Algérie

Liberté de culte : L'interminable calvaire des Ahmadis algériens



Liberté de culte : L'interminable calvaire des Ahmadis algériens
Le ministre des Affaires religieuses, Mohamed Aïssa, avait proclamé lors d'une conférence devant des ambassadeurs organisée par l'Institut diplomatique, le 25 avril 2017, que les poursuites judiciaires contre les fidèles du courant ahmadi n'étaient pas pour des raisons religieuses mais pour des faits délictueux.Pourtant, les procès apportent la démonstration du contraire. Le dernier en date qui a eu à juger six personnes, qui s'est tenu au tribunal de Batna le 19 juin passé, a pris les allures de l'Inquisition. Lors du procès en appel, la direction des affaires religieuses de Batna avait même tenté de se constituer partie civile. Il a fallu une franche opposition de la défense pour empêcher l'intrusion de cette direction dans le procès. «La tentative de la direction des affaires religieuses de se constituer partie civile révèle une velléité manifeste de juger les prévenus en raison de leurs croyances», a répliqué l'avocat de la défense, Salah Debouz. La présidente de la séance a dû consentir. Cependant, cette dernière a entamé les débats en déclarant que l'un de ses assistants (juge professionnel) était un imam-prêcheur avant d'intégrer la profession. Une curieuse déclaration qui n'avait comme seul objectif que de mettre la pression sur les prévenus. Mais surtout pour annoncer la couleur d'un procès jugeant les consciences et les croyances des six personnes accusées. En effet, les débats ont porté essentiellement sur l'appartenance des prévenus au courant religieux ahmadi, alors que les chefs d'inculpation sont : «activité dans une association non autorisée», «collecte illégale de fonds» et «possession de documents nuisibles à l'intérêt national». «Comment la secte ahamdie est-elle arrivée en Algérie ' Qui vous a introduits dans cette secte ' Où accomplissez-vous la prière de vendredi '» Telles étaient, entre autres, les questions posées par la présidente du tribunal et du procureur de la République. La défense a dû interpeller à plusieurs reprises le représentant du ministère public sous peine de se retirer s'il poursuivait ses commentaires négatifs sur le courant religieux auquel appartiennent les six prévenus. «A défaut d'apporter des éléments tangibles et probants appuyant la démonstration de l'accusation, le procureur de la République portait des jugements de valeur et des commentaires déplacés sur la croyance des inculpés. Alors que le jugement en deuxième instance, le procureur n'avait pas le droit de le faire», juge Me Debouz qui a menacé de se retirer.Condamnés en première instance à des peines allant de deux à quatre années de prison ferme, les peines ont été réduites en appel à un an de prison ferme dont six mois avec sursis pour cinq accusés et six mois avec sursis pour le sixième accusé. En somme, le procès de Batna intervient dans un contexte marqué par une vague d'arrestations des citoyens appartenant au courant religieux ahmadi et vient s'ajouter à la longue liste des procès visant cette catégorie de population. Une campagne de persécution sans précédent téléguidée par le ministère des Affaires religieuses et relayée par certains cercles politiques et médiatiques est enclenchée depuis plus d'une année au nom d'une «pureté religieuse nationale». A plusieurs reprises, le ministre des Affaires religieuses avait pris la parole pour dénier aux Ahmadis leur part d'islamité. «Ils ne sont pas musulmans», répétait-il sans cesse. Une fatwa (avis juridique) a même été émise. Une excommunication. Il s'en est suivi alors une vague d'arrestations et de procès expéditifs.Nombre de spécialistes des questions religieuses n'excluent pas l'influence grandissante du courant salafiste radical dans cette nouvelle guerre de religions. «Le courant salafiste s'est bien incrusté dans les rouages du ministère des Affaires religieuses et a fait main basse sur les grandes mosquées. Une partie de l'administration centrale cède devant l'avancée d'un salafisme rampant», estime un cadre du ministère des Affaires religieuses. Des organisations de défense des droits de l'homme nationales et internationales s'élèvent contre les atteintes à la liberté de conscience et aux libertés de culte. Amnesty International exhorte les autorités politiques du pays à «mettre un terme à la campagne de répression contre les membres du mouvement religieux ahmadi».«La répression qui s'est abattue sur les Ahmadis est alarmante. Cette vague d'arrestations et de poursuites visant des Ahmadis montre clairement que les autorités renforcent les restrictions à la liberté d'expression dans le pays», a déclaré Heba Morayef, directrice des recherches sur l'Afrique du Nord de l'ONG de défense des droits de l'homme. De tendance réformatrice et messianique, El Ahmadiya se distingue notamment par la non-violence. Ses fidèles en Algérie connaissent depuis plus d'une année des moments difficiles. Ils subissent une persécution de toutes parts. Une mise au ban de la société.


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