Algérie

Les travailleurs de Socothyd montent au créneau



Les employés soupçonnent une «volonté manifeste» de liquider l'entreprise, alors que la direction assure que les perturbations actuelles sont dues aux dernières décisions du gouvernement concernant les importations.Décidément, rien ne va plus à l'entreprise de fabrication des produits parapharmaceutiques et d'hygiène corporelle, Socothyd, sise aux Issers, à 20 km à l'est de Boumerdès. Hier, pas moins de 350 travailleurs ? soit plus de la moitié des effectifs ?, qui devaient assurer le service dans l'après-midi, ont déserté les ateliers avant d'observer un sit-in devant le bloc administratif en signe de protestation contre «la situation catastrophique que traverse l'entreprise», jadis fleuron de l'économie nationale.
«L'usine fonctionne au ralenti depuis plus d'un mois. L'atelier où on fabrique les bandes de plâtre est à l'arrêt. Il y a quelques années, c'est nous qui approvisionnions tous les hôpitaux en produits parapharmaceutiques, mais maintenant les marchés ont tous été raflés par des concurrents privés. Si ça continue ainsi, on va couler», s'inquiète un employé qui cumule 13 ans d'expérience à l'atelier de la bande compressée.
Les employés soupçonnent «une volonté manifeste de liquider Socothyd». «Dans les années 1990, on couvrait 100% des besoins du marché national. Aujourd'hui, on n'arrive même pas à acquérir la matière première. Le nouveau directeur général, installé en mars 2017, invoque les effets de l'arrêt des importations sur les fournisseurs, mais on ne sait pas s'il dit vrai ou faux», fulmine un autre travailleur.
Et d'ajouter : «On vient ici pour se rouler les pouces. On ne fait presque rien. L'usine est transformée en un immense chantier. C'est nous, simples ouvriers, qui allons payer les frais, car les primes de rendement individuel et collectif risquent de chuter de 80%», s'indigne-t-il. Selon le secrétaire général du syndicat d'entreprise, Adjal Sebti, l'action d'hier était prévisible depuis plusieurs mois.
«La colère des travailleurs s'est exacerbée à cause du refus du directeur général de parler avec eux pour leur expliquer les raisons de la stagnation de la production.» «Ils ont voulu l'aborder devant la cantine pour obtenir des réponses de sa part, mais il s'est dirigé vers son bureau et a refusé de les écouter. C'est une vraie fuite en avant. Il a même appelé la police et un huissier de justice pour dresser un PV. Or, nous en tant que syndicat, nous les avons appelés au calme et à ne plus user de la violence.
Nous défendons l'entreprise et les droits des travailleurs, rien de plus», affirme-t-il avant de dénoncer la fermeture des portes du dialogue par le directeur général. L'unité de Bordj Menaïel à l'arrêt depuis 8 ans «On lui a adressé plusieurs missives pour nous recevoir afin de discuter sur de l'avenir et le devenir de Socothyd, mais il ne répond que par des notes aux travailleurs portant des informations souvent erronées.
Cela fait presque neuf mois qu'on attend le renouvellement de la convention collective et la révision des conditions d'obtention des échelons, en vain. Même les responsables du groupe ACS ne sont pas intervenus pour le rappeler à l'ordre, bien que nous les avons sollicités à maintes reprises. La semaine dernière, le président de ce groupe a refusé de nous recevoir et nous a demandé de lui adresser une demande d'audience alors que l'entreprise traverse une période des plus critiques.
Elle a reculé de 6% depuis l'installation de l'actuel directeur général, qui était directeur des finances auparavant. Je ne suis pas en train de défendre son prédécesseur, M. Achaibou. Ce dernier a laissé, avant son départ en mars 2017, un important stock de gaz compressé qu'on utilise pour la fabrication de certains produits. A présent tout est épuisé», déplore-t-il.
Un autre syndicaliste relève le cas de l'unité de Bordj Menaïel fermée, selon lui, depuis 2010, au moment où des bataillons de jeunes de la région sont livrés au chômage. «On a essayé de l'ouvrir en 2016. On y a fait quelques bricoles avant de la fermer à nouveau sans aucune raison valable. En 2016, ils ont invoqué la possibilité de signer un partenariat avec Bio Pharm et deux entreprises françaises, Lohmann et Rauscher, mais on a refusé car Socothyd a besoin de vrais gestionnaires pas d'associés.
En 2012, l'Etat nous a accordé un crédit de 80 milliards de centimes. Malheureusement, on n'a pas fait grand-chose avec. Ce n'est qu'en 2017 qu'on a commencé à rembourser ce prêt», a-t-il ajouté. Notre interlocuteur n'a pas manqué de s'en prendre à l'actuel comité de participation, lui reprochant de «rouler pour le directeur». «Le CP n'a jamais défendu les droits des travailleurs.
La preuve, plus d'un tiers des effectifs ont demandé sa dissolution. Récemment, on a augmenté la prime de panier de 60 DA pour les simples ouvriers, alors que les cadres ont eu droit entre 200 et 300 DA. Les membres du CP ont accepté également le durcissement des conditions d'octroi des échelons, en exigeant aux éventuels bénéficiaires de ne pas s'absenter plus de 12 fois par an, même en cas de maladie.»
Les travailleurs ont regagné les ateliers en milieu d'après-midi. Leurs représentants syndicaux semblent ne pas être près de lâcher prise. «Nous sommes en train de nous concerter, mais si nos dirigeants n'ouvrent pas les portes du dialogue et ne prennent pas des mesures concrètes pour redresser la situation de l'entreprise, nous allons durcir notre mouvement», préviennent-ils.


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