Forts du soutien décisif des frappes aériennes ciblées de la coalition
internationale, les insurgés libyens ont réussi hier dimanche à reprendre le
contrôle de plusieurs villes stratégiques sur la côte et mis en déroute les
troupes du régime du colonel Mouammar Kadhafi.
Les événements en Libye tournent carrément à l'avantage de l'opposition,
alors que des informations font état de la défection de plusieurs responsables,
militaires et civils, qui sentent l'arrivée de la fin du régime de Kadhafi. Sur
le plan diplomatique, les efforts se poursuivent pour trouver une solution
rapide au conflit avec, bien entendu, le départ de Kadhafi. A la veille de la
réunion à Londres du groupe de contact, l'Otan se préparait à prendre le
commandement de toutes les opérations militaires en Libye. L'Alliance
atlantique a déjà pris en charge l'embargo sur les armes en Méditerranée et la
zone d'exclusion aérienne au-dessus de la Libye, mais il reste à négocier le
point le plus sensible: la coordination des frappes au sol destinées à anéantir
les capacités de l'armée du colonel Kadhafi.
Les ambassadeurs des 28 pays de l'Otan devaient se réunir pour en parler
dimanche en fin d'après-midi. Les divergences sont grandes au sein de
l'Alliance où toute décision requiert un consensus de ses membres, même si
Washington part du principe qu'un accord sera trouvé.
Aider l'insurrection à prendre le pouvoir
La Turquie, seul pays musulman du bloc, s'est jusqu'à présent opposée aux
frappes. L'Allemagne, qui s'est abstenue à l'ONU sur la résolution 1973, est
opposée au principe de l'intervention militaire. C'est dire les grandes
divergences qui laminent l'Otan sur cette intervention militaire.
Les ministres des Affaires étrangères de plus de 35 pays ont déjà
confirmé leur participation à la réunion mardi à Londres du groupe de contact
politique sur l'opération militaire en Libye, selon le ministère britannique
des Affaires étrangères. «Les ministres des Affaires étrangères de plus de 35
autres pays ont déjà confirmé leur présence», aux côtés de la secrétaire d'Etat
américaine Hillary Clinton et du secrétaire général des Nations unies Ban
Ki-Moon dont la venue avait été annoncée dernièrement, a précisé le Foreign
Office.
Le président de la Commission de l'Union africaine Jean Ping assistera
également à cette réunion, a indiqué le ministère. Cette réunion du groupe de
contact, qui devrait prendre le pilotage politique de l'opération en Libye, va
mettre sur pied «un large groupe» de pays, «qui s'efforcera d'assurer un
soutien à long terme au peuple libyen, y compris en terme d'aide humanitaire et
(...) dans sa transition vers l'avenir».
Pour autant, l'objectif militaire de l'intervention en Libye n'est pas le
renversement du colonel Mouammar Kadhafi car tout «changement de régime» est
«très compliqué» à mettre en oeuvre, a affirmé dimanche le secrétaire américain
à la Défense Robert Gates. Cette déclaration vient au moment où le président
Barack Obama ainsi que d'autres dirigeants occidentaux ont appelé, à de
nombreuses reprises, le colonel Kadhafi à «partir», mais cet objectif ne figure
pas dans le mandat confié aux forces de la coalition internationale par les
Nations unies.
«C'est la différence entre une mission militaire et un objectif
politique», a ensuite expliqué le secrétaire à la Défense lors de l'émission
«Face the Nation» sur la chaîne CBS.
Brega, Ras Lanouf et Ben Jaweb aux mains des insurgés
Sur le terrain, les insurgés libyens avançaient vite dimanche vers
l'ouest, en direction de Syrte, la ville natale de Mouammar Kadhafi, profitant
de la débandade de ses forces affaiblies par les frappes de la coalition
internationale. Dimanche matin, le terminal pétrolier de Ras Lanouf, dans
l'est, était aux mains des insurgés qui en avaient repris le contrôle. Ce
village est situé à 210 km à l'ouest d'Ajdabiya, carrefour stratégique repris
samedi par l'opposition.
«Il y a eu un peu de résistance à
l'aube mais ils se sont retirés», a raconté un insurgé de 35 ans, Attia Hamad.
Les forces pro-Kadhafi se replient
en direction de Syrte, à 200 km plus à l'ouest, le long d'une côte plate et
désertique difficile à défendre sans aviation ni artillerie lourde.
Selon une habitante de Syrte jointe par téléphone, la ville a été
pilonnée toute la nuit par des frappes aériennes qui ont provoqué des dégâts
considérables. «La ville est devenue une boule de feu», a-t-elle déclaré,
précisant que la plupart des habitants, terrifiés, avaient fui dans le désert.
La coalition a aussi mené des raids aériens intensifs sur la route
côtière entre Ajdabiya et Syrte. «Les frappes aériennes (sur Syrte) ont
continué pendant des heures et des heures, sans arrêt», a déclaré dans la nuit
un porte-parole du régime. Plus à l'ouest, Misrata, troisième ville du pays à
mi-chemin entre Tripoli et Syrte, était toujours soumise samedi à un «pilonnage
intensif» des forces pro-Kadhafi, selon un porte-parole des insurgés à leur
siège à Benghazi qui a appelé à l'aide. Un médecin de Misrata a déclaré que 117
personnes avaient été tuées depuis le 18 mars dans cette ville aux mains des
rebelles mais assiégée par les pro-Kadhafi. Samedi, la reprise d'Ajdabiya, à
160 km au sud de Benghazi, et du site pétrolier de Brega, à 80 km plus à
l'ouest, avait constitué la première victoire des insurgés depuis le début de
l'intervention militaire de la coalition internationale le 19 mars, inversant
la tendance après une longue reculade et une semaine de stagnation. Dimanche,
c'est la localité de Ben Jawad, à une cinquantaine de kilomètres à l'ouest de
Ras Lanouf (est), qui avait été reprise par les insurgés. Ben Jawad, qui avait
été la position la plus avancée de l'opposition de l'Est libyen lors de leur
première poussée vers l'ouest début mars, avait été reprise par les forces
fidèles au colonel Mouammar Kadhafi le 6 mars.
Les combats avaient alors fait au moins 12 morts et plus de 50 blessés,
et marqué le début de la contre-offensive du régime, dont les troupes étaient
arrivées jusqu'aux portes de Benghazi, siège de l'opposition, le 19 mars avant
d'en être chassées par les frappes de la coalition internationale. Les insurgés
ont expliqué avoir profité des frappes aériennes françaises sur Ben Jawad à
09H00 (07H00 GMT) pour prendre l'avantage.
Les carcasses de chars détruits lors de ces frappes étaient visibles, et
les rues résonnaient des tirs de joie d'insurgés.
Un groupe d'insurgés a ensuite repris la route vers l'ouest, en direction
de Syrte, la ville natale du colonel Kadhafi, à 150 km de là. «Les forces de
Kadhafi sont effrayées. (Certains) ont abandonné leurs armes et uniformes, et
sont vêtus en civil», a déclaré à l'agence AFP Mohammed Ali el-Atwish, un
insurgé de 42 ans.
Concernant les combattants pro-Kadhafi faits prisonniers, il a expliqué:
«S'ils sont Libyens, nous les enverrons en prison puis les renverrons dans
leurs familles. Si ce sont des mercenaires, ils seront jugés. Nous ne torturons
pas nos prisonniers, notre religion nous l'interdit».
1.250 sorties depuis le début des frappes aériennes
Le rythme des opérations aériennes menées par la coalition en Libye n'a
pas faibli samedi avec 160 sorties recensées contre 153 la veille, a annoncé le
Pentagone.
Les deux-tiers des missions (96) ont concerné des opérations de frappes
aériennes, le reste étant des sorties destinées à faire respecter la zone
d'exclusion aérienne, selon des données courant sur les opérations des 24
dernières heures arrêtées samedi à 19H30 GMT et rendues publiques par le
ministère américain de la Défense. Les missions d'interdiction aérienne doivent
être transférées dans les jours à venir à l'Otan tandis que la protection des
populations civiles, qui implique des frappes au sol contre les forces
libyennes, reste aux mains des pays de la coalition. Depuis le 19 mars, date du
début des opérations militaires, la coalition a mené 1.257 sorties aériennes,
dont 540 concernaient des missions «de frappes».
Ces missions n'impliquent pas forcément le tir effectif de missiles ou de
largage de bombes contre des troupes au sol.
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Posté Le : 28/03/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Yazid Alilat
Source : www.lequotidien-oran.com