Les spéculateurs et la manipulation des soufflets

Les lourdes sentences pénales contre les spéculateurs continuent de tomber. Dimanche un commerçant de Mostaganem s'est vu condamner, en comparution directe, à dix ans de prison et à une très forte amende. Son matricule rejoint ceux d'une liste qui ne cesse de s'allonger depuis le début du ramadan. Certains pensent que la justice n'y va pas de main morte. D'autres affirment que les juges devraient frapper encore fort contre des pratiques qui relèvent de la haute criminalité et qu'il ne faut en aucun cas considérer comme des comportements indélicats dans un mois de piété et de sacrifices, quand la règle en la circonstance est au contraire du don de soi.D'autres encore assimilent les mafieuses pratiques commerciales à des actes de haute trahison car au moment où le marché est en feu, en l'absence de conscience, de foi et loi, certains à l'âme dépravée s'activent en pyromanes attitrés. Les comportements de malfrats sont d'autant plus graves qu'ils se pratiquent dans une conjoncture pénible pour les familles avec des pouvoirs d'achat lacérés par l'inflation et le renchérissement spectaculaire du coût de la vie. Face à ces lourdes épreuves, la colère est légitime et le consommateur saigné n'est pas loin de réclamer l'extrême condamnation.
Le problème n'est cependant pas simple. D'abord parce que la spéculation n'est pas l'apanage de quelques vautours locaux et qu'elle a partout existé. Ensuite et surtout le pays a depuis des décennies avancé en clopinant, nourrissant dans sa marche une culture et un état d'esprit opposés à un Etat de droit. Il n'y a donc pas de honte à reconnaître que la remise du pays sur de solides rails est une ?uvre nécessaire et que le renforcement de la justice est essentiel.
Nombreux sont ceux qui n'éprouvent aucune fausse pudeur pour affirmer qu'une main de fer de la justice a la faveur de dégriser les grands égarés qui ne se rendent pas compte qu'ils manipulent des soufflets.