, des uns et des autres. Il n'est pas facile de dire sur quoi nous allons aboutir, mais toujours est-il que le changement sera cette fois de la partie car quelle que soit l'issue du bras de fer dont on entend le bruit et sent l'odeur, on sait à l'avance qu'il sera impossible de gouverner le pays comme il l'a été jusque-là.


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