Algérie

LETTRE DE PROVINCE



LETTRE DE PROVINCE
Par Boubakeur Hamidechi[email protected] /* */Décidément sa parole, c'est-à-dire ses mises au point destinées à «rectifier» les propos des autres, ne laisse personne indifférent. Selon que l'on soit de son bord ou que l'on nourrisse quelques vieilles hostilités à son égard, l'on est, soit ravi de ses intempestives dénégations, soit irrité par sa «mauvaise foi». C'est ainsi d'ailleurs que l'on a assisté, toutes les fois où il se manifestait, à deux interpellations opposées. C'est alors à l'injonction lancée par le fameux «taisez-vous Nezzar !» que riposte immédiatement le besoin de la curiosité médiatique qui le supplie de ne plus se taire. Il est vrai que ce vieux soldat est depuis plus d'une décennie un excellent client de la presse tant il est exact qu'il fournit à celle-ci tous les ingrédients du sensationnel. Ingérable, comme n'aurait jamais dû l'être un officier blanchi sous le harnais de la discipline, il ne craint même plus de se contredire. Sauf qu'il est l'un des rares caciques du système à s'affranchir de l'obligation de réserve (qui serait plutôt une omerta au sens mafieux du vocable) et de livrer sur la place publique les secrets peu ragoûtants des pratiques ayant prévalu au sommet du pouvoir. C'est pour cette raison justement que les cycliques cures de révélations auxquelles s'astreint Nezzar agacent terriblement dans la mesure où elles contribuent au dévoilement public des tares consubstantielles à tous les régimes et par voie de conséquence participent à leur démystification. Peu importe qu'il ait tort ou raison lorsqu'il polémique avec les dirigeants du FFS ou qu'il s'en prenne obliquement à un autre général, Betchine pour ne pas le nommer, mais le fait qu'il n'hésite guère à démultiplier les cibles finit par fragiliser ses arguments. A travers cette imprudente posture qui le pousse à donner un avis sur tous les évènements et à délivrer un jugement sur chaque acteur, ce général oublie qu'il verse dans le cabotinage quand il prétend faire œuvre de vérité. Cependant, en dépit des défauts liés à son ego surdimensionné, il a tout de même conquis une nouvelle notoriété. C'est ainsi qu'il s'est forgé une solide réputation de coq du village Algérie prenant un malin plaisir à taquiner politiquement la basse-cour du pouvoir. Se rappelant à tous les instants qu'il fut un homme de pouvoir et un dignitaire influent, il s'octroie de fait le droit de donner un avis sur tout. Et toutes les fois où il est interrogé sur les raisons qui le poussent à quitter sa retraite de temps à autre, il prétend ne vouloir faire connaître que des convictions personnelles. D'ailleurs avant chaque sortie médiatique ne prévient-il pas l'auditoire qu'il n'est le porte-parole d'aucun cercle ou institution, laissant entendre qu'il «n'agit pas» mais qu'il «réagit» seulement lorsqu'il se sent concerné ' Avec justesse, il avait effectivement prouvé que sa médiatisation était d'abord justifiée par des combats qui le concernent et le tiennent à cœur. Ceux qu'il avait engagés pour lever le voile sur certaines allusions, tout autant graves que malsaines. C'est que par le passé récent il aurait été victime de cabales (selon le mot usité en son temps) qui l'auraient obligé à sortir de sa réserve. Celle de l'été 2001 lorsque fut orchestrée la campagne odieuse qui le mettait en cause dans certaines dérives sécuritaires. Dans cette république de la confusion, là où l'élémentaire «qui est qui '» n'est, à ce jour, pas clairement identifié, des «voix autorisées» citèrent honteusement le nom de ce général. C'est de cette époque que date la curée qui le poursuit sous la forme de procédures pénales internationales. Car par une sorte de complicité notoire l'on avait imprudemment gravé son nom sous l'intitulé du délit «Qui-tue-qui '». En effet la question n'a jamais été une interrogation objective mais bel et bien un acte d'accusation. Or en 2011, c'est-à-dire 10 années après les faux témoignages de Souaà'dia, le même scénario se réécrivait devant des tribunaux européens avec toujours dans le rôle principal l'officier Nezzar, lequel devait répondre au nom de toute une institution. Or l'impossible salissure que l'on persiste à lui accoler l'avait définitivement convaincu qu'il était devenu la bête noire du système dont pourtant lui-même est issu et qu'il avait militairement servi. Une croyance persistante dans l'idée du complot qui le harcèle a fini par irriguer ses interventions. L'aigreur aidant, il déversera un chapelet de critiques à l'encontre de Chadli Bendjedid lorsqu'il eut à croiser le fer à distance avec lui. S'estimant injurié par certaines assertions, le vieux soldat s'est depuis installé sur les crêtes politiques du pays comme un snipper afin de rendre coup pour coup à ceux qui, à ses yeux, falsifient les réalités qui sont les siennes. La dernière, concernant sa relation avec Aà't-Ahmed et les versions des discussions qu'ils ont échangées, montre bien qu'il ne veut plus rien céder sur ses intimes certitudes. Celles, très fortes et qui confortent l'obsession d'un acteur primordial de la décennie noire. D'où ces registres d'imprécateur lorsqu'il interpelle «ceux qui se vautrent, de nos jours, dans les contre-vérités», suggérait-il souvent. Même s'il ne s'est jamais clairement exprimé ainsi, il n'en pensait pas moins. Oui elle est bien là sa pensée exclusivement accrochée aux souvenirs des pleins pouvoirs qu'il eut à exercer. Notamment quand il se manifeste publiquement en rappelant à la nomenklatura les grands sacrifices de ceux qui en 1992 empêchèrent l'Algérie de sombrer dans le ruisseau. Mutatis mutandis, il leur rappelle ce douloureux débat que soulignait les «que faire» des dirigeants de l'époque.




Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)