Algérie

Les sites archéologiques à l'abandon



La question de la conservation et de la défense des sites archéologiques, historiques et culturels de la wilaya de Constantine a été au centre des débats du forum de la radio régionale, hier samedi, et ce, en présence de représentants de la direction de la Culture, d'une association activant dans le domaine, de la gendarmerie nationale, des douanes et de la presse. Les débats ont porté sur l'état d'abandon dans lequel se trouvent les sites archéologiques, les déprédations qu'ils subissent, les tentatives d'aménagements entrepris par les autorités locales sur certains sites, les restaurations qui ne se font pas selon les normes universelles, ainsi que la contrebande effrénée dont font l'objet les pièces archéologiques. Comme entrée en matière, sans ambages, la représentante de la direction de la Culture donne le ton en faisant un constat malheureux. Elle affirme, notamment, «que notre patrimoine archéologique est dans un triste état, abandonné et piétiné». Et de citer l'urbanisation effrénée qui a fait que des cités entières, comme le cas de Békira et les villas de la cité Kouhil Lakhdar, sont bâties sur des sites archéologiques. «Qui est le secteur qui a délivré les autorisations de construction?» s'est interrogé un journaliste qui a posé la question de la responsabilité. Ce à quoi, il a été répondu que la direction de l'Urbanisme ignorait que ces sites renfermaient des trésors archéologiques. Ce qui a orienté le débat sur la coordination entre les directions de la wilaya, ainsi que vers la question lancinante de l'inexistence d'une carte déterminant les sites archéologiques protégés qui, depuis 1911, par le travail qui avait été mené en ce sens par Stéphane Gsell, fait toujours défaut. La protection et la valorisation du patrimoine archéologique national sont bien régentés par la loi 98/O4 de 1998, mais il semble que la question n'est prise en charge, aujourd'hui, que par la gendarmerie nationale et les douanes, dans le cadre d'un combat incessant livré à des bandes organisées qui agissent à l'intérieur et à l'extérieur du pays, pour piller notre patrimoine archéologique et culturel, alors que la responsabilité de cette lutte incombe à tous les secteurs, affirme le représentant d'une association civile qui active dans ce domaine. Il existait bien une agence nationale du patrimoine qui intervenait à chaque fois qu'il y a empiétement ou dépassement, mais elle a été dissoute et remplacée, tout récemment, par un office national de protection du patrimoine archéologique, encore en phase de rodage. Les interventions des représentants de la gendarmerie nationale et des douanes ont donné des aperçus et quelques bilans sur les opérations respectives menées pour contrer le fléau de la contrebande et ont permis d'avoir une idée sur l'ampleur du pillage de notre patrimoine archéologique. Dans ce cadre, la gendarmerie nationale a comptabilisé en 2OO6, dans la wilaya de Constantine, 49 interventions qui ont abouti à 444 saisies et à l'interpellation de 31 personnes dont 8 ont été présentées à la justice et écrouées. Le représentant des douanes algériennes, quant à lui, a fait cas des opérations menées à Constantine dans la même année et qui ont abouti à la saisie de 325 pièces de monnaie romaine en possession d'un professeur d'université qui s'apprêtait à prendre l'avion pour se rendre à l'étranger et 121 autres chez un commerçant. Le débat a été rehaussé par les interventions enregistrées de deux éminents professeurs, enseignantes d'histoire à l'Université d'Alger et d'Oran, ainsi que de l'ancienne directrice du Musée national de Cirta, Mme Daho, qui ont contribué à éclairer l'opinion sur la marginalisation du domaine de l'archéologie, même au niveau des institutions universitaires, et affirmé «que notre patrimoine culturel subit, chaque année, une véritable hémorragie» en recommandant «d'entreprendre un travail de sensibilisation à tous les niveaux pour empêcher le désastre, car il s'agit bien de notre passé sans lequel il n'y aura ni présent, ni avenir, de l'histoire de notre civilisation et de notre culture qui s'en va par pans entiers, victime de l'oubli, de l'abandon et du bradage».


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