LES TUNISIENS SONT LIBRES !

Les Tunisiens sont libres ! Pas besoin d'analyse politique, il suffit de marcher à Tunis, de s'attabler, de tendre l'oreille, d'écouter. C'est fini le Tunisien qui avait un flic dans la tête et qui s'affolait à la moindre question plus ou moins politique. On ne trouve plus le regard traqué de l'individu sous le voile de l'oppression. Il y a quelque chose de fondamentalement changé dans l'attitude des Tunisiens, une forme d'assurance inhabituelle et qui, pourrait-on dire pour reprendre le jargon du FMI, contraste avec les données «macro».Mais quoi de plus normal, ce sentiment de liberté ne se quantifie pas car il n'a pas de prix. Quand on vient d'un pays où la sortie de l'autoritarisme est bloquée à grands coûts humains et économiques, c'est la réussite des Tunisiens à réaliser cette transition vers les libertés avec le minimum de dégâts. C'est en cela qu'ils sont exemplaires, les expériences ne se dupliquant jamais à l'identique, ce qu'il faut en retirer c'est bien l'aptitude des politiques tunisiens à négocier des solutions acceptables. Mais avec le postulat de départ qu'il est hors de question de revenir en arrière ou d'entretenir un statuquo qui empêcherait une citoyenneté pleine et entière des Tunisiens.Mustapha Ben Jaafar, président de l'Assemblée nationale constituante (ANC), a noté avec une certaine fierté que «c'est grâce au «consensus», ce mot magique, devenu une culture purement tunisienne, que le pays a pu réaliser une Constitution garantissant les droits et libertés». Mais le consensus initial - que certains ont voulu perturber en rêvant d'une répétition du cauchemar égyptien en Tunisie - d'un refus du retour à l'autoritarisme policier a constitué un vrai socle pour maintenir le cap vers les libertés. Aujourd'hui, les Tunisiens sont libres, mais il serait absurde de croire que c'est irréversible. Ce mot d'ailleurs est un lexique des régimes autoritaires par excellence. Une démocratie ouverte est, par essence, un système critique qui a besoin constamment d'adaptation et qui peut connaître des régressions.LE VRAI GARDE-FOU CONTRE LA REGRESSION EST QUE LES TUNISIENS DEFENDENT, CONSTAMMENT, CETTE LIBERTE ARRACHEE DE HAUTE LUTTE. ILS AVANCERONT, INDENIABLEMENT, S'ILS PARVIENNENT A IMPOSER AUX POLITIQUES DE TOUT BORD UN DEVOIR DE PROTEGER LES LIBERTES QUI SERAIT PAS AUSSI EXIGEANT, SINON PLUS, QUE CELUI DE LA PRESERVATION DE LA SECURITE. UNE SORTIE DE L'AUTORITARISME POLICIER DOIT NECESSAIREMENT METTRE FIN A L'OPPOSITION FACTICE ENTRE LES LIBERTES ET LA SECURITE. C'EST PARCE QUE L'IRREVERSIBILITE N'EXISTE PAS QUE LES LIBERTES DOIVENT ETRE CONSTAMMENT DEFENDUES TOUT COMME CELUI DE L'ORGANISATION TRANSPARENTE DE LA SOCIETE, DES POUVOIRS ET DE L'ECONOMIE. TOUTES LES AVANCEES PEUVENT ETRE EFFACEES SI CETTE EXIGENCE DE DEFENSE PERMANENTE DES LIBERTES PAR L'ENSEMBLE DES ACTEURS N'EST PAS ASSUMEE AVEC CONSTANCE. C'EST LE MESSAGE LUMINEUX DE TUNISIE QUI NE FAIT QUE MONTRER L'ABSURDITE DE LA REGRESSION EGYPTIENNE EN MARCHE SOUS L'APPLAUDISSEMENT DES «ELITES».