Les combats entre forces pro Kadhafi et insurgés faisaient rage hier près
de villes pétrolières, que les deux camps veulent prendre, alors que l'aviation
de la coalition internationale n'a pas effectué de bombardements depuis samedi
soir. Après avoir reculé vers l'est en début de semaine sous la pression des
forces pro-Kadhafi, les insurgés libyens ont semblé regagner du terrain depuis
vendredi soir, avec l'aide de frappes de la coalition. Samedi en fin
d'après-midi, les combats se poursuivaient autour de Brega, où il était impossible
de savoir qui contrôlait quoi. Les rebelles assuraient toujours tenir les
installations pétrolières, tout en les prenant pour cible.
Brega: l'imbroglio
Mercredi et jeudi déjà, de violents combats avaient eu lieu autour de
Brega. Huit membres de deux familles différentes ont péri dans le hameau
d'Argoub, au sud de la ville, a indiqué le Dr Issam Abou Harba, urgentiste à
l'hôpital d'Ajdabiya, plus à l'est. Les circonstances de leur mort restent
obscures. «Mais ce qui est sûr, c'est que les soldats de Kadhafi se cachent
parmi les maisons pour échapper aux raids aériens», dit-il. «J'ai appelé hier
un habitant de Brega: il m'a dit que des pick-up pleins de soldats avaient
passé la nuit dans une ruelle contre sa maison». Dimanche, les combats se
poursuivaient entre les deux camps aux portes de Brega, dans l'est du pays.
Entre 300 et 400 insurgés, qui avaient franchi plus tôt la ligne de front, se
sont repliés à environ 10 km à l'est de Brega, sur la route d'Ajdabiya. De
fortes explosions partant des positions pro-Kadhafi se faisaient entendre.
Des avions de l'Otan, dont les
frappes aériennes ont freiné ces derniers jours la contre-offensive des forces
loyalistes vers l'est, survolaient hier la région. Les combats à l'Est se
concentraient toujours autour du site pétrolier de Brega, à 800 km de Tripoli
et à 240 km au sud de Benghazi, bastion de l'opposition. Après s'être emparés
de l'Université du pétrole, un énorme campus à l'entrée est de la ville, les
rebelles ont dû se replier sous le feu des pro-Kadhafi. «Nous étions dans
Brega, mais ils tirent encore, à la kalach'. Nos gars vont y aller et les
avoir, c'est sûr», a déclaré Abdelkader Menefi, 39 ans, sur le bas-côté de la
route.
Misrata sous le feu des «kadhafistes»
A 600 km à l'ouest de Brega, un autre front continuait de faire rage à
Misrata, troisième ville du pays, tenue par les insurgés mais assiégée depuis
plusieurs semaines et attaquée par les forces pro-Kadhafi à coups d'artillerie
lourde, selon un porte-parole de l'opposition, basée à Benghazi. Samedi, les
pro-Kadhafi ont tiré à l'artillerie lourde et avec des chars, et ont essayé
d'entrer par trois points différents, a affirmé à l'agence AFP un porte-parole
des insurgés de la ville, précisant qu'aucune frappe de l'Otan n'avait eu lieu
samedi, même si des avions avaient survolé la ville.
Selon les rebelles, plus de 200
personnes, essentiellement des civils, sont mortes dans les combats dans cette
ville. Les forces de Kadhafi ont essayé d'entrer par trois points différents,
l'Est, le Nord-Ouest et le Nord, mais elles ont été repoussées par les
insurgés. Selon le porte-parole, un civil, qui circulait en voiture, a été tué
par des francs-tireurs du colonel Kadhafi. Deux rebelles sont morts ainsi que
sept membres des forces pro-Kadhafi. Les loyalistes ont tiré sur des maisons,
«un crime contre l'humanité», a dénoncé le porte-parole des insurgés qui en a
appelé à la communauté internationale.
Depuis plus de 40 jours, les
insurgés libyens défendent sans relâche Misrata, la troisième ville du pays,
bombardée et assiégée par les forces fidèles au colonel Mouammar Kadhafi. Un
navire humanitaire a pu apporter jeudi 150 tonnes d'aide médicale et
alimentaire aux habitants de Misrata. Le bateau avait pu pénétrer dans le port
malgré les tirs et après que les avions de la coalition internationale eurent
coulé ou endommagé des navires de la marine libyenne dans la rade.
Au sud-ouest de Tripoli, des
habitants de Ketla ont aussi annoncé que la ville avait été visée vendredi et
samedi par des dizaines de roquettes Grad des forces loyales au colonel
Kadhafi, qui ont fait plus d'une trentaine de morts. Dans l'Est, les troupes
loyalistes ont bloqué une nouvelle tentative des insurgés de progresser sur la
route du golfe de Syrte, mais les insurgés disent réorganiser leurs forces.
«Nous avons formé notre première brigade, entièrement composée de militaires
ayant fait défection ou à la retraite», a déclaré l'ancien commandant de
l'armée de l'air Djalid al Libie à Benghazi. Interrogé sur le nombre d'hommes
dans cette unité, il n'a pas souhaité répondre, ajoutant: «C'est la qualité qui
importe.» «Avant la fin de la semaine, vous verrez un autre type de combat qui
fera pencher la balance», a ajouté cet ancien pilote de chasse.
Les insurgés ont pu s'appuyer sur
les frappes aériennes de la coalition internationale, désormais coordonnées par
l'Otan. L'Alliance atlantique a déclaré avoir effectué 363 sorties depuis
qu'elle a pris le commandement des opérations le 31 mars. Cent cinquante
environ étaient planifiées comme des missions de combat, mais l'Otan n'a pas
précisé si des cibles avaient été touchées. L'Alliance, mandatée par la
résolution 1973 du Conseil de sécurité de l'Onu autorisant le recours à la
force pour protéger les civils libyens, a pour mission de faire respecter un
embargo sur les armes et une zone d'exclusion aérienne en Libye et d'intervenir
en cas d'attaques contre des civils.
Desmond Tutu: laisser partir Kadhafi
Par ailleurs, l'une des icônes de la lutte contre l'apartheid, le prix
Nobel de la paix sud-africain Desmond Tutu, a suggéré dimanche comme porte de
sortie à la crise libyenne de donner la garantie au dirigeant Mouammar Kadhafi
qu'il échappera à la justice. Il s'agit de «la moins pire des solutions» pour
sauver des vies, a-t-il estimé dans un entretien à la BBC. »La moins pire des
solutions» pourrait être de laisser le colonel Kadhafi «avoir un atterrissage
en douceur et de sauver autant de vies que possible», a-t-il proposé. Les pays
formant la coalition internationale sont, eux, favorable à une telle solution,
même si plusieurs options sont sur la table, notamment armer les insurgés et
les assister techniquement pour faire tomber le régime de Mouammar Kadhafi, ou
d'offrir à ce dernier une porte de sortie honorable. Enfin, les défections dans
les rangs de Kadhafi continuent: dimanche, c'est l'ex-chef de la diplomatie et
diplomate de haut rang Ali Triki qui a annoncé son «départ» de l'équipe de
Kadhafi. Avec Moussa Koussa, son départ est un sérieux revers pour le clan des
Kadhafi.
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Posté Le : 04/04/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Yazid Allilat
Source : www.lequotidien-oran.com