Algérie

Louisa 18eme partie



Louisa 18eme partie
Résumé : Louisa débarque à Paris après un voyage houleux. Elle est tout de suite déçue par l'accueil de sa belle-famille, et surtout par les lieux où ils habitaient. Na Daouia se vantait pourtant du confort parisien. Sa belle- mère lui reproche d'avoir l'esprit encore au bled.
Au bled' ' Mais au bled, je faisais ma vaisselle dans la grande cour, j'avais de l'espace à en revendre.
Je tentais tant bien que mal de nettoyer ces 'tonnes' d'assiettes disposées devant moi à même le sol. Une fois la vaisselle terminée, je préparais le café sur un réchaud que Na Daouia alluma elle-même et fièrement avec un briquet qu'elle brandira devant moi avant de
lancer :
-Ici, ce n'est plus les allumettes..Tu vas apprendre à utiliser ce briquet. Il suffit d'appuyer sur ce bouton, et fais attention, il ne faut pas que tu te brûles les doigts'
Je pris le briquet et me mit à jouer avec le ressort. La flamme jaillit. C'était un jeu d'enfant. Je me mets à rire. Na Daouia avait rejoint ses invités'Je prépare le café que je sers avec des mains tremblantes.
-Tu es fatiguée Louisa, me dit mon beau-père, d'un air compatissant. Va donc te reposer ma fille.
-Tu n'y penses pas L'hocine, lui reproche ma belle-mère'.Comment va-t-elle se reposer, alors que nos invités sont encore là. Et puis je voulais lui demander de leur prévoir l'avenir, n'est ce pas Louisa ' Tout le monde veut tester tes dons de voyance.
Je jette un regard suppliant à mon mari. Kamel s'insurge :
-Mère tu sais bien que nous venons d'arriver. Le voyage a été long et fatigant'.Louisa n'est pas d'aplomb aujourd'hui pour la voyance'
-Ah ! Et pourquoi ne le dit-elle pas elle-même' 'Elle a perdu sa langue et emprunté la tienne' '
Je sentis la gêne me gagner'.Je ne voulais pas mettre Kamel dans l'embarras. Ma belle mère n'était pas la femme qui venait chez moi au bled. Deux heures à peine après mon arrivée, je découvrais l'être acariâtre qui se cachait en elle.
Je porte une main à ma tête. Un vertige violent et tenace menaçait de m'engloutir.
-Je suis désolée, le voyage m'a fatiguée. Je vous promets la voyance pour plus tard, mais ce soir il m'est impossible de me concentrer.
Un vieil homme que je ne connaissais pas ébauche un sourire qui dévoile ses gencives édentées.
-Je te comprends ma petite. Moi aussi le voyage m'avait fatigué lors de mon premier débarquement à Paris.
-À t'entendre parler, on dirait que tu as voyagé toute ta vie, lance ma belle-mère d'une voix où perçait l'ironie, alors que tu n'es plus reparti au bled voici plus de quarante ans.
-Mais j'ai tout de même vadrouillé'
- Oui dans les usines et les mines quand ce n'est pas dans les bistrots'.Arrête tes balivernes Arezki'.Ma belle-fille est jeune, et ce n'est pas un premier voyage qui va l'user.
Je tentais de protester encore une fois. Na Daouia lève alors la main pour m'indiquer ma chambre :
- Va te coucher'Dès demain, je vais organiser tes journées.
Je me retire dans la pièce aux murs lézardés et sales où un matelas était disposé sur une banquette étroite'Je me laisse tomber dessus, en ayant une pensée pour mes vieux parents et pour mon village.
Deux longues larmes roulèrent encore sur mes joues. Mon père. Ma mère. Aïssa 'Ils sont si loin de moi'.L'exil '.Paris'.Mon destin'.
Je m'endormis harassée.
Je rêvais que j'étais sous une cascade d'eau glaciale. Un vent me faisait frissonner. J'émergeais de mon sommeil. Pendant quelques secondes, j'eus du mal à retrouver mes esprits. Où me trouvais-je donc '
Des gouttes d'eau tombaient du plafond et suintaient des murs'J'étais bel et bien à Paris !
Je tente de tirer la vieille couverture usée sur mes jambes'Mais un coup frappé à ma porte suspend mon geste.
Louisa'.Petiteparesseuse'Qu'attends-tu donc pour te lever.. ' Nous sommes presque à la mi-journée.
La mi-journée'Ce n'était pas possible'Il faisait noir comme dans un four.
Kamel dormait à poings fermés. On était dimanche'Il ne devait reprendre le travail que le lendemain.
J'ouvris la porte de notre chambre pour me retrouver nez à nez avec ma belle-mère. Cette dernière les mains sur les hanches me toisa d'un air hautain :
-Tu consens enfin à sortir de ta couche' '
-Je pensais qu'il faisait encore nuit.
- À Paris, il fait nuit même en plein jour'.Tu connaîtras bientôt le froid et la neige de l'Europe'.
-J'ai l'habitude de me lever avec le chant du coq, Na Daouia'.Je crois que c'est cette grisaille qui me perturbe.
(À suivre)
Y. H.




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