Algérie

Les travailleurs ne font plus la fête



Que reste-t-il encore du 1er Mai, célébration qui perpétue dans le mondeentier les luttes et les acquis de la classe ouvrière depuis le milieu du 19ème siècle ? En Algérie, comme partout ailleurs, cette date est encoresacralisée, voire ritualisée, même si elle ne dit pas les choses comme avant.Dans toutes les unités et dans tous les organismes, on profite quand même decette occasion pour offrir des collations et des discours que d'aucuns saventde circonstance.  Autres temps, autres moeurs. Le1er Mai des années 60 et 70, voire le début des années 80, était synonyme degrandes parades, de gigantesques slogans et d'immenses banderoles. Des chars encarton, des camions et des tracteurs bariolés de couleurs et de centaines desigles défilaient dans les grandes artères des villes et des villages pourrappeler à chacun la révolution et ses acquis. Des travailleurs et destravailleuses vêtus tous de la même manière formaient derrière le cortège unelongue escorte. L'armée du développement, les couches laborieuses, la classeprolétaire et tant de phraséologies révolutionnaires qui, comme les chars encarton qui défilaient à l'occasion, n'ont vécu que le temps d'une illusion. Onest passé par la gestion socialiste des entreprises. A cette époque là, letravail était d'abord l'engagement idéologique au service de la nation. Puisvint le temps de la gestion socialiste des entreprises avec grands débats etpetits réajustements. Le travailleur, du directeur jusqu'au planton, étaientlogés à la même enseigne, à peine si le directeur pouvait avoir, en plus, la«Zastava». L'entreprise se devait de faire travailler, nourrir, loger et mêmedivertir dans les camps de vacances d'été, et qu'importe le résultat. Le pleinemploi était-là aucun ne pouvait croire aux lendemains incertains. 1994, leciel d'Algérie assombri par le bruit du chaos et de la fureur, Camdessus à larescousse, devant des millions de téléspectateurs dira qu'il faudrait serrer unpeu plus la ceinture et que le nécessaire réajustement passe par lessacrifices. Des milliers de travailleurs sont mis au chômage grève ou pasgrève, et une nouvelle doctrine, celle de l'économie de marché - une hérésiepour les irréductibles - a sonné la cloche du réveil. Le puissant syndicat UGTA sedevait aussi d'accompagner ces mesures en haussant le ton, des fois. On crée lacaisse du chômage et tout l'arsenal qui va avec. La retraite est ramenée à 50ans et le front social tétanisé par tant de chamboulements ne devait en aucunemanière échapper à ceux qui sont sensés le représenter. L'orage est passé et lalogique est imposée. Pour le cadre qui ne devait se justifier, aux temps bénisdu socialisme, que de la carte du parti est maintenant sommé de menerl'entreprise au sommet de la performance. Et la sémantique révolutionnairea cédé le pas devant le management, force de vente, marketing, analysefinancière, tableau de bord, paramètre de qualité, indicateurs de performances,coaching...  Le 1er mai reste, toutefois, uneidée bien romantique que des millions de travailleurs de par le mondebrandissent pour dire que le travail est la seule richesse qui dure.


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