Algérie

Les reproches du FCE



L'ouverture des travaux de la 14ème réunion des partenaires socioéconomiques a été marquée par une intervention du président du Forum des chefs d'entreprises (FCE) qui a poussé le Premier ministre à réagir.

C'est jeudi que la tripartite a eu lieu à la résidence El Mithak. Elle a regroupé le gouvernement, l'UGTA et plusieurs organisations patronales dont une publique, l'Union nationale des entrepreneurs publics (UNEP). C'est le président du FCE qui a été le plus prolixe en matière de remarques, de reproches et de critiques au sujet de la politique économique du gouvernement. Reda Hamiani a tenu à braquer son «focus» (terme qu'il a utilisé) sur, a-t-il dit, «la faiblesse de l'appareil de production, sur les importations qui nous submergent et sur le chômage qui s'aggrave.» Il estime que «l'urgence absolue est de créer plus d'emplois, et de qualité (…).» Mais avant toute chose, le président du FCE pense qu'il faut un préalable, «qu'il y ait une confiance entre les partenaires pour un démarrage économique effectif». Il reprochera au gouvernement de ne pas avoir tenu à plusieurs de ses promesses comme la mise en service du conseil de la fiscalité, les mécanismes de la promotion des exportations, le conseil de la concurrence, le permis de construire qui pose problème, la lettre de crédit… Hamiani fera remarquer qu' «à chaque fois qu'il s'agit de décisions restrictives et privatives, leur application se fait avec une promptitude absolue, mais quand il s'agit des droits des opérateurs, on s'enlise dans des lenteurs et des blocages». Il titillera le Premier ministre qui, avait avant lui, reproché «à un expert d'affirmer dans la presse que les recommandations de la tripartite de mai dernier n'ont pas été prises en charge». Ahmed Ouyahia a jugé que l'expert en question était mal informé. «Nous n'avons pas les mêmes échos, ni les mêmes analyses, mais pour ce qui est des mesures décidées, c'est laborieux, elles sont appliquées de façon très inégale», a lâché le patron du FCE. Bien qu'il estime que «les lois sont généralement bonnes», Hamiani pense que «la mise en Å“uvre pose problème. L'administration est déphasée par rapport au pouvoir politique». La bureaucratie est cet autre fléau dont il se plaint aussi. «On ne veut pas diaboliser un certain nombre d'activités économiques mais les pouvoirs publics doivent aider l'entreprise et son environnement à évoluer», dit-il. C'est, continue-t-il, «beaucoup plus facile d'importer et de vendre que de créer une entreprise». Il dénonce ainsi «l'emprise de l'importation qui est menaçante». Il fait savoir que les importations des biens ont atteint 32 milliards de dollars, «d'ici à la fin de l'année, elles atteindront 62 milliards de dollars si on calcule avec celles des services». Il appellera le gouvernement à «reconsidérer la stratégie de développement et avoir une vision pour un développement concerté qui soit le plus performant par rapport aux moyens que nous avons». Il estime que «l'atrophie de notre système économique, notamment l'industrie, est le résultat des contraintes sur le terrain». Il est convaincu qu' «on n'arrive pas à mettre en place une politique économique cohérente». Hamiani abordera la question de la revalorisation des salaires à leur manière. «Le patronat est favorable pour améliorer la situation sociale des travailleurs par une hausse du SNMG, c'est naturel par rapport à un phénomène de rattrapage». dit-il. Mais, précise-t-il, «on ne peut pas dépenser et gagner de l'argent qu'on n'a pas produit, si dans le même temps la production ne suit pas». Il continue, «autant nous avons une fibre sociale, autant nous sommes confrontés à une réalité économique qui nous donne une marge de manÅ“uvre faible». Il rappelle au gouvernement ce qu'il qualifie d'inégalités : «si vous avez décidé d'augmenter les salaires de la fonction publique c'est parce que vous avez les moyens de le faire, par le fonds de régulation, si les entreprises publiques ont des difficultés, vous leur accordez des aides, vous effacez leurs dettes. Mais nous, ce n'est pas gagné, ce n'est pas facile, supporter des charges et des hausses de salaires, c'est beaucoup plus ardu pour nous». Il conclura son intervention comme il l'a commencée, en vantant les vertus du dialogue social. Il avait commencé par dire que «si nous avons tenu deux tripartites en l'espace de moins de 6 mois, cela dénote de la bonne santé du dialogue économique et social». Il termine par : «le dialogue est la clef pour trouver des solutions consensuelles et partagées».

Le président du FCE aura ainsi tendu une belle perche au Premier ministre pour qu'il lui fasse des remarques qui lui tenaient certainement à cÅ“ur. «J'ai le devoir de dire trois petites remarques», a lancé Ahmed Ouyahia à Hamiani. «La première est que vous restez égal à vous-même», a-t-il dit. Il est évident que les deux hommes se rappellent qu'ils ont eu à étaler leurs divergences au grand jour. C'était lorsque Hamiani avait critiqué sévèrement les dispositions de la loi de finances complémentaire de 2009 et que conséquemment, Ouyahia avait instruit les entreprises publiques à quitter le FCE alors qu'elles en étaient membres à part entière. La deuxième remarque du Premier ministre est, a-t-il dit, «mon espoir personnel est que nous aiderons ensemble l'entreprise à sortir du libéralisme de la mamelle dans laquelle on veut la mettre comme elle l'a été par le passé dans le socialisme de la mamelle». Remarque qui résumera le fond de sa pensée à l'égard des patrons privés qu'il doit, en évidence, accuser de ne jamais mettre la main à la poche et de compter sur l'aide de l'Etat. Sa dernière remarque, il la lancera avec un plus large sourire. «Mon espoir et ma certitude c'est - parce que nous allons creuser nos travaux - de vous voir ressortir avec un peu plus d'optimisme», dira Ouyahia au président du FCE dont l'organisation n'assiste à la tripartite que pour la deuxième fois.




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