Le régime libyen vivrait-il ses dernières heures, sinon ses dernières semaines
après le ballet diplomatique déclenché ces derniers jours par le colonel
Mouammar Kadhafi ? A considérer la tournure des événements, tout concorde à
penser que le clan Kadhafi est actuellement en train de négocier une sortie de
crise «honorable». Un émissaire du gouvernement libyen avait poursuivi hier en
Turquie une tournée diplomatique pour gagner le soutien de trois pays de la
région à une solution de sortie de conflit en Libye, une initiative qui a reçu
un accueil mitigé de Rome et de Londres. L'envoyé de Mouammar Kadhafi, le
vice-ministre des Affaires étrangères libyen Abdelati Laabidi, est arrivé dans
la capitale turque pour des discussions, selon une source gouvernementale
turque. «Il y a des demandes faites à la Turquie provenant des deux parties
belligérantes», les forces fidèles au régime du colonel Kadhafi et les
insurgés, a souligné cette source, sous couvert d'anonymat. «La priorité de la
Turquie en Libye est l'établissement d'un arrêt des hostilités», a-t-on ajouté
de même source. Un diplomate de haut rang a affirmé que des représentants de
l'opposition pourraient aussi se rendre «prochainement» en Turquie pour évoquer
la possibilité d'une cessation des combats. Quant au Royaume-Uni, il ne
recherche pas une «stratégie de sortie» pour le colonel libyen Mouammar
Kadhafi, selon le porte-parole du Premier ministre britannique David Cameron.
«Nous avons toujours été clairs sur ce que devrait être la prochaine étape et
les besoins d'une véritable trêve et d'une fin des violences», a déclaré le
porte-parole lors d'un point presse régulier. «Nous ne recherchons pas de
stratégie de sortie pour Kadhafi», a-t-il ajouté, tandis que se multiplient les
informations de presse sur une possible négociation d'un départ du dirigeant
libyen.
La «pax Kadhafi»
Par ailleurs, deux des fils de Kadhafi ont étonné plus d'un lorsqu'ils
ont proposé à l'opposition, regroupée au sein du Conseil national de transition
(CNT), que Rome a reconnu officiellement hier une transition vers une
démocratie constitutionnelle qui prévoirait le retrait du pouvoir de leur père.
Selon le New York Times, citant un diplomate sous couvert de l'anonymat et un
responsable libyen informés du projet, la transition serait menée par l'un des
fils de Kadhafi, Seif al-Islam. Réponse immédiate du CNT: rejet total de cette
proposition. «Cela est complètement rejeté par le Conseil», a déclaré le
porte-parole du CNT, Chamseddine Abdelmoula, à Benghazi, fief de l'opposition
dans l'est de la Libye. «Kadhafi et ses fils doivent partir avant toute négociation
diplomatique», a-t-il affirmé. «Comment peut-on négocier alors qu'une arme est
braquée sur vous ?».
Mais selon le porte-parole du CNT, l'attitude de Seif al-Islam depuis le
début de la révolte, le 15 février, a montré que sa réputation d'homme de
changement est fausse. «Les gens pensent qu'il est un réformateur ; mais depuis
le déclenchement de la révolution, il a montré son vrai visage, il est une
copie de son père». D'après le Times, Seif al-Islam et Saadi
Kadhafi «veulent avancer pour faire changer le pays» sans leur père.
Brega sous «autorité des insurgés»
Les insurgés ont annoncé lundi qu'ils avaient repris la ville pétrolière
de Brega, objet d'âpres combats, contre les forces pro-Kadhafi. Ce site
pétrolier stratégique sur le golfe de Syrte est le théâtre de combats acharnés
depuis trois jours. Visiblement mieux organisés que les semaines passées, les
rebelles, épaulés par les raids aériens de la coalition internationale,
avancent plus prudemment et tiennent davantage leurs positions.
