Algérie

Lorsque la magie s'en mêle



L'association «miracle des arts» basée à la maison des jeunes Saadi de la cité Filali, en collaboration avec une société de communication audiovisuelle, a organisé lundi, au centre culturel français, une conférence-débat sur le fléau socioculturel de la sorcellerie avec la projection du film «El-Manaa» du jeune réalisateur constantinois M.F. Delmi. L'histoire de cette production, tirée de faits réels, décrit les dégâts causés par ce phénomène qui grangrène la société algérienne. Le réalisateur du film à voulu, dit-il, transmettre un message de mise en garde de la société contre cette pratique obscurantiste qui plonge ses racines loin dans l'histoire et qui ne cesse encore de se propager dans notre société contemporaine, véhiculée par des charlatans attirés par l'appât du gain et favorisée par l'ignorance et le niveau de culture des citoyens.

En l'absence d'études accomplies, de recherches bien menées et de spécialistes de la question, ce thème ne fut qu'effleuré au cours d'un débat qui fut le seul apanage du panel d'universitaires invités. A travers les interventions des psychologues et de sociologues de l'université Mentouri et en l'absence des représentants du secteur religieux, les participants au débat ont pu avoir quelques repères historiques sur le sujet ainsi que des réponses tout à fait personnelles aux nombreuses questions posées, notamment celle de pourquoi tant d'Algériens de toutes conditions sociales et de niveaux intellectuels assez élevés tombent facilement dans le monde de la sorcellerie ? Certains chercheurs ont pour leur part associé l'exorcisme (rokia) à la magie et la sorcellerie. Mais d'autres intervenants ont placé cette pratique de la rokia dans son contexte religieux et social. Dans la foulée, il a été évoqué la pratique de la «nechra» assez répandue dans la région de Constantine et dont les origines peuvent remonter jusqu'à l'époque romaine. Mais en intervenant pour expliquer que cette pratique de la nechra n'a rien à voir avec la sorcellerie, un autre chercheur, s'appuyant sur les problèmes vécus par le personnage du film, a estimé que notre société, notre culture issues d'un monde où la magie est omniprésente ont connu une mutation ambiguë et se trouvent aujourd'hui dans une situation où le rationnel et l'irrationnel se côtoient. Aussi, dira-t-il, il peut arriver à n'importe qui, qu'il soit intellectuel ou ignorant, de basculer facilement dans l'irrationnel. A cette étape du débat, l'assistance qui s'attendait à des statistiques qui situent l'ampleur du phénomène dans la société constantinoise, et à ce que l'on évoque ses nombreuses facettes et sa traduction sur le terrain par des actes condamnables qui ont souvent défrayé la chronique constantinoise (les crimes et méfaits commis par des charlatans qui se déclarent raki, l'exhumation de cadavres pour satisfaire à des sortilèges, etc.), sont restés sur leur faim : les chercheurs, tous enseignants à l'université, ont déclaré qu'ils n'ont aucun chiffre à donner pour la bonne raison qu'ils sont encore au stade de la... recherche et que cette dernière est très complexe. Pourquoi ce besoin de recourir à la magie ? a-t-on demandé. Un chercheur répond que c'est le plus souvent la situation socio-psychologique (mal-vie, état psychique et affectif, chômage, problèmes familiaux, etc.) qui poussent l'individu vers l'irrationnel. Mais cette réponse reste quand même sujette à caution, affirme-t-il, car la sorcellerie et son corollaire la magie sont un phénomène éminemment social, impossible à quantifier, comme l'ont déclaré, avant lui, ses collègues.




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