Algérie

Les révoltes arabes «présentes» au salon du livre Idées : les autres articles



Les révoltes arabes «présentes» au salon du livre                                    Idées : les autres articles
«Je ne réponds pas à cette question !» La réplique est de l'écrivain algérien, peu connu, Youcef Tounsi, le soir d'un débat au 16e Salon international du livre d'Alger (SILA) qui se tient jusqu'à demain sous les chapiteaux de l'esplanade du 5 Juillet.
La question ' «Pourquoi les écrivains arabes, algériens en particuliers, se taisent sur les massacres actuels commis par les régimes syrien et yéménite '» Question qualifiée d'étrange par Sofiane Hadjadj, responsable des éditions Barzakh, dont l'argument est le suivant : des positions avaient été exprimées sur ces situations. Youcef Tounsi s'est engagé alors sur le sentier de «la création littéraire». «Je peux en parler. Mais dans mon écriture, j'invente, j'ai mon imaginaire. Il y a le caractère subjectif de l'écriture. Ensuite, je vais être à l'écoute de certaines choses qui font 'tilt'. Je ne cherche pas à dire la vérité. Il faut juste ne pas être dans le faux», a expliqué l'auteur de Les impasses de la régence. Assis à la même tribune, Kamel Daoud, écrivain et journaliste, a pris le soin de répondre à la même interrogation avec ironie : «Il y a des écrivains arabes qui ont écrit sur les révolutions arabes, se sont trompés et sont allés à Bahreïn !» Il faisait allusion à Yasmina Khadra qui a reçu un prix à Manama.
L'auteur de L'équation africaine (qui vient de paraître aux éditions Médias plus) n'a pas apprécié que Kamel Daoud critique ses silences sur la répression des manifestations de la place de la Perle (Louloua) à Manama le printemps dernier. «Il est vrai que cela relève plus de l'engagement et de la morale des écrivains que de création et d'esthétique», a reconnu le chroniqueur du Quotidien d'Oran. La question est de savoir comment s'engager sans être dans le factuel. «Le drame n'a pas de nationalité. J'ai été déçu par la position de Adonis, mais lui fait sa révolution depuis plus de trente ans», a ajouté Kamel Daoud, qui revendique la séparation de l'engagement militant de l'entreprise de création.
Citoyens d'abord
Son idée est de rompre avec l'expérience du «roman de l'urgence» (à la mode dans les années 1990 en Algérie). «Il faut défendre l'humain», a-t-il plaidé. Le romancier Waciny Laradj a, pour sa part, et dans un autre débat, estimé que des écrits ont été publiés dans la presse arabe pour dénoncer les boucheries du régime de Damas et de Sanâa. «Mais il n'y a pas une action commune des intellectuels arabes», a-t-il dit. Il a évoqué les écrivains et artistes agressés et blessés lors des révoltes de Tunisie et d'Egypte et des manifestations en Syrie. «Ils sont d'abord des citoyens qui militent pour le changement dans la société. Mais du fait qu'ils soient écrivains, ils reviendront plus tard sur ces événements en publiant des poèmes, des romans, des témoignages, un tableau... La génération actuelle en parlera, même si ce n'est pas forcément une règle.
La génération qui a écrit sur la révolution en Algérie était celle venue après l'indépendance», a-t-il souligné insistant sur le fait que la littérature ne doit pas être l'expression de l'instant. Tranchant, Waciny Laradj, qui ne croit pas à la révolution «soutenue par l'OTAN», a estimé que «le Printemps arabe» s'est arrêté avec la révolte du peuple égyptien contre la dictature des Moubarak. «Cela dit, on ne peut pas dire que les révolutions arabes ont abouti. Ce n'est qu'un début. Lorsqu'on lira les Constitutions qui vont émaner de ces mouvements de révolte, on pourra alors porter un jugement», a prévenu l'auteur de Joumloukia arabia (dernier roman paru à Beyrouth). Selon lui, le citoyen arabe a été dépossédé de sa citoyenneté et de sa dignité.
«La muraille de la peur a été démolie, et après ' Il faut attendre la constitution des nouvelles forces politiques pour avoir une idée précise», a-t-il ajouté. D'après lui, les islamistes sont aux aguets. «Peut-être que je me trompe», a-t-il enchaîné. Présent au même débat, le poète libanais Iskander Habache, auteur notamment du recueil Désespéré par ce silence (La amel li bi hadha), a relevé, de son côté, que les positions sont condamnées parfois par le moment, l'actuel, l'instant. «Des écrivains ont produit des écrits de dénonciation, mais cela ne relève pas de la grande littérature. La littérature a besoin de temps, de réflexion, de redécouverte de la langue», a-t-il dit. Il a observé que la langue littéraire des blogs de contestation ou de facebook est limitée.


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