Algérie

Littérature africaine dans le monde La résistance à la dépossession


Littérature africaine dans le monde La résistance à la dépossession
Publié le 31.10.2023 dans le Quotidien Le Soir d’Algérie

«Afrique, conscience et empreintes», une rencontre focalisée sur la présence de la littérature africaine dans le monde, a été animée, samedi à Alger dans le cadre du 26e Sila, par des académiciens et universitaires qui ont mis en valeur l'affirmation du discours autochtone africain devant le regard réducteur et colonialiste de ses prédateurs.
Organisée à l'espace «Afrique», cette rencontre a vu l'intervention du professeur de littérature comparée à l'université de Annaba Abdelmadjid Hanoun, de l'enseignant universitaire à Alger II Wahid Benbouaziz et de l'académicien et enseignant à l'université Mohand-Oulhadj de Bouira, Mustapha Ould Youcef.
Faisant remarquer d'emblée qu'il existe «plusieurs littératures africaines» de par la «diversité culturelle et linguistique» que recèle ce grand continent, le professeur de littérature comparée Abdelmadjid Hanoun a relevé l'«inadaptation des méthodes d'étude appliquées jusque-là», basées sur une vision purement colonialiste qui «ne voyait la littérature africaine que par le véhicule linguistique de l'occupant», ajoutant qu'il convenait de «changer d'approche académique» qui devrait se porter sur la notion de «pluralité littéraire africaine».
Le professeur à l'université de Annaba a abondé dans le même sens en donnant l'exemple de l'«étude et l'analyse de la mémoire», un des nombreux aspects révélateurs, s'ouvrant sur une étude comparative pertinente qui établit clairement la pluralité culturelle en Afrique, car se déclinant «en plusieurs champs d'études. Les mémoires sont plurielles : familiale, tribale, nationale et humaine».
Dans une intervention tournée sur l'Histoire de l'Afrique sous le joug colonial, l'universitaire Wahid Benbouaziz est d'abord brièvement revenu sur la perception de l'Africain de sa condition d'être colonisé et réduit en esclavage, et l'évolution de son rapport à ses bourreaux, jusqu'à l'apparition de la Négritude, mouvement littéraire qui avait alors décidé d'assumer entièrement cette vision péjorative et réductrice du conquérant occidental, dès lors qu'elle établissait clairement la différence entre «l'homme nègre» et «l’homme occidental».
Le conférencier a ensuite enchaîné en mettant à nu les stratégies d'alliance datant du XIXe siècle, du capitalisme avec le sionisme pour la création d'une force prédatrice politico-économique qui allait permettre pendant longtemps l'exploitation, en toute impunité, des richesses et des réserves naturelles de l'Afrique.
Wahid Benbouaziz a ensuite fait remarquer qu'il était «nécessaire de connaître les relations géopolitiques d'antan, pour mieux comprendre les enjeux d'une écriture littéraire africaine pro-capitaliste», évoquant quelques auteurs qui ont dénoncé ces stratégies de circonstances, à l'instar du Kényan Ali Al'amin Mazrui, du Camerounais Achille Mbembe, ou encore du Congolais Alain Mabanckou.
L'académicien et universitaire Mustapha Ould Youcef a d'abord rappelé que le regard de l'Europe sur l'Afrique a «de tous temps été anthropologique et non culturel» et que les écrivains africains qui s'expriment dans les parlers locaux «ne pouvaient pas atteindre l'universalité», contrairement à ceux qui «choisissaient la langue de l'occupant».
L'intervenant a également relevé que la littérature africaine s'exprimant dans la langue de l'autre avait accès à l'«impression, aux distinctions et à un lectorat plus large», faisant remarquer enfin, que la littérature africaine contemporaine a réussi à s'extraire du sentiment d'infériorité qui l'habitait, au regard de tous les prix littéraires obtenus de par le monde, dans le Nobel. Malgré leur choix de s'exprimer dans les langues occidentales, ces auteurs tenaient dans leurs œuvres un discours autochtone tourné vers l'Afrique, vers sa culture et donc vers ses littératures.

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