Algérie - El Omaria

Les villages de colonisation de la commune mixte de Berrouaghia ( Champlain)



Les villages de colonisation de la commune mixte de Berrouaghia ( Champlain)
Particularités de la commune de Champlain (ou El Omaria)


L'origine du nom de ce village est des plus claires : il célèbre un colonisateur d'un autre temps et sur un autre continent. Ce fut sans doute l'argument décisif bien que Samuel Champlain, mort en 1635 à Québec, n'ait jamais posé ses pieds sur le sol du Titteri.
1567 Naissance à Brouage. Il aurait reçu une formation de cartographe qui a dû lui être bien utile dans ses nombreux voyages d'exploration du Canada entre le Saint-Laurent et les grands lacs.
1603 Il entre dans l'histoire le 15 mars lorsqu'il quitte Honfleur pour le Saint-Laurent avec mission donnée par Henri IV de remonter jusqu'aux lacs.
1608 Il fonde un modeste établissement, fortin et magasin, sur un plateau rocheux dominant le fleuve là où il se rétrécit sur la rive nord. C'était à l'endroit où Jacques Cartier avait, en 1535, fondé un poste qui fut abandonné dès 1544.
1619 Il est nommé lieutenant-gouverneur de la Nouvelle-France avec résidence à Québec, nom donné à son établissement de 1608.


Quel rapport Champlain eut-il avec l'Algérie en général et avec le Titteri en particulier ? Aucun bien sûr. Ceux qui ont choisi ce nom pour un nouveau village ont pensé au fondateur de la " Nouvelle-France " (pour l'Algérie on disait plutôt " l'Autre France "). Ils ont oublié le triste destin des 15 000 Acadiens (Français de l'est du Canada) déportés par le " Grand dérangement " de 1755-1760 au cours des guerres franco-anglaises, et l'abandon définitif de tout le Canada français le 10 février 1763 au premier traité de Paris. Fâcheux précédent quand on connaît l'issue.
La date de sa création, par contre, n'est pas claire du tout. La date de 1921 parfois avancée avec force détails est une erreur manifeste. Le village apparaît dans le dictionnaire Joanne de 1908 avec la mention " village de la commune mixte de Berrouaghia ". Il apparaît aussi dans une liste de quatre villages publiée en 1904 et consultable sur le site des archives de Rennes ; il s'y trouve non seulement le nom, mais aussi la distance à Médéa, l'altitude, le nombre (30) et la taille des concessions (35ha)ainsi que les cultures et les élevages pratiqués.
Créé avant 1904 il a bénéficié du décret de 1878 qui avait maintenu le système des concessions gratuites (mais sous condition d'un apport en capital après 1892) avec un maximum de 40ha : avec 35ha, on n'en était pas loin. Ce village a donc été créé entre 1878 et 1904 : je ne puis préciser davantage ; mais j'imagine plus près de 1904 que de 1878. Alors 1921 ? Peut-être la date d'un agrandissement comme il est arrivé assez souvent.
Le cadre naturel est un peu différent de celui des trois autres villages de la commune mixte. Le terroir se trouve, pour l'essentiel, ainsi que le village, dans une petite plaine de montagne, et non sur une crête. Cette cuvette est à 800 m d'altitude à peine, et est dominée au nord, par des massifs de l'Atlas tellien où la France n'a installé ni villages, ni routes, ni pistes carrossables. Il n'y avait en 1935, vers le nord, que l'amorce de la piste tracée, après l'indépendance, jusqu'au col des deux-bassins au-dessus de Tablat. Cette cuvette à fond plat appartient au bassin de l'oued Isser.
Les cultures principales étaient céréalières, mais avec un vignoble d'appoint pour des vins de qualité VDQS, même si le nom de Champlain évoque spontanément les arpents de neige du Canada plutôt qu'un cru de Médéa. L'élevage bovin était possible.
Champlain se trouve sur une route secondaire qui double la RN 18. Pour y aller, il fallait le faire exprès. C'est peut-être pour cette raison que je n'ai trouvé aucune photo, ni dans les livres d'images, ni sur Internet, ni dans mes albums de famille. Je n'y suis jamais allé. Dommage.
Le village n'est pas traversé par la départementale 23, il est longé par elle. Le rectangle allongé des lots à bâtir est au sud. Les autobus ne traversaient pas davantage le village : ils y avaient leur terminus. Ils venaient de Berrouaghia : en 1948 il y avait un aller-retour quotidien. La route de Berrouaghia passait tout près du camp militaire Paulinier, antérieur à la fondation du village et au sud duquel fut trouvé en 1906 un gisement préhistorique mésolithique tardenoisien. Elle passait ensuite à Ouled-Brahim. Berrouaghia est à 29km de Champlain.
Le 4 avril 1948 il se produisit à Champlain un événement plus que fâcheux, mais qui ne prit toute sa signification qu'avec le recul du temps. C'était jour d'élections : celle du premier tour pour la désignation des députés à l'assemblée algérienne. Il y eut une émeute avec attaque d'un poste de contrôle qui fit trois morts.


Documents et textes : Georges Bouchet



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