Cet article s’interroge sur la vulnérabilité du littoral algérien aux tsunamis engendrés par les séismes. Une analyse de la sismicité historique (Harbi et Maouche, 2009) fournit un premier élément de réponse. Trois séismes auraient ou ont généré des tsunamis : Jijel 1856, Orléansville 1954, El Asnam 1980. Plus proche de nous, celui de Zemmouri (2003) est à l’origine d’un tel évènement mais de faible ampleur.
Nous avons recherché les autres éléments de réponse dans l’analyse des formations quaternaires (Holocène) dans des sites qui, en raison de leur configuration, auraient conservés les traces de dépôts de paléotsunamis. C’est le cas du site d’El Kaddous (Aïn Taya, Est d’Alger) : un marécage côtier isolé de la mer par un cordon dunaire de plus de 5 m de haut.
Des sondages, réalisés (sur une profondeur de 5 m) dans les dépôts récents de ce site, montrent des argiles silteuses à faune d’eau saumâtre en coquilles entières, depuis au moins 4000 ans. Une excavation sur environ 1 m de profondeur complète les informations de la partie sommitale de ces sondages. Le matériel y est identique au précédent. Toutefois la dernière séquence, ravinante, apparaît en rupture avec tout ce qui la précède. Le matériel est chaotique, totalement désorganisé, très hétérogène. Il comporte, des galets provenant du démantèlement de la séquence précédente, une concentration anormale de coquilles entières et de coquilles fragmentées d’une faune d’eau saumâtre mais surtout, une importante fraction d’une faune allochtone marine (40% de la faune totale).
C’est un évènement unique au cours de ces 4000 dernières années, perturbateur, catastrophique, exceptionnel par son arrivée brusque, son contenu. Pour toutes ces raisons, nous l’interprétons comme un paléotsunami généré par un séisme, dans un intervalle d’âge compris entre 1680-1810 AD sur la base de datations au C14 que nous avons effectuées. Il pourrait être corrélé avec l’un des deux événements sismiques majeurs répertoriés dans le catalogue des séismes historiques algériens, celui du 03/02/1716, ou celui du 06/05/1773.
Une investigation similaire sur le littoral de Jijel (2009), montre dans la Plaine d’El Mencha (15 km à l’est de la ville) deux niveaux de 20 cm d’un sable fin riche en faune marine intercalés dans un ensemble de sable fin fluviatile continental . Ils pourraient trouver une explication dans des apports par des paléotsunamis.
Nous avons là, quelques éléments de réponse. Les côtes algériennes ont été affectées par des paléotsunamis au cours de périodes très proches de nous. C’est aujourd’hui un risque naturel, qu’il faut intégrer dans nos schémas d’aménagement. Ce travail est préliminaire, mais c’est un axe de recherche qu’il convient de développer par une plus large et minutieuse investigation, à l’instar de ce qui se fait dans les autres pays de la rive nord de la Méditerranée.
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Posté Le : 08/05/2021
Posté par : einstein
Ecrit par : - Larara Malika - Nedjari Ahmed - Maouche Saïd - Benhamouche Azzedine - Meghraoui Mustapha
Source : Bulletin du Service Géologique de l'Algérie Volume 23, Numéro 3, Pages 241-251