Algérie

Les rêves de nos enfants



À chaque fois qu'un écrivain, un artiste, un scientifique ou un sportif algérien réussit à l'étranger, un sentiment de fierté mais mêlé d'amertume envahit notre esprit. Non encouragés dans leur propre pays, beaucoup de talents algériens vont chercher à s'épanouir ailleurs, dans des pays étrangers, certes prompts à les accueillir et les mettre en valeur mais pour leur plus grand profit d'abord.Dans le domaine, par exemple, de la littérature et de la chanson, qui sont les expressions artistiques les plus instinctives de l'âme d'un peuple, le talent algérien est avantageusement représenté partout dans le monde. Le désir irrépressible de s'exprimer et de briser les tabous (motivé par la quasi-faillite du rêve algérien) a donné naissance à une expression rebelle et atypique qui a trouvé toute sa place sur le marché mondial de la culture. Néanmoins, cette image d'une partie de notre élite, honorée à l'étranger et brocardée chez elle, est une douleur insupportable qui entraîne un constat brutal (peut-être exagéré) : chez nous, il est devenu normal d'exporter des cerveaux et d'importer des bananes.
L'émir Khaled, sollicité dans les années 1930, par un jeune avocat nationaliste algérien (maître Omar Boukli-Hacene) pour retourner au pays et montrer la voie à la jeunesse, eut cette réponse très pessimiste : «Il est dans les m?urs de l'Algérie de châtrer ses étalons !» («Mâ ettbayâï hadi el-bled, takhsssi fhoulhâ»). Devant ce gâchis, non pas de pétrole et de gaz, mais d'hommes et de femmes qui auraient pu servir honnêtement leur pays et le construire véritablement, devant tant de compétences gaspillées, de bonnes volontés découragées, qui ont fini parfois dans les caniveaux de la République, pendant que tout un chacun faisait sienne la devise du moindre effort et du je-m'en-foutisme généralisé (sauf lorsqu'il s'agit de hogra ou de trafic) l'on ne peut malheureusement qu'être tenté de souscrire à ce terrible verdict.
Comme une mère porte son enfant, un pays porte l'ambition de son peuple, et parfois, au milieu du front, la cicatrice de ses remords. Je forme ici le v?u que les enfants d'aujourd'hui, les citoyens de demain, de ce pays au long cours, l'Algérie, refuseront de construire leur vie dans le mensonge et le factice et qu'ils décideront de se réapproprier le sens des vraies valeurs, de renouer avec la vertu du travail et de l'effort et de se battre pour concrétiser leurs rêves, de réapprendre à aimer leur pays, de croire que rien n'est jamais perdu, au grand dam de ceux qui ont tout acheté et tout vendu. Et ces rêves-là seront la grandeur de l'Algérie.
Car ce n'est jamais la vérité et l'espérance qu'on assassine mais l'utopie d'un pays sage et fraternel qu'on foule aux pieds. Et avec elle, le sacrifice des hommes et la générosité des idées.


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