La France veut-elle effacer ses traces dans le crime contre la Libye commis en 2011 ' Certes, s'il ne faut surtout pas soupçonner l'actuel locataire de l'Elysée d'avoir trempé dans la conspiration internationale qui a réduit presque à néant un pays économiquement fort, même s'il était dirigé d'une poigne de fer. Le président français Emmanuel Macron en organisant ce mardi un second sommet pour une sortie de crise en Libye, après celui de juillet dernier, qui n'a pas donné de résultats, car appuyé sur une stratégie qui met de facto les voix les plus représentatives de Libye hors jeu, veut cette fois-ci avoir le quitus international pour organiser une sorte de ‘'paix des braves''.Un plan qui ne sera pas totalement soutenu par les forces les plus influentes en Libye, car axé sur une sorte de pacification menée au pas de charge, alors que l'essentiel de la crise libyenne post-Kadhafi est ailleurs. En fait, et contrairement aux pays voisins, dont l'Algérie, l'Egypte et la Tunisie, Paris veut avoir tout de suite et avec n'importe quels moyens des institutions élues, mais sans passer par la base, celle qui voudrait qu'il y ait un large consensus politique, une réconciliation nationale entre toutes les forces vives libyennes. Les Nations unies ont bien soutenu ce principe défendu par l'Algérie, celui de la mise en place avant tout processus électoral d'une véritable réconciliation politique, sociale et ethnique entre les Libyens, les chefs de tribu et les seigneurs de la guerre.
L'activisme français avant et après la chute du régime de Mouamar Kadhafi est déprimant, sinon cache mal des arrière-pensées pas tellement philanthropiques, encore moins pour soulager le peuple libyen et le sortir d'une situation de chaos social et politique, celle en réalité qu'avait provoquée l'ex-président français Nicolas Sarkozy, dans le sillage du printemps arabe, en prenant la tête d'une coalition internationale pour liquider le régime de Kadhafi. Aujourd'hui, un autre président français veut aider les Libyens, non pas à reconstruire leur pays, mais à s'entendre pour élire un président, le favori, bien sûr, de Paris. En toile de fond de cette initiative diplomatique française se cachent d'autres objectifs. Pour la France, comme pour l'Italie, l'ancienne puissance coloniale, l'Allemagne également, il s'agit surtout de faire en sorte que ce pays, la Libye, n'exporte plus vers la rive nord de la Méditerranée des milliers de migrants, ne soit plus un terreau fertile pour toutes les franchises terroristes à moins d'une demi-heure de bateau de l'Europe et une menace franche contre sa sécurité.
Le message est clair, d'autant que cette posture de Paris est à contresens de toute la démarche menée jusque-là par les pays voisins de la Libye et de l'ONU : arriver à consolider un dialogue entre les différentes forces politiques et militaires en Libye, puis entamer le long et difficile processus de réconciliation nationale dans un pays où la puissance des tribus n'est pas une vue de l'esprit. Enfin, la démarche de Paris pèche par un excès de précipitation et s'est attiré les critiques de forces influentes dans les grandes villes libyennes, en accordant un soutien à un homme aux ambitions démesurées et fortement contesté dans la majeure partie du pays.
En fait, la France tente un coup de force là où les choses se négocient calmement, pas dans la précipitation, alors que le poids des décisions des tribus de Cyrénaïque ou de la Tripolitaine est important. Et si les Libyens ont besoin de l'argent et de l'influence de la France, ils regarderont ailleurs pour entamer leur lente sortie de crise.
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Posté Le : 29/05/2018
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Mahdi Boukhalfa
Source : www.lequotidien-oran.com