Après s'être emparés de l'Université du pétrole, un énorme campus à
l'entrée est de la ville, les insurgés avaient dû se replier dimanche sous le
feu des pro-Kadhafi. De fortes explosions ont résonné en provenance des
positions de ces derniers, tandis que des avions de l'Otan, dont les frappes
aériennes ont freiné ces derniers jours la contre-offensive des forces
loyalistes vers l'Est, survolaient la région.
A plusieurs centaines de kilomètres à l'Ouest, les affrontements se
poursuivent à Misrata, dernière grande ville de l'Ouest aux mains des insurgés.
Encerclés et cibles de bombardements, les rebelles affirment contrôler le
centre et le port, mais la pression des forces gouvernementales s'accentue. La
situation humanitaire est très préoccupante. Un navire-hôpital turc a pu
évacuer 250 blessés dimanche. Le bâtiment a été dépêché sur ordre du ministère
turc des Affaires étrangères et a passé quatre jours au large à attendre
d'avoir l'autorisation de mouiller dans le port, protégé par l'aviation de la
coalition, pour procéder aux évacuations. Les forces loyales au colonel Kadhafi
ont également tiré vendredi et samedi des dizaines de roquettes sur la ville de
Ketla, au sud-ouest de Tripoli, contrôlée par la rébellion, faisant plus d'une
trentaine de morts, selon des habitants de la ville.
Par ailleurs, certaines des victimes civiles tuées par erreur lors d'une
frappe aérienne de l'Otan vendredi près de Brega, seraient en réalité des
«infiltrés de Kadhafi», a affirmé dans une interview lundi Moustapha Abdeljalil,
chef de l'organe représentatif des insurgés. Interrogé par La Stampa sur cette
possible bavure de l'Otan, le chef du Conseil national de transition (CNT)
libyen a admis: «Il faut prendre ça en compte aussi et nous en sommes vraiment
désolés». «Mais je veux ajouter qu'après une enquête interne, nous avons
vérifié que les jeunes révolutionnaires victimes de tirs amis étaient en fait
des infiltrés de Kadhafi», a-t-il ajouté, sans préciser quelles étaient les
victimes considérées comme des infiltrés. Neuf insurgés avaient été tués dans
cette frappe de l'Otan, ainsi que les quatre occupants d'une ambulance, le
conducteur et trois étudiants en médecine de Benghazi, avait annoncé samedi
soir à la presse Abdoulhafiz Ghoga, un porte-parole de la rébellion à Benghazi,
le bastion des insurgés dans l'est de la Libye.
«Bye bye America»
Les Etats-Unis ont accepté, à la demande de l'Otan, de mener des frappes
en Libye jusqu'à lundi en raison «du mauvais temps récent», a annoncé dimanche
le Pentagone. «En raison du mauvais temps récent en Libye, les Etats-Unis ont
répondu positivement à la demande de l'Otan de prolonger leurs frappes»
aériennes jusqu'à lundi, a expliqué le Pentagone. L'armée américaine avait
prévu de retirer ses avions de combat et ses missiles Tomahawk du théâtre des
opérations à partir du week-end, ses alliés de l'Otan ayant pris ces opérations
en main jeudi. Elle ne devait plus fournir désormais que
des avions destinés à effectuer des ravitaillements en vol et effectuera
des missions de brouillage et de surveillance. Jusque-là, les Américains
effectuaient «en moyenne 50% des quelque 70 sorties quotidiennes de
bombardement, a indiqué un responsable militaire. «Donc, pour compenser les
moyens américains qui vont manquer, les pays concernés vont devoir notablement
multiplier les sorties et déstocker plus de munitions», a-t-il résumé. Selon un
communiqué de son Commandement à Naples, entre le 31 mars 08h00 GMT et le 3
avril 22h00 GMT, l'opération Protecteur unifié a effectué quelque 276 sorties
de bombardement - qui incluent des raids destinés à identifier les cibles
potentielles et n'occasionnent en réalité qu'un nombre bien inférieur de
frappes.
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Posté Le : 05/04/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Yazid Alilat
Source : www.lequotidien-oran.com