Algérie

Les travailleurs de l'Eniem refusent de reprendre le travail



Les protestataires se sont rassemblés devant l'entrée du site de production pour réclamer, à nouveau, le départ du staff dirigeant, ainsi que l'annulation du congé technique imposé aux travailleurs.Au deuxième jour de la date fixée pour la reprise de la production à l'Eniem, les travailleurs refusent toujours de regagner leur poste au motif que les deux revendications qui les ont fait sortir à plusieurs reprises dans la rue depuis l'arrêt technique de l'entreprise ne sont toujours pas satisfaites. Hier matin encore, à l'heure où les ateliers de fabrication commencent habituellement à tourner à plein régime, les travailleurs se sont massivement rassemblés devant l'entrée du site de production, à Oued Aïssi, dans la wilaya de Tizi Ouzou, pour réclamer à nouveau le départ du P-DG et de son staff dirigeant, ainsi que l'annulation du congé technique auquel ils ont été contraints durant le mois de décembre écoulé.
À notre arrivée, le portail était grand ouvert, mais, nous a-t-on expliqué, aucun travailleur ne l'a franchi depuis la matinée. "Il est hors de question pour les travailleurs de reprendre le travail sans le départ des cadres dirigeants et l'annulation pure et simple du congé technique", nous lance, d'emblée, un des travailleurs qui participaient au rassemblement.
"Le congé technique décidé par la direction ne s'appuie sur aucune base juridique. Une telle décision se prend d'un commun accord avec le partenaire social, et dans le cas de ce dernier arrêt technique le mandat du partenaire social a déjà expiré. Il fallait donc convoquer une assemblée générale des travailleurs pour choisir leur délégué avec qui il fallait négocier, or, le P-DG a fait fi de toutes les lois et procédures et a pris la décision de manière unilatérale de mettre l'entreprise en arrêt technique, d'où alors nos deux revendications", nous explique un autre travailleur, estimant que le Rubicon, sinon le point de non-retour, a été franchi par le P-DG de l'entreprise, avec son appel à la reprise dans lequel il avait traité des travailleurs de "manipulateurs à la recherche d'intérêts personnels" et de "destructeurs". "C'est une tentative de division que tous les travailleurs ont comprise et déjouée", nous déclare un syndicaliste, non sans s'interroger sur le silence des autorités sur cette situation.
"D'un côté, ils nous parlent de l'Algérie nouvelle, de réformes et de changement de stratégie pour investir les marchés étrangers et, d'un autre côté, ils prennent en otage l'entreprise et ses 1 700 travailleurs pour une affaire d'équipe dirigeante rejetée par les travailleurs. Maintenant, si l'objectif des dirigeants de l'Etat est la fermeture de l'Eniem, qu'ils nous le disent, si c'est un nouveau mouvement social qu'ils veulent déclencher, c'est encore plus grave. Sinon, pourquoi le ministre qualifie-t-il les revendications des travailleurs de légitimes '" s'est-il interrogé, tout en interpellant les autorités concernées à sortir de leur mutisme.
"L'Etat doit trancher. On veut une réponse claire à nos deux revendications", dit-il. "Au P-DG qui a évoqué dans son dernier communiqué clanisme, manipulation et intérêt personnel, nous tenons, au passage, à lui rappeler cela : le clanisme qu'il n'a cessé de semer au sein du personnel n'est désormais qu'un funeste souvenir ; la manipulation, dont il s'est toujours servi comme un instrument de gouvernance pour perdurer, est devenue inopérante car les travailleurs ont pris conscience de la supercherie...
Les travailleuses et les travailleurs de l'Eniem luttent pour l'intérêt collectif, pour la sauvegarde de l'outil de production et pour assurer la pérennité des emplois qui ont été mis en péril à cause d'une gestion des plus catastrophiques", lit-on également dans la déclaration de la section syndicale de l'entreprise, qui réaffirme la détermination des travailleurs à aller jusqu'au bout.
C'est dire que désormais, le torchon brûle et la tension monte plus que jamais entre les travailleurs et la direction de l'Eniem et ce, au moment même où des incertitudes continuent de peser sur son avenir.

Samir LESLOUS


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