Je me retrouve par hasard coincé dans ma ville qui, le soir, plonge dans un univers parallèle où les magasins se réduisent à quelques rideaux baissés éclairés par des néons qu'on a oublié d'éteindre. A cette heure-ci chaque lampadaire représente un minuscule phare urbain, éclairant, de part et d'autre, des îlots d'âmes oubliées errant sur un bitume malmené par les travaux du tramway qui nous promet de nous mener vers l'ailleurs plus vite. Quelques groupes déambulent, près des escaliers qui mènent aux toilettes publiques, fermées le soir, à proximité des machines à saouls vomissant les retardataires. Oubliant que le mot « espoir » n'a plus qu'une consonance abstraite. Dans leurs chemises crades ils tuent le temps par habitude, n'ayant plus que la nuit comme refuge. D'où viennent-ils ' Ces individus qui attendent, sous ce qui reste des abribus, un transport qui ne viendra jamais. Ces hommes qui disparaîtront dès que pointe l'aurore, ne sont nullement concernés par le film insultant l'islam et son prophète, ni par les caricatures d'un journal… Eux, ils habitent le désespoir et n'ont même pas la force de lever les bras vers le ciel pour prier… Pourtant ils ont le même âge que ces jeunes en uniforme, postés devant les édifices qui font la décision.
De temps à autre quelques ados en grappes silencieuses hument leur colle, au milieu de cette foire nocturne, jouant dans le théâtre de la folie. Ils jouent leurs représentations chaque soir, au ralenti, loin des applaudissements du discours officiel et des spectateurs cloisonnés dans leurs poulaillers fermés à double tour.
Le service de nettoyage, au petit matin, s'occupera de faire disparaitre toute trace, nettoyant la scène pour les prochains acteurs. Les vrais! Ceux qui existent dans les listes électorales et les registres d'état civil bourrés de fautes. Ceux qui s'amusent à interpréter approximativement des rôles de citoyens et qui émargent sur des pointeuses pour recevoir, chaque fin de mois, leur part de rente.
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Posté Le : 22/09/2012
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : El Guellil
Source : www.lequotidien-oran.com