Algérie

Les richesses patrimoniales sont plongées dans un sommeil léthargique: L’Algérie tourne le dos au tourisme culturel


Les richesses patrimoniales sont plongées dans un sommeil léthargique:  L’Algérie tourne le dos au tourisme culturel




Ville des arts, site admirable, vestige constituant une page de l’histoire de la région… On a tant et tant de fois entendu ces qualifiants et bien d’autres qu’on ne peut que s’étonner de ne pas voir des cohortes de touristes et des groupes de chercheurs sillonner le pays. Pourtant, il n’y en a point.

Le tourisme culturel et scientifique n’est qu’un concept théorique qui ne trouve pas encore concrétisation sur le terrain. Il est rare de voir une poignée de personnes en train de se photographier sur un site, visiter un musée ou suivre avec attention les informations délivrées par un guide leur racontant l’histoire d’une mosquée, d’une ville antique, d’une civilisation qui a laissé des traces de son passage dans un abri sous roche, ou d’une fête populaire. Il y a même des sites qu’on n’oserait pas faire visiter tant leur état est déplorable…

Ce flux de visiteurs «particuliers» est inexistant parce qu’il n’y a tout simplement aucune politique intersectorielle qui se chargerait de promouvoir ce type de tourisme. S’il est un secteur culturel et touristique à la fois qui reste inexploité c’est bien ce patrimoine qui, pourtant, constitue un produit qu’on peut, relativement, exploiter à moindre frais. Les années se suivent et se ressemblent pour ce créneau qui s’apparente à un véritable filon d’or dormant.

Les réunions, les discours et toutes ces actions de promotion qu’on enchaîne n’ont trouvé aucun écho sur le terrain, et les richesses que recèle le pays attendent toujours d’être mises sur le marché, dans les circuits touristiques et les programmes de recherches scientifiques.

Beaucoup d’argent a pourtant été investi dans des projets de restauration et/ou de réhabilitation de sites patrimoniaux. Mais, une fois le chantier bouclé, le site revient à son état léthargique. Et les exemples sont légion. Chaque ville, chaque région peut aligner au moins deux sites qui sommeillent sous les poussières de l’oubli.

Tipasa, Cherchell, Tiddis, Tlemcen, Béthioua, Djemila, Ghardaïa,… que de noms chargés d’histoire mais qu’on n’évoque qu’à l’occasion, conjoncturellement.

Les agences de voyage -force de proposition en la matière- ont assimilé la leçon depuis belle lurette: investir dans la billetterie, l’organisation des omras et les réveillons de fin d’année.

Seuls quelques voyagistes du Sud arrivent encore à vendre des circuits, mais pour des voyages d’évasion, de découvertes et de dépaysement.

Il est rare de voir une équipe de chercheurs ou des touristes initiés à l’histoire. Le rendement des espaces touristiques demeure dérisoire. Ce qui dénote de l’absence d’une stratégie apte à promouvoir l’économie «touristique» avec l’exploitation optimale des divers patrimoines disponibles.

De l’avis d’experts «l’activité culturelle n’est pas inscrite dans les programmes du secteur touristique». Pourtant, l’investissement dans cette niche serait, avec une bonne exploitation, amorti, créerait des emplois et assurerait même des bénéfices qui contribueraient à l’entretien des sites, donc à leur pérennisation. Dès lors, le patrimoine deviendrait un produit «locomotive» qui permettrait de «vendre» d’autres produits touristiques.

«Les rapports entre les responsables ou plutôt les acteurs du tourisme et de la culture devraient être bien articulés et interagir afin de soutenir la bonne vulgarisation et la vente du produit», souligne un expert.

Mais ce schéma est quasi absent. La promotion de l’image n’est malheureusement pas le fort des responsables, ni locaux ni centraux.

«Souvent, lorsqu’on évoque le volet du tourisme, les intentions se focalisent sur la présence étrangère en ignorant les potentialités locales qui peuvent contribuer à la renaissance du secteur. C’est un travail de longue haleine qui devra se faire afin d’attirer beaucoup de monde, de quelque horizon que ce soit», explique le responsable d’une agence de voyage, qui confirmera que les séjours à prédominances culturelles sont quasi inexistants.

Les musées sommeillent en attendant quelques hypothétiques visiteurs, les villes antiques poursuivent leur traversée du désert et les vestiges, qui ont défié le temps, tentent vaille que vaille de survivre encore aux différentes attaques qu’ils continuent de subir.

L’Algérie a toujours ses atouts, mais le touriste doit être gagné. Il doit être informé de la beauté et l’importance de ce qu’il va découvrir et convaincu de l’intérêt de débourser de l’argent pour le faire.

Et s’il vient, il faut qu’il reparte satisfait. C’est la règle d’or du tourisme qu’il s’agira d’adapter et appliquer au patrimoine culturel, si on veut en tirer parti et profit.

Hélas, pour l’heure, la «rentabilisation» de nos richesses culturelles n’est pas à l’ordre du jour. Le tourisme culturel n’est pas une opération ponctuelle ou une action temporelle, c’est une dynamique qui traduit une stratégie élaborée à court, moyen et long termes.

C’est surtout un travail qui exige une contribution intersectorielle dont l’objectif est de faire produire de la valeur ajoutée à ce qui est amplement subventionné par l’Etat.

Ce n’est pas des Assises, des Journées ou des Salons, encore moins des discours ronflants, qui concrétiseront une politique, surtout quand elle induit l’intersectorialité.


Nasser Hannachi


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