Algérie

Les slaloms conquérants de Good luck Algeria



Les slaloms conquérants de Good luck Algeria
Une histoire qui slalome entre amours et défis. Voilà ce à quoi peut se résumer Good luck Algeria, le long métrage de Farid Bentoumi, projeté lors de la troisième soirée des 14es Rencontres cinématographiques de Béjaïa.Le réalisateur a mis en images l'expérience malheureuse, et plus ou moins similaire, de son frère qui a été qualifié en 2003 aux JO. Il a posé sa caméra à Guelma, Alger et Oran avant de continuer le projet au Maroc après l'assassinat, en septembre 2014, du touriste français Hervé Gourdel. Il en a fait une fiction, délicieusement enveloppée d'amour et généreusement agrémentée d'humour.Lorsque Samir Zitouni (campé par Sami Bouadjila, césar du meilleur acteur 2008 pour son second rôle dans Les témoins) a annonçé qu'il allait prendre part aux Jeux olympiques dans la discipline du ski, on s'en est bien raillés, et même doublement raillé quand on a appris qu'il le fera pour son pays l'Algérie. Une blague qui a fait pouffer de rire plus d'un. «Good luck Algeria», lui a-t-on crié. Jeune patron d'une boîte de fabrication de skis basé en France, Samir est engagé par son associé et complice dans cette aventure pour un besoin purement économique : donner de la visibilité au ski Duval qu'ils fabriquent, parce que leur entreprise périclite.On se prépare déjà pour les qualif'.Son vieux père et ses compères, y compris. M. Zitouni entreprend de se rendre en Algérie pour récupérer la subvention de 20 000 dollars qui lui est destinée par le CIO en tant qu'athlète d'un «petit pays». «L'Algérie n'est pas un petit pays» lui répond, goguenard, un gros cadre aux services consulaires, qui lui explique qu'«il faut faire l'effort pour être algérien» après lui avoir fait constater qu'il ne figure pas sur la liste électorale. «Vous n'avez pas confiance en la démocratie algérienne '» lui dit le diplomate ventru.La salle en rit, comme d'une réalité. Première course pour avoir les minima qui qualifient aux JO, premier échec. Puis un deuxième. Aux scènes de défi succèdent des séquences d'une famille algérienne à l'épreuve de l'intégration. Le vieux paternel se met dans la peau du père Noël et en coupe de champagne, tout en gardant l'esprit accroché aux terres du pays. Le film s'introduit dans l'entre-deux identitaire, impliquant les territoires et les cultures. Une image qu'accentuent les propos de la femme française de Samir qui, lui, est issu d'un mariage mixte. «T'es un Algérien un peu français» lui dit-il.Mais Samir, qui n'a pas foulé le sol de son pays depuis tout enfant, ne veut pas des terres que lui lègue son père. Celui-ci a longtemps cotisé pour l'assurance rapatriement en espérant que son fils le rejoindra un jour au pays, mais il se résigne, la mort dans l'âme, à accepter à être enterré «sous la croix de Savoie». Samir se rend au ministère algérien du Ski et pour toute subvention, il reçoit quelques billets enroulés, à l'algérienne, dans un petit sac en plastique.La fédération a déduit ses «frais» mais a fait le grand effort de lui trouver la tenue officielle de l'équipe nationale : une XXL. La scène colle délicieusement et amèrement à l'actualité chaude de nos athlètes et à l'expérience malheureuse de leur prise en charge pour les tout derniers JO de Rio. Une coïncidence presque parfaite. Le voyage de Samir le mène jusqu'au fond de son village, où il retrouve ses parents qui l'on devancé. L'attachement à la terre, symbole d'enracinement aux origines, fait éclater un conflit entre les oncles jusqu'aux limites de la menace de l'écartèlement de la famille.Pour l'amour de son fils, le père finit par vendre des terres et lui offre une belle somme qui lui ouvre des voies. «Aide-moi à qualifier l'Algérie aux JO» demande Samir à son associé. Ce qui a été fait. Samir, «un Algérien un peu différent», est arrivé à la compétition olympique, le drapeau de l'Algérie brandi au vent. Lorsque le film s'est terminé sur ces notes d'amour, de défi et de consécration, et que la salle de projection de la Cinémathèque a repris ses lumières, des mains essuyaient encore les larmes qui ont coulé sur des joues fières. Good luck Algeria, aurait-on dû crier aussi dans la salle.


